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30/01/2014 | FRANCE | N°13NT01786

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 30 janvier 2014, 13NT01786


Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour Mlle B... A..., demeurant..., par Me Ifrah, avocat au barreau du Mans ; Mlle A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301408 en date du 17 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2013 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au pr

fet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à tout le moins, de procéder ...

Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour Mlle B... A..., demeurant..., par Me Ifrah, avocat au barreau du Mans ; Mlle A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301408 en date du 17 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2013 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de la munir dans cette attente d'une autorisation provisoire de séjour, le tout sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Ifrah de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, moyennant la renonciation de cet avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

elle soutient que :

- le signataire de l'arrêté contesté n'était pas compétent ;

- les décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire sont insuffisamment motivées ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur de droit et a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination a été rédigée de façon stéréotypée et porte atteinte à sa dignité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2013, présenté par le préfet de la Sarthe, qui conclut à titre principal au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, au rejet des conclusions à fin d'injonction de délivrance d'un titre de séjour et des conclusions tendant à ce que la somme de 3000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

- les décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire sont suffisamment motivées ;

- le refus de titre de séjour n'est pas entaché d'erreur de droit et n'a pas été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; le refus de titre de séjour ne méconnait pas non plus les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation sont à écarter pour les mêmes motifs que ceux concernant le refus de titre de séjour ;

- le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait rédigée de façon stéréotypée et ne tiendrait pas compte de sa situation de la requérante n'est pas fondé ;

Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le

tribunal de grande instance de Nantes en date du 4 septembre 2013 admettant Mlle A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Ifrah pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014, le rapport de M. Monlaü, premier conseiller ;

1. Considérant que Mlle A..., de nationalité pakistanaise, relève appel du jugement en date du 17 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2013 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 19 juin 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs, n° spécial du mois de juin 2012, le préfet de la Sarthe a consenti une délégation à Mme Magali Debatté, secrétaire général de la préfecture de la Sarthe, à l'effet de " signer tous arrêtés, décisions, circulaires, et avis relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception : - des propositions à la Légion d'honneur et à l'ordre national du mérite ; des arrêtés de conflit ; des arrêtés de réquisition. " ; qu'une telle délégation, qui est suffisamment précise et inclut nécessairement, compte tenu de ses termes, les décisions relatives au séjour et à l'éloignement des étrangers, donnait compétence à Mme C... pour signer les décisions contestées ; que par suite, contrairement à ce que soutient Mlle A..., cette délégation ne peut être regardée comme une délégation générale de signature ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

3. Considérant, en second lieu, que le refus de titre de séjour opposé à Mlle A..., vise les articles applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que la demande d'asile de Mlle A... a été rejetée et qu'après examen approfondi de la situation de l'intéressée, elle n'entrait dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour ; que la décision de refus de titre de séjour est, dès lors, régulièrement motivée au regard des exigences posées par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; qu'en application des dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la mesure d'obligation de quitter le territoire français dont le préfet de la Sarthe a assorti sa décision de refus de séjour n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte ;

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Sarthe, qui a statué sur la demande de délivrance d'un titre de séjour que la requérante avait formulée lors de la présentation de sa demande d'asile pour pouvoir se maintenir en France lors de l'examen de celle-ci et qui n'était saisi d'aucune demande à un autre titre, a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée et cela quand bien même, compte tenu de la nature du titre sollicité, il n'a pas fait état de la circonstance que le compagnon de sa mère subvenait à ses besoins ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux ; que, si Mlle A... a entendu soulever le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant à l'administration de délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, un tel moyen est inopérant dès lors qu'aucune demande de titre de séjour n'a été présentée sur le fondement de ces dispositions et que le préfet n'était pas tenu d'examiner d'office si l'intéressée remplissait les conditions prévues par cet article ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si Mlle A... fait valoir qu'elle vit avec sa mère et le compagnon de celle-ci, ressortissant français, qui pourvoit à ses besoins et qu'elle ne veut plus revoir son grand-père dans son pays d'origine en raison du mariage forcé que celui-ci tente de lui imposer, il ressort toutefois des pièces du dossier que la requérante, entrée irrégulièrement en France le 2 avril 2011, a vécu au Pakistan avec sa mère jusqu'à l'âge de 24 ans ; que la requérante n'établit pas que le compagnon de sa mère chez qui elle vit subviendrait à ses besoins ; que les circonstances qu'elle invoque selon lesquelles son grand-père tenterait de lui imposer un mariage forcé ne sont pas établies ; que sa mère fait également l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'ainsi, eu égard au caractère récent de son entrée en France, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de Mlle A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, en refusant de délivrer un titre de séjour à l'intéressée, le préfet de la Sarthe n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent les éléments précédemment exposés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour doivent être écartés pour les mêmes motifs ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant que si Mlle A... soutient que la formulation imprécise de la décision fixant le pays de destination ne prend pas en compte sa situation personnelle et les conséquences d'un tel renvoi et porte atteinte à sa dignité, ce moyen n'est pas assorti devant la cour des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ; qu'au demeurant, si elle a prétendu devant le tribunal qu'elle serait soumise à des mauvais traitements en cas de retour dans son pays d'origine du fait du mariage forcé que son grand-père lui imposerait, elle n'apporte aucun élément probant de nature à établir la réalité et l'effectivité des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine sur ce point, alors qu'au surplus son récit n'avait déjà pas été estimé comme crédible par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que Mlle A..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mlle A..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au profit de l'avocat de Mlle A..., de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mlle A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Monlaü, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 janvier 2014.

Le rapporteur,

X. MONLAÜLe président,

G. BACHELIER

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT017862


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01786
Date de la décision : 30/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. Xavier MONLAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : SCP GALLOT LAVALLEE IFRAH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-01-30;13nt01786 ?
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