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24/10/2013 | FRANCE | N°12NT01278

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 24 octobre 2013, 12NT01278


Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2012, présentée pour la SAS Société Laurent Pelliet venant aux droits de la SAS Laurent Pelliet, dont le siège social est situé Gare Maritime du Naye à Saint-Malo (35400), par Me Dahan, avocat au barreau de Rennes ; la SAS Société Laurent Pelliet demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0903460 et 0903462 en date du 5 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles la SAS Laurent Pelliet a été assujetti

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Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2012, présentée pour la SAS Société Laurent Pelliet venant aux droits de la SAS Laurent Pelliet, dont le siège social est situé Gare Maritime du Naye à Saint-Malo (35400), par Me Dahan, avocat au barreau de Rennes ; la SAS Société Laurent Pelliet demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0903460 et 0903462 en date du 5 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles la SAS Laurent Pelliet a été assujettie au titre des années 2004 à 2006 dans les rôles de la commune de Saint-Malo et au titre des années 2004 à 2008 dans les rôles de la commune de Pleudihen-sur-Rance ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle acquittées au titre de la cotisation minimale de taxe professionnelle ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- bien que la SAS Laurent Pelliet ne dispose pas de camions-tracteurs, elle exerce une activité de transporteur au sens de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts dès lors qu'elle a pour objet de déplacer des marchandises tout en assurant la maîtrise de l'opération ; la circonstance qu'une entreprise sous-traite les opérations de transport qui lui ont été confiées par ses clients ne suffit pas à lui conférer la qualité de commissionnaire de transport en l'absence de consentement express du donneur d'ordre à la substitution ; il ressort des conditions générales de vente de la SAS Laurent Pelliet que la responsabilité de la société à l'égard de ses clients est déterminée par les articles 103 et suivants du code de commerce, c'est-à-dire selon les règles applicables aux transporteurs et non aux commissionnaires de transport ; les contrats signés entre la SAS Laurent Pelliet et des clients sont des contrats de transport et les conditions générales de vente ne font pas référence à une commission de transport ; les remorques et les camions tracteurs portent l'enseigne " Laurent Pelliet " ; pendant le déroulement de l'opération de transport, les ordres sont donnés par la société Laurent Pelliet qui, par ailleurs, prend en charge les formalités douanières, paye les frais de traversée de la Manche, et assure le suivi de la prestation d'acheminement des marchandises ; au départ du site de Saint-Malo, les remorques ne sont pas tractées mais déposées directement dans les ferries à destination des iles anglo-normandes ; une distinction injustifiée au détriment des remorques par rapport aux conteneurs pour lesquels la doctrine administrative admet qu'ils puissent bénéficier de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ;

- elle est fondée à se prévaloir de la documentation administrative n° 6 E-2411, n° 3, du 10 septembre 1996, qui ne réduit pas la notion de véhicule au matériel tractant ;

- le principe de territorialité de la taxe professionnelle a été méconnu ;

- elle a acquitté les suppléments d'imposition procédant de l'application des dispositions de l'article 1647 E du code général des impôts, relatives à la cotisation minimale de taxe professionnelle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2012, présenté par le ministre délégué chargé du budget, qui conclut au non-lieu à statuer à concurrence de la somme de 60 136 euros et au rejet du surplus de la requête ;

le ministre soutient que :

- la société se trouvant en situation de double imposition à raison des suppléments de taxe qu'elle a acquittés au titre de la cotisation minimale de taxe professionnelle prévue à l'article 1647 E du code général des impôts, il lui est accordé un dégrèvement d'un montant total de 60 136 euros ;

- la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de la décision de dégrèvement non motivée du 24 octobre 1995, qui ne comporte dès lors aucune interprétation formelle de la loi fiscale, pour soutenir que l'administration lui a reconnu la qualité de transporteur ;

- la SAS Laurent Pelliet, qui a toute latitude pour organiser le transport par les voies et moyens de son choix, sous son nom et sa responsabilité, s'engage à l'égard de ses clients à assurer l'acheminement des marchandises périssables à destination et qui ne dispose pas des moyens de transport susceptibles de lui conférer la qualité d'entreprise de transport, exerce une activité de commissionnaire au sens de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ; elle ne peut, en cette qualité, se prévaloir des termes de la doctrine administrative 6 E-2411, n° 3, du 10 septembre 1996 ; les opérations de manutention réalisées dans une zone portuaire pour procéder à l'embarquement de ses remorques frigorifiques ne sauraient conférer à la société Laurent Pelliet, pour cette seule activité, la qualité d'une entreprise de transport au sens de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ; enfin, la société n'a pas la maîtrise technique des opérations de transport et ne déplace pas les marchandises ;

- le principe de territorialité de la taxe professionnelle n'a pas été méconnu ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 janvier 2013, présenté pour la SAS Société Laurent Pelliet qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens

elle soutient, en outre, que :

- elle est fondée à se prévaloir de la décision de dégrèvement du 24 octobre 1995 prononcée en réponse à sa réclamation fondée sur les dispositions de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ;

- il incombe à l'administration d'établir que la SAS Laurent Pelliet n'est pas une entreprise de transport au sens de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :

- le rapport de M. Giraud, premier conseiller,

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,

- et les observations de Me Dahan, avocat de la SAS Société Laurent Pelliet ;

Sur les conclusions présentées à titre principal :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

1. Considérant qu'aux termes de l'article 1448, alors en vigueur, du code général des impôts : " La taxe professionnelle est établie suivant la capacité contributive des redevables, appréciée d'après des critères économiques en fonction de l'importance des activités exercées par eux sur le territoire de la collectivité bénéficiaire ou dans la zone de compétence de l'organisme concerné " ; qu'aux termes de l'article 1467 de ce code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " La taxe professionnelle a pour base : / 1° (...) a) La valeur locative (...) des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) " ; qu'aux termes de l'article 1471, alors en vigueur, du même code : " Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les modalités d'application de la taxe professionnelle aux entreprises qui exercent une partie de leur activité en dehors du territoire national " ; qu'enfin, aux termes de l'article 310 HH de l'annexe II à ce code : " Pour les entreprises qui exercent une partie de leur activité en dehors du territoire national (...) : / (...) 2° La valeur locative de l'ensemble des véhicules dont dispose une entreprise de transport (...), ainsi que de leurs équipements et matériel de transport, est retenue proportionnellement à la part, dans les recettes hors taxes de l'entreprise, de celles qui correspondent à des opérations effectuées dans les limites du territoire national et soumises à la taxe sur la valeur ajoutée (...) " ;

2. Considérant que la SAS Laurent Pelliet, qui a notamment pour objet statutaire le transport de marchandises, le service de transport routier de marchandises et toutes activités se rapportant à l'activité de commissionnaire de transport, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service a remis en cause les bases à la taxe professionnelle déclarées par la société au titre, d'une part, des années 2004 à 2008 pour le site qu'elle exploite à Pleudihen-sur-Rance et, d'autre part, des années 2004 à 2006 pour son site d'exploitation de Saint-Malo au motif que son activité ne constituait pas une activité de transport au sens des dispositions précitées de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ; qu'il résulte de l'instruction et en particulier des termes de la convention liant la contribuable à sa filiale, la société Transport de l'Arc Atlantique, que la SAS Laurent Pelliet, à laquelle sont confiées par ses clients l'organisation et la réalisation de prestations de livraisons de marchandises périssables au Royaume-Uni et qui ne dispose pour l'exercice de cette activité que de remorques frigorifiques, confie l'exécution de la prestation de livraison à des entreprises de transport qui assurent seules et sous leur responsabilité, au moyen de leurs propres véhicules, le déplacement des marchandises tout en assurant la maîtrise des opérations ; que, par suite, c'est à bon droit et sans méconnaître le principe de territorialité de la taxe professionnelle, dès lors que la SAS Laurent Pelliet exerce pour partie son activité en France et y dispose de locaux d'exploitation, ni instituer de discrimination illégale au détriment des entreprises ayant recours à des sous-traitants, que l'administration a estimé, après avoir relevé que la société n'effectuait pas elle-même le transport des marchandises et n'en avait pas la maîtrise, était inscrite au registre des commissionnaires de transport et se présentait en cette qualité auprès de ses partenaires, et enfin, prenait en charge les formalités douanières, payait les frais de traversée, et assurait le suivi de la prestation d'acheminement des marchandises, qu'elle ne pouvait être regardée comme une entreprise de transport au sens de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts ;

En ce qui concerne l'application de la doctrine :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que la SAS Société Laurent Pelliet n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de la documentation administrative n° 6 E-2411, n° 3, du 10 septembre 1996 qui ne comportent pas, sur l'appréciation de la qualité de transporteur au sens des dispositions précitées de l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts, d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ; que, d'autre part, la décision du 24 octobre 1995 par laquelle l'administration a accordé le dégrèvement des cotisations de taxe professionnelle établies au titre des années 1993 et 1994, qui n'était pas motivée, ne constitue pas une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au sens de l'article L. 80 B précité du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Société Laurent Pelliet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire tendant à la restitution des suppléments d'imposition acquittés par la société SAS Société Laurent Pelliet au titre des dispositions de l'article 1647 E du code général des impôts relatives à la cotisation minimale de taxe professionnelle :

6. Considérant que, par une décision du 8 juillet 2012, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal Ouest a fait droit à la demande de restitution de la société requérante laquelle est, par suite, devenue sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SAS Société Laurent Pelliet demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SAS Société Laurent Pelliet tendant à la restitution des cotisations minimales de taxe professionnelle mises à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 1647 E du code général des impôts.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SAS Société Laurent Pelliet est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Société Laurent Pelliet et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Piot, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M.Giraud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 octobre 2013.

Le rapporteur,

T. GIRAUD Le président,

J-M. PIOT

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT01278 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12NT01278
Date de la décision : 24/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : DAHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-24;12nt01278 ?
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