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18/10/2013 | FRANCE | N°12NT01721

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 octobre 2013, 12NT01721


Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2012, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me Cavelier, avocat au barreau de Caen ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104559 du 24 mai 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2011 du préfet d'Indre et Loire lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant la république du Congo comme pays de renvoi de cette mesure ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°)

d'enjoindre au préfet d'Indre et Loire de lui délivrer le titre de séjour sollicité da...

Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2012, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me Cavelier, avocat au barreau de Caen ; M. C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104559 du 24 mai 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2011 du préfet d'Indre et Loire lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant la république du Congo comme pays de renvoi de cette mesure ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Indre et Loire de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Cavelier d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 22 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

il soutient que :

- le préfet aurait du saisir la commission du titre de séjour dès lors qu'il pouvait bénéficier de plein droit de l'admission au séjour au regard des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet d'Indre et Loire a méconnu les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et également commis une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où il est le père de l'enfant Noam de nationalité française né le 29 avril 2008 avec lequel il a vécu jusqu'à sa séparation avec sa mère en avril 2011 suite à son incarcération ;

- s'il n'a pu participer en raison de son emprisonnement à l'entretien effectif de son fils du fait de son impécuniosité, des retraits ont toutefois été effectués sur son compte bancaire, vraisemblablement par la mère de son enfant, démontrant ainsi une participation indirecte à l'entretien matériel de ce dernier et, depuis sa sortie de prison le 28 novembre 2011, il a manifesté son intérêt pour son enfant en adressant un mandat cash d'un montant de 200 euros à la mère de celui-ci le 14 décembre 2011 et en introduisant une requête auprès du juge aux affaires familiales près le tribunal de grande instance de Caen le 25 janvier 2012 en vue de se voir accorder un droit de visite ;

- son ex-compagne a attesté lui avoir confié plusieurs fois l'enfant Noam ;

- la mesure d'aménagement de peine dont il a bénéficié a été de courte durée du fait de l'absence de déclaration auprès de l'URSSAF de la part de son employeur l'empêchant, ainsi, de contribuer à l'entretien de son enfant et il n'a donc pas été tenu compte des circonstances particulières de son incarcération ;

- l'arrêté attaqué a porté une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale ;

- une erreur manifeste d'appréciation a été commise dès lors que, vivant en France depuis 2002 et père d'un enfant français, il pouvait prétendre à un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dans la mesure où il souffre de diabète alors qu'il avait obtenu le bénéfice de l'admission au séjour sur ce fondement en 2007 et qu'il ne disposerait pas d'un traitement approprié dans le pays de renvoi où il serait d'ailleurs isolé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2012, présenté par le préfet d'Indre et Loire qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;

- M. C... ne justifie pas contribuer à l'entretien de l'enfant Noam dans les

conditions exigées par les dispositions de l'article 371-2 du code civil ;

- l'appelant ne justifie d'aucune circonstance particulière justifiant l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- l'intéressé n'a pas sollicité le bénéfice de l'admission au séjour en tant qu'étranger malade et ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2013, présenté pour M. C... qui conclut aux mêmes fins ;

il soutient en outre que :

- un arrêt de la cour d'appel de Caen du 16 mai 2013 précise que l'autorité parentale pourrait être rétablie en sa faveur sous réserve de régularisation de sa situation administrative et qu'il dispose d'un droit de visite deux fois par mois dans un lieu médiatisé ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 23 octobre 2012, admettant M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Cavelier pour le représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2013 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C..., ressortissant de la République du Congo, interjette appel du jugement du 25 mai 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2011 du préfet d'Indre et Loire lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant la République du Congo comme pays de renvoi de cette mesure ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...)" ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré irrégulièrement en France en juin 2002 ; qu'il s'est prévalu de la naissance, le 29 avril 2008, de l'enfant Noam, issu de sa relation avec une ressortissante française, et qu'une carte de séjour temporaire lui a été délivré le 5 juillet 2008 sur le fondement de l'article L. 313-11 6° du code précité par le préfet du Calvados ; qu'il est constant qu'il a été condamné le 12 avril 2010 par la cour d'appel de Caen à trois mois d'emprisonnement pour violences conjugales puis le 12 mai 2010 pour vol en réunion par le tribunal correctionnel de Caen, et a été ainsi incarcéré du 11 avril au 28 novembre 2011 ; qu'il ne vit pas avec son enfant, ne peut se prévaloir, pour justifier de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de celui-ci, des seuls retraits qu'il allègue avoir été effectués par la mère de l'enfant sur ses comptes courants durant son incarcération, pour lesquels il a d'ailleurs déposé une plainte, ni de la saisine le 25 janvier 2012 du juge aux affaires familiales en vue d'obtenir un droit de visite ; que, par ailleurs, et à supposer même établie la précarité de ses ressources, il ne justifie avoir contribué à l'entretien de l'enfant Noam qu'à l'unique occasion du versement le 14 décembre 2011, postérieurement à la décision contestée, d'un mandat cash de 200 euros à la mère de celui-ci ; qu'il ne ressort donc pas des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté susmentionné du préfet d'Indre et Loire, l'intéressé apportait effectivement une aide matérielle à l'entretien de son enfant ; que les autres éléments, également postérieurs à la date de l'arrêté en litige, qu'il verse aux débats, consistant notamment en une attestation non signée mentionnant qu'il a apporté le 8 décembre 2011 des vêtements à l'école de son fils, au demeurant absent à cette date, ainsi qu'une attestation du 28 décembre 2011, très peu circonstanciée, de son ex-compagne certifiant lui avoir confié plusieurs fois l'enfant Noam, ne permettent pas davantage d'établir que l'appelant contribuait de manière effective à l'éducation de son fils ni même qu'il entretenait avec lui des liens affectifs réguliers depuis sa naissance ; que dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet, en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité, n'aurait pas tenu compte des circonstances particulières de son incarcération, en particulier de la brièveté de sa période de semi-liberté, et aurait méconnu les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations susrappelées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de l'intéressé ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C... n'était pas au nombre des ressortissants étrangers pouvant obtenir de plein droit une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, faute d'établir qu'il entrait dans une catégorie d'étrangers pouvant prétendre de plein droit à un titre de séjour, il ne peut donc se prévaloir de ce que la commission du titre de séjour devait être saisie en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue des dispositions de l'article 37 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " (...) II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

6. Considérant que le délai de trente jours accordé à M. C... pour exécuter spontanément les mesures d'éloignement contestées est le délai de principe mentionné au II de l'article L. 511-1 du code précité ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en retenant ce délai le préfet d'Indre et Loire a, compte tenu de la situation personnelle de l'intéressé, commis une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) " ;

8. Considérant que l'intéressé fait valoir que les dispositions sus-évoquées ont été méconnues dès lors qu'il souffre de diabète et qu'un traitement approprié n'est pas disponible dans le pays de renvoi ; que, s'il avait effectivement obtenu le bénéfice de l'admission temporaire au séjour en tant qu'étranger malade le 5 juillet 2007, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il n'a pas sollicité le renouvellement de son autorisation provisoire de séjour délivrée sur ce fondement et qu'il ne produit à l'appui de ses allégations qu'un seul certificat médical en date du 6 décembre 2006 d'un praticien hospitalier indiquant sans autres précisions que M. C... est atteint d'une pathologie sévère alors suivie dans son service, donc insuffisamment probant pour établir l'indisponibilité d'un traitement approprié dans le pays de renvoi alors qu'au surplus il n'est ni établi ni même allégué que son état de santé se serait dégradé depuis cette dernière date ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions de ce dernier tendant à ce que la cour enjoigne, sous astreinte, au préfet d'Indre-et-Loire, de lui délivrer le titre de séjour sollicité, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à l'avocat de M. C... de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. B..., faisant fonction de premier conseiller,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 octobre 2013.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT01721


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT01721
Date de la décision : 18/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : CAVELIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-18;12nt01721 ?
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