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18/10/2013 | FRANCE | N°12NT00793

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 octobre 2013, 12NT00793


Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012, présentée pour Mlle C... A..., demeurant... ; Mlle A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104061 du 21 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 octobre 2011 du préfet du Loiret portant obligation de quitter le territoire français et fixant la Guinée comme pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de

l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de...

Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012, présentée pour Mlle C... A..., demeurant... ; Mlle A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104061 du 21 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 octobre 2011 du préfet du Loiret portant obligation de quitter le territoire français et fixant la Guinée comme pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- une erreur d'appréciation a été commise par l'autorité administrative en ce qui concerne son état de santé dès lors qu'elle remplit les conditions d'obtention d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la pathologie d'origine tuberculinique dont elle est atteinte peut justifier une intervention chirurgicale, laquelle n'est pas envisageable dans le pays de renvoi ; les pièces médicales qu'elle produit sont de nature à infirmer l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé ;

- la décision qu'elle conteste porte une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est placée sous la tutelle de sa soeur ainée de nationalité française ;

- sa sécurité serait menacée en cas de renvoi dans son pays d'origine au regard des fonctions précedemment exercées par sa soeur en Guinée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2012, présenté par le préfet du Loiret par Me Moulet, avocat au barreau d'Orléans, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mlle A... la somme de 800 euros au titre des dispositions de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il fait valoir que :

- l'intéressée ne produit aucune pièce médicale de nature à remettre en cause l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé en date du 8 septembre 2011 confirmé en cela par un courrier du 8 décembre 2011 dudit médecin également confirmé par un second avis émis le 26 novembre 2012 par ce dernier au regard des résultats d'une épreuve fonctionnelle respiratoire effectuée le 27 septembre 2012 ; Mlle A... n'établit pas que le défaut de prise en charge de sa pathologie entrainerait des conséquences d'exceptionnelle gravité ;

- il n' a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'entrée sur le territoire français de Mlle A... est récente ; elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans le pays de renvoi ;

- Mlle A... n'a sollicité l'annulation que de la seule décision portant obligation de quitter le territoire français et ainsi les moyens soulevès à l'encontre de la décision fixant le pays de destination sont irrecevables ;

- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination ni méconu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2013 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

1. Considérant que Mlle A..., ressortissante guinéenne, interjette appel du jugement du 21 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 octobre 2011 du préfet du Loiret portant obligation de quitter le territoire français et fixant la Guinée comme pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant que, pour refuser à Mlle A... la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, le préfet du Loiret s'est fondé sur l'avis du 8 septembre 2011 du médecin de l'agence régionale de santé du Centre, lequel a notamment estimé que si l'état de santé de Mlle A... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait cependant pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine ; qu'à cet effet si le certificat médical, établi le 11 janvier 2011 par le Dr Duchesne, médecin attaché au centre hospitalier régional d'Orléans, mentionne que l'appelante présente un poumon gauche altéré suite à des séquelles de tuberculose nécessitant une prise en charge spécifique avec une surveillance régulière et qu'une éventuelle intervention chirurgicale n'est pas exclue, cette seule pièce médicale se borne toutefois à faire uniquement état de la nécessité d'un suivi médical mais n'apporte aucune indication sur le caractère impératif d'un acte chirurgical auquel l'intéressée serait éventuellement astreinte ; que, si Mlle A... verse aux débats le compte rendu d'une épreuve fonctionnelle respiratoire subie par elle le 27 septembre 2012 au service de physiologie de l'hôpital Georges Pompidou, postérieur à la décision contestée, ce dernier document indique en tout état de cause qu'elle a effectivement subi en novembre 2011 une pneumonectomie gauche et fait état d'un bilan normal compte tenu de sa pathologie ; que, par un courrier du 26 novembre 2012, le médecin de l'agence régionale de santé du Centre a ainsi confirmé son avis précité du 8 novembre 2011 en considérant que l'état clinique de Mlle A... devait désormais être regardé comme stabilisé tout en précisant également que les médicaments prescrits suite à l'examen médical susmentionné étaient disponibles en République de Guinée ; qu'il suit de là que les différentes pièces médicales produites par l'intéressée ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par l'autorité administrative sur son état de santé ; que, dans ces conditions, le préfet du Loiret n'a pas, en prenant l'arrêté contesté, méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d' autrui. " ; qu'il est constant que l'entrée sur le territoire français de Mlle A..., célibataire et sans enfants, en novembre 2009, est récente et qu'elle ne démontre pas être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans ; que la seule circonstance qu'elle serait placée sous la tutelle de sa soeur ainée de nationalité française est sans influence sur la légalité de la décision contestée dès lors qu'elle n'établit pas disposer en France de liens affectifs et stables d'une particulière intensité ; que la décision contestée ne méconnaît donc pas les stipulations précitées ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950" ; que si Mlle A... soutient que sa sécurité serait menacée en cas de renvoi dans son pays d'origine, au regard des responsabilités politiques precédemment exercées par sa soeur en Guinée, les seuls éléments très généraux relatifs à la situation interne de ce pays qu'elle produit ne permettent pas d'accréditer ses allégations et d'établir qu'elle serait personnellement exposée à des risques en cas de retour en Guinée ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le préfet du Loiret, que Mlle A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mlle A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions de cette dernière tendant à ce que la cour enjoigne, sous astreinte, au préfet du Loiret, de lui délivrer le titre de séjour sollicité, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée au titre des frais exposés par Mlle A... et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de Mlle A... le versement de la somme demandée par le préfet du Loiret à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mlle A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Loiret tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle C... A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. B..., faisant fonction de premier conseiller,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 octobre 2013.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT00793


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : CASTELLI-MAURICE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 18/10/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12NT00793
Numéro NOR : CETATEXT000028134876 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-18;12nt00793 ?
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