Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2012, présentée pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Gallot, avocat au barreau d'Alençon ; Mme A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 11-1094 du 31 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Caen à lui verser la somme de 14 215 euros en réparation du préjudice que lui aurait causé son éviction irrégulière de la conclusion du marché relatif à la " Mise en oeuvre d'une opération d'animation commerciale Commerce-Tourisme à l'occasion du 1100ème anniversaire de la Normandie " ;
2°) de condamner la CCI de Caen à lui verser cette somme ;
3°) de mettre à la charge de la CCI de Caen la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient :
- que, par sa lettre du 21 avril 2011, elle demande outre le paiement de sa facture de 4 215 euros, l'indemnisation de la rupture brutale des relations contractuelles entre sa société Guarana Communication et la CCI de Caen ; que le contentieux est ainsi lié ;
- que la demande de première instance a été déposée en son nom propre, et non pour son
entreprise individuelle Guarana Communication, qui a été radiée le 17 janvier 2011 pour insuffisance d'actif ; que cette demande était donc recevable ;
- qu'un contrat verbal a été passé entre la CCI et Guarana Communication et que ce contrat a donné lieu a des prestations dont elle demande le paiement ; que la preuve de l'existence de ce contrat réside notamment dans le compte-rendu de réunion du 28 mars 2011 ; qu'elle a été irrégulièrement évincée du marché pour lequel elle avait candidaté conjointement avec la société Récréadim, dont la candidature a été retenue ; que l'offre des deux sociétés étant conjointe, la CCI ne pouvait retenir Récréadim et écarter Guarana Communication ; que c'est à tort que la CCI prétend que son éviction est justifiée par la circonstance que seuls les lots 3 et 4 ont été attribués tandis que les deux premiers lots ont été déclarés infructueux dès lors qu'elle devait nécessairement intervenir dans les deux lots attribués pour lesquels Récréadim ne dispose d'aucune compétence propre ;
- que, la candidature étant commune aux sociétés Récréadim et Guarana Communication, cette dernière ne saurait être considérée comme un sous-traitant ; qu'elle est donc fondée à demander le paiement de sa facture directement à la CCI ;
- que le travail dont elle demande le paiement est justifié ; qu'elle a subi un préjudice d'image du fait de la rupture du contrat en cause ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2012, présenté pour la Chambre de commerce et d'industrie de Caen, dont le siège est 1, rue René Cassin, Saint-Contest à Caen (14911 Cedex 9), représentée par son président, par Me Salmon, avocat au barreau de Caen, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de
Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir :
- qu'en l'absence de signature, l'appelante ne peut se prévaloir d'aucun contrat, ni invoquer la responsabilité contractuelle de la CCI ;
- que, pour chacun des lots attribués, l'acte d'engagement ne comporte qu'un prestataire unique, la société Récréadim ; qu'ainsi, la requérante ne peut utilement invoquer une attribution des lots en cause à un groupement d'entreprises au sens de l'article 51 du code des marchés publics ;
- que la requérante ne critique pas l'illégalité de la décision du 24 avril 2011 par laquelle la CCI a déclaré les lots 1 et 2 infructueux ;
- que les dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil ne sont pas applicables ;
- que si les offres de Récréadim relatives aux lots 1 et 2 présentées le 10 mars 2011 comportaient un volet sous-traitance assuré par la société Guarana Communication, ces lots ont été déclarés infructueux le 24 avril 2011 et n'ont fait l'objet d'aucune attribution ; que, dans ces conditions, la société Guarana Communication ne peut se prévaloir d'aucun contrat de sous-traitance ;
- que sa responsabilité extra-contractuelle ne saurait pas plus être engagée dès lors que
les prestations réalisées entre le 28 mars 2011 et le 12 avril 2011 dont la société demande le paiement résultent uniquement du travail d'amélioration des offres rejetées initialement pour les lots 1 et 2, et pour lesquelles la CCI avaient demandé aux concurrents des améliorations ; qu'au demeurant la société Guarana Communication ne peut utilement demander l'indemnisation des frais de présentation de son offre imprudemment engagés ;
- que les documents de la consultation ne prévoyaient pas l'indemnisation des frais de présentation des offres ; que les sommes demandées ne sont justifiées ni dans leur principe, ni dans leur montant ; que l'appelante ne justifie d'aucun préjudice de réputation ;
Vu les pièces dont il résulte que, par application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que la société Guarana Communication n'étant que le sous-traitant potentiel de la société Récréadim et n'ayant pas présenté elle-même de candidature en vue de l'attribution de l'un des lots du marché contesté, Mme A..., sa gérante, ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité à contester devant le juge du contrat le refus de la collectivité d'attribuer les lots concernés à la société Récréadim ;
Vu le mémoire, enregistré le 26 juin 2013, présenté pour Mme A... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :
- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
1. Considérant que la chambre de commerce et d'industrie de Caen a, sur le fondement de l'article 28 du code des marchés publics, lancé une consultation en procédure adaptée pour des prestations de services relatives à une opération d'animation commerciale à l'occasion du 1110ème anniversaire de la Normandie ; que la société Récréadim a déposé une offre pour chacun des quatre lots composant le marché en déclarant agir en tant que prestataire unique ; que, s'agissant des lots n° 1 et n° 2, cette société a déclaré que la société Guarana Communication, dont Mme A... était la gérante, serait son sous-traitant ; que la chambre de commerce et d'industrie de Caen, ayant jugé les offres remises le 10 mars 2011 insatisfaisantes, a engagé une négociation avec les deux candidats ayant présenté une offre ; que malgré de nouvelles propositions, l'organisme consulaire a déclaré les offres pour les lots n° 1 et n° 2 infructueuses par une déclaration du 24 avril 2011 et décidé d'attribuer les lots n° 3 et n° 4 à la société Récréadim par deux actes d'engagement du 12 mai 2011 ; que Mme A..., en sa qualité de gérante de la société Guarana Communication, a sollicité, dès le 21 avril 2011, une indemnisation à hauteur de 4 215 euros des travaux qu'elle aurait réalisés lors de la phase de négociation rappelée ci-dessus ; que cette demande a été rejetée par la chambre de commerce et d'industrie de Caen par un courrier du 11 mai 2011 ; que Mme A... relève appel du jugement du 31 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à obtenir le paiement des prestations fournies par elle et la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de Caen à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son éviction du marché en litige ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir soulevées en défense :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Guarana Communication n'a pas présenté en son nom propre de candidature en vue de l'attribution des lots 1 et 2 du marché en litige ; que si la société Récréadim, seul candidat officiel, a procédé aux négociations en vue de l'obtention de ces lots en présence de la société Guarana Communication qu'elle a présentée comme son sous-traitant potentiel, cette circonstance n'est pas de nature à conférer à Mme A..., gérante de cette dernière société, un intérêt à demander à être indemnisée par la CCI de Caen à raison de son éviction irrégulière d'un marché qui, au demeurant, n'a pas été passé, l'établissement public ayant déclaré infructueuses les négociations relatives aux lots n° 1 et n° 2, qui n'ont pas été attribués ; qu'ainsi, ni la société Guarana Communication, ni Mme A... n'étaient, en tout état de cause, recevables à demander au tribunal administratif de Caen de condamner la CCI de Caen à leur verser les sommes réclamées, que ces dernières portent sur les frais exposés pour la poursuite des négociations, qui relèvent des aléas commerciaux qu'il appartient à tout négociateur d'engager avec prudence, ou sur les dommages et intérêts demandés au titre d'une " éviction irrégulière " ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CCI de Caen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée au même titre par la CCI de Caen ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la CCI de Caen tendant au bénéfice des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la Chambre de commerce et d'industrie de Caen.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2013 à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Specht, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 18 juillet 2013.
Le rapporteur,
F. LEMOINE
Le président,
I. PERROT
Le greffier,
C. GUÉZO
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 12NT02087