Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2011, présentée pour Mme D... A...épouse B..., demeurant ... et M. C... B..., élisant domicile... :
1°) d'annuler le jugement n° 1009498 du 23 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née le 30 octobre 2010 du silence gardée par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sur leur recours dirigé contre la décision du 3 août 2010 du consul général de France en République de Guinée refusant à M. B... la délivrance d'un visa de long séjour ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet née le 30 octobre 2010 ;
3°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de délivrer le visa de long séjour sollicité, dans un délai de 30 jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titres des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Ils soutiennent que :
- la décision implicite contestée n'est pas régulièrement motivée, alors que la demande de première instance devait être regardée comme constituant la demande de communication des motifs prévue à l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 ;
- les documents d'état civil présentés ne sont pas incohérents ; il en va ainsi des pièces établissant l'identité de M. B... que de l'acte de mariage ; la réalité des relations affectives est établie ;
- la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ce, eu égard à l'état de santé de Mme B... ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2012, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, qui conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir que :
- le moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée est sans fondement ;
- les documents d'état civil présentés ne sont pas probants ;
- l'intention matrimoniale fait défaut ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 juin 2013, présenté pour M. B... et Mme A... épouse B..., qui concluent aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;
Vu la décision du 13 janvier 2012 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes admettant Mme A...épouse B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2013 :
- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;
- et les observations de Me Bodin, avocat de M. B... et de Mme A... ;
1. Considérant que Mme A..., ressortissante de la République de Guinée résidant régulièrement en France, a demandé, au titre du regroupement familial, à ce que puisse la rejoindre en France M. B..., ressortissant guinéen avec lequel elle dit s'être mariée en Guinée le 28 mars 2009 ; qu'après que le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné son accord à cette demande de regroupement familial, le consul général de France à Conakry a, toutefois, refusé de délivrer un visa de long séjour à M. B..., au motif que la preuve du lien matrimonial entre les intéressés n'est pas rapportée ; que, par une décision implicite née le 30 octobre 2010, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours présenté le 30 août 2010 contre ce refus ; que Mme A... et M. B... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande dirigée contre cette décision implicite de rejet ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués " ; qu'il résulte de ces dispositions que, dès lors qu'ils n'ont pas saisi dans les délais de recours contentieux la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France d'une demande de communication des motifs de la décision implicite contestée, laquelle demande ne réside pas, contrairement à ce qu'ils soutiennent, dans la demande de première instance enregistrée le 9 décembre 2010 au greffe du tribunal administratif de Nantes, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de l'absence de motivation de cette décision ;
En ce qui concerne la légalité interne :
3. Considérant, en premier lieu, que, lorsque la venue d'une personne en France a été autorisée au titre du regroupement familial, l'autorité consulaire n'est en droit de rejeter la demande de visa dont elle est saisie à cette fin que pour un motif d'ordre public ; que figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère probant des actes de mariage ou de filiation produits ;
4. Considérant que, pour établir qu'ils sont unis par les liens du mariage, les requérants se prévalent d'un extrait d'acte de mariage selon lequel ils se sont mariés devant l'officier d'état civil en Guinée le 28 mars 2009 ; que, toutefois et d'une part, le document présenté, qui n'est pas une copie certifiée conforme d'un acte de mariage, comporte les signatures de l'époux, de l'épouse ainsi que de deux témoins, alors qu'il résulte des dispositions du quatrième alinéa de l'article 182 du code civil de la République de Guinée qu'un extrait d'acte de mariage ne peut comporter de telles signatures ; d'autre part, qu'il résulte également de l'article 211 du même code que, le jour du mariage, les futurs époux doivent remettre à l'officier de l'état civil un extrait de l'acte de naissance de chaque futur époux ou un jugement supplétif en tenant lieu ; qu'il n'est pas contesté que M. B... n'a présenté aucun acte de naissance à l'officier d'état civil à l'occasion du mariage dont ils soutiennent qu'il a été célébré le 28 mars 2009 ; que le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance de M. B... émanant du tribunal de première instance de Kaloum dont font état les requérants est en date du 8 septembre 2009 et, ainsi, se trouve de plusieurs mois postérieur au mariage allégué ; qu'il en résulte que M. B... n'était pas, au 28 mars 2009, en possession de l'extrait d'acte de naissance ou du jugement supplétif dont la présentation était nécessaire pour que fût régulièrement établi, en application de l'article 211 du code civil de la République de Guinée, l'acte du mariage qui aurait été célébré à cette date ; que, dans ces conditions, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit, n'a pas non plus commis d'erreur d'appréciation en estimant que, l'extrait d'acte de mariage présenté étant dépourvu de caractère probant, la réalité du lien matrimonial entre Mme A... et M. B... n'est pas établie et ce, en dépit des allégations des requérants, non autrement établies, faisant état de pratiques habituelles en République de Guinée ; qu'en l'absence de preuve de la réalité du mariage allégué, la circonstance que l'union entre les intéressés aurait fait au préalable l'objet d'une cérémonie non civile, dont la preuve n'est d'ailleurs pas davantage rapportée, et qu'ils existeraient entre eux des liens affectifs est sans influence ;
5. Considérant qu'eu égard au motif du rejet de la demande de visa présentée pour M. B..., tenant dans le défaut d'établissement de son lien matrimonial avec Mme A..., et alors que les requérants ne sauraient utilement se prévaloir de l'état de santé de cette dernière, qui bénéficie en France depuis 2003 d'une prise en charge appropriée à cet état et sur laquelle le refus de visa en litige est sans incidence, la décision contestée ne porte pas au droit de Mme A... ou de M. B... au respect de leurs vies privées et familiales une atteinte disproportionnée aux buts dans lesquels elle a été prise ; qu'il en résulte que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que, sous astreinte, soit ordonnée la délivrance du visa sollicité par M. B... ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que ces dispositions font, en tout état de cause, obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... et de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Mme D... A... épouse B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2013, à laquelle siégeaient :
- M. Iselin, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2013.
Le rapporteur,
A. DURUP de BALEINE Le président,
B. ISELIN
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11NT03002 2
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