La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/06/2013 | FRANCE | N°11NT03004

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 14 juin 2013, 11NT03004


Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2011, présentée pour la commune de Saint-Evroult-de-Montfort, représentée par son maire, par Me Geisz, avocat au barreau d'Alençon ; la commune de Saint-Evroult-de-Montfort demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000563 du 23 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de la Chambre d'agriculture de l'Orne, la délibération du 30 avril 2009 de son conseil municipal adoptant la carte communale ainsi que la décision du préfet de l'Orne approuvant ce document ;

2°) de rejeter l

a demande présentée par la Chambre d'agriculture de l'Orne devant le tribuna...

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2011, présentée pour la commune de Saint-Evroult-de-Montfort, représentée par son maire, par Me Geisz, avocat au barreau d'Alençon ; la commune de Saint-Evroult-de-Montfort demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000563 du 23 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de la Chambre d'agriculture de l'Orne, la délibération du 30 avril 2009 de son conseil municipal adoptant la carte communale ainsi que la décision du préfet de l'Orne approuvant ce document ;

2°) de rejeter la demande présentée par la Chambre d'agriculture de l'Orne devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge de la Chambre d'agriculture de l'Orne la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors qu'il ne vise pas le mémoire du préfet de l'Orne enregistré le 4 mai 2010 au greffe du tribunal administratif ;

- la Chambre d'agriculture de l'Orne n'avait pas intérêt à agir contre la délibération et la décision litigieuses ;

- le président de la Chambre d'agriculture de l'Orne n'avait pas qualité pour représenter

cet organisme devant le tribunal administratif ;

- M.A..., personne intéressée à la délibération litigieuse, a participé à la réunion du bureau de la chambre d'agriculture qui a autorisé son président à saisir le tribunal administratif ;

- la délibération contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L121-1 du code de l'urbanisme ; en effet, elle respecte une utilisation économe et équilibrée des espaces et ne renforce pas le mitage existant ; le souci des auteurs de la carte communale a été de n'autoriser les constructions que dans les espaces déjà construits ; les espaces non construits ouverts à la construction sont très limités ; le coefficient de l'ordre de 2 entre les possibilités de constructions ouvertes par la carte communale et les besoins réels nécessaires est pertinent, compte tenu de la progression effective des demandes de permis de construire et de la volonté de laisser un choix aux différents acquéreurs de parcelles ; les conséquences de l'application de ce coefficient doivent être relativisées : la surface nouvelle constructible n'est portée que de 73,2 à 80,1 ha , soit une augmentation de 9, 43 % de la surface constructible initiale pour une superficie communale de 2 236 hectares ; ces considérations ont été approuvées par le commissaire enquêteur qui a émis un avis favorable au projet ; la délibération contestée réduit les surfaces ouvertes à la construction par rapport au projet initial approuvé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 3 juillet 2012 à la Chambre d'agriculture de l'Orne, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu la mise en demeure adressée le 3 juillet 2012 au ministre de l'égalité des territoires et du logement, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 août 2012, présenté pour la Chambre d'agriculture de l'Orne, par Me Bocquillon, avocat au barreau d'Alençon, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Evroult-de-Montfort la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est régulier ; la commune requérante n'indique pas les conclusions et les moyens présentés par le préfet de l'Orne qui n'auraient pas été analysés ;

- son bureau avait compétence pour autoriser son président à ester en justice ;

- elle avait intérêt à agir, dès lors que la délibération contestée mettait en jeu des intérêts agricoles dans la commune ;

- la délibération du 30 avril 2009, adoptant la carte communale, et la décision du préfet de l'Orne, approuvant cette dernière, ont été prises à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles L. 124-2 et R. 124-6 du code de l'urbanisme ;

- la carte communale contestée méconnaît le principe d'utilisation économe et

équilibrée de l'espace posé par l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme ;

Vu l'ordonnance du 11 avril 2013 fixant la clôture de l'instruction au 2 mai 2013 à 12 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mai 2013 :

- le rapport de M. Sudron, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

- les observations de MeB..., substituant Me Geisz, avocat de la commune de Saint-Evroult-de-Montfort ;

- et les observations de Me Bocquillon, avocat de la Chambre d'agriculture de l'Orne ;

1. Considérant que par jugement du 23 septembre 2011 le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de la Chambre d'agriculture de l'Orne, la délibération du 30 avril 2009 du conseil municipal de Saint-Evroult-de-Montfort adoptant sa carte communale ainsi que la décision du préfet de l'Orne approuvant ce document ; que la commune de Saint-Evroult-de-Montfort relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la délibération du 30 avril 2009 et de la décision du préfet de l'Orne :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme : " Les cartes communales respectent les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " (...) les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer : / 1° L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable (...) / 3° Une utilisation économe et équilibrée des espaces naturels (...) et ruraux (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation du projet de carte communale soumis à enquête publique, que Saint-Evroult-de-Montfort, qui comptait 310 habitants en 2007, est une commune où l'activité agricole est prépondérante, occupant 64 % de la superficie de son territoire et que l'urbanisation à l'extérieur du bourg est caractérisée par la présence d'un grand nombre de hameaux de 1 à 10 habitations ; que, pour satisfaire à l'augmentation prévisible de la population, estimée à 120 habitants au cours des quinze prochaines années, les auteurs de la carte communale ont envisagé la construction de quatre vingt dix logements, soit le double des besoins estimés afin de faciliter le choix des futurs acquéreurs et d'éviter une pénurie de terrains à bâtir; que l'ouverture à l'urbanisation des nouveaux espaces représente une superficie de 6,8 hectares, soit 3,58 % du territoire communal, les zones constructibles passant de 73,2 à 80,1 hectares, pour une superficie moyenne de terrain à bâtir de 1 500 mètres carrés ; que ces orientations, ainsi qu'il résulte tant de l'analyse des documents graphiques que du rapport de présentation, ont été inspirées par le souci de regrouper les habitations autour des constructions existantes, soit dans des secteurs considérés comme principaux pour le développement de la commune, tels que ceux du Bourg, de Liseclaire ou de La Hanterie, soit dans les autres hameaux , sur des terrains laissés libres entre les parcelles déjà construites en vue d'un aménagement cohérent de l'espace ; que des zones constructibles de faible superficie ont enfin été définies autour des constructions isolées correspondant principalement à des habitations, afin d'y permettre l'implantation d'annexes ; que le parti d'urbanisme ainsi retenu doit être regardé comme compatible avec le principe de l'utilisation économe et équilibrée des espaces et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles posé par l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi, c' est à tort que le tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du conseil municipal et la décision du préfet contestées au motif qu'elles méconnaissaient les dispositions de cet article ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la Chambre d'agriculture de l'Orne devant le tribunal administratif de Caen ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme : " ...Les cartes communales sont approuvées, après enquête publique, par le conseil municipal et le préfet. Elles sont approuvées par délibération du conseil municipal puis transmises pour approbation au préfet, qui dispose d'un délai de deux mois pour les approuver. A l'expiration de ce délai, le préfet est réputé les avoir approuvées... " ; qu'aux termes de l'article R. 124-6 du même code : " Le projet de carte communale est soumis à enquête publique par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent dans les formes prévues par les articles R. 123-7 à R. 123-23 du code de l'environnement... " ; qu'enfin, aux termes de l'article R .124-7 de ce code : " La carte communale est ... transmise, pour approbation, au préfet. Celui-ci se prononce dans un délai de deux mois. A l'expiration de ce délai, le préfet est réputé avoir approuvé la carte communale " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Saint-Evroult-de-Montfort, par la délibération contestée, a modifié certaines dispositions de la carte communale initialement adoptée, en réduisant le nombre des parcelles ouvertes à la construction dans les secteurs de Laparadelle, de La Remondière ainsi que dans le Bourg et en retirant de la zone constructible, dans le secteur de La Poussinière, une partie des parcelles nos 161 et 180, afin de tenir compte des observations du préfet de l'Orne qui, par arrêté du 1° août 2008, avait refusé de l'approuver ; qu'eu égard au faible nombre des secteurs concernés par ces modifications et à leur importance limitée, ces dernières n'ont pas eu pour effet de remettre en cause l'économie générale du projet initial ; que, dès lors, le conseil municipal a pu approuver le projet ainsi modifié sans le soumettre à une nouvelle enquête publique ; que les dispositions précitées des articles L. 124- 2 et R. 124-6 du code de l'urbanisme n'ont ainsi pas été méconnues ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué et sur les fins de non recevoir opposées à la demande de première instance, que la commune de Saint-Evroult-de-Montfort est fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du 30 avril 2009 de son conseil municipal et la décision du préfet de l'Orne approuvant la carte communale ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Evroult-de-Montfort, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la Chambre d'agriculture de l'Orne de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la Chambre d'agriculture de l'Orne une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature que la commune de Saint-Evroult-de-Montfort a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 23 septembre 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la Chambre d'agriculture de l'Orne devant le tribunal administratif de Caen est rejetée.

Article 3 : La Chambre d'agriculture de l'Orne versera à la commune de Saint-Evroult-de-Montfort une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions d'appel de la Chambre d'agriculture de l'Orne tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Evroult-de-Montfort, à la Chambre d'agriculture de l'Orne et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2013 , à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Sudron président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 juin 2013

Le rapporteur,

A. SUDRONLe président,

A. PÉREZ

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'égalité des territoires et du logement en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

6

2

N° 11NT03004


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT03004
Date de la décision : 14/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain SUDRON
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : GEISZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-06-14;11nt03004 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award