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07/06/2013 | FRANCE | N°12NT02365

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 07 juin 2013, 12NT02365


Vu la requête, enregistrée le 17 août 2012, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Chaumette, avocat au barreau de Nantes ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100094 du 26 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 mars 2010 du consul de France à Tunis lui refusant la délivrance d'un visa de retour

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2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision et la décisio...

Vu la requête, enregistrée le 17 août 2012, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Chaumette, avocat au barreau de Nantes ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100094 du 26 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 mars 2010 du consul de France à Tunis lui refusant la délivrance d'un visa de retour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision et la décision de l'autorité consulaire ;

3°) d'enjoindre au ministre, à titre principal, de lui délivrer le visa sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, moyennant la renonciation de celui-ci à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'est pas motivée ;

- le tribunal administratif de Nantes a mal apprécié la portée de sa demande ; lors de sa demande de visa de retour, il pensait que son titre de séjour était toujours valable ; s'il n'a pas fait état de son mariage avec une ressortissante française, c'est en raison de l'absence d'information des autorités françaises ;

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le mariage n'est pas dissous ; il n'a pas de ressource en Tunisie ; il s'est conformé à la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant 5 ans ;

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2012, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le requérant n'a pas demandé la communication des motifs de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut donc qu'être rejetée ;

- le requérant n'entre dans aucun cas d'attribution d'un visa pour un long séjour en France au titre du retour en France ; il n'était pas titulaire d'un titre de séjour valable à la date de la décision en litige ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; son mariage avec une ressortissante française est blanc ; aucun élément au dossier ne témoigne d'une communauté de vie entre les deux époux ;

Vu la lettre en date du 28 mars 2013, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 avril 2013, présenté pour M. A... qui conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que la requête ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes, en date du 19 juin 2012, admettant M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié, portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mai 2013 :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A... interjette appel du jugement du 26 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 mars 2010 du consul de France à Tunis lui refusant la délivrance d'un visa de retour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision consulaire :

2. Considérant que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, prise en vertu des dispositions des articles D. 211-5 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est substituée au refus initial opposé par les autorités consulaires ; qu'il suit de là, que les conclusions tendant à l'annulation de la décision du consul général de France à Tunis refusant à M. A... un visa d'entrée sur le territoire français sont irrecevables, et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :

3. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu du 2° de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, le rejet de la demande de visa présentée par le conjoint d'un ressortissant français doit être motivé ; qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... ait demandé que lui soient communiqués les motifs de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite contestée ne saurait être retenu ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que M. A... a sollicité la délivrance d'un visa de retour auprès du consul général de France à Tunis, puis devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, en se fondant sur la carte de résident d'une durée de 10 ans qui lui avait été délivrée le 11 juillet 2003 ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que M. A... a été reconnu coupable par le tribunal de grande instance de Paris le 5 mai 2004 d'obtention frauduleuse du titre de séjour de 10 ans, cette juridiction ayant prononcé à son encontre une interdiction de territoire français d'une durée de cinq ans, entrainant sa reconduite à la frontière le 14 mai 2004 ; que la cour d'appel de Paris a rejeté l'appel interjeté par M. A... contre le jugement du tribunal de grande instance de Paris par arrêt du 12 avril 2005 ; que l'intéressé ne disposait pas, en conséquence, d'un titre de séjour en cours de validité à la date de la décision contestée et ne pouvait prétendre à la délivrance d'un tel visa ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il appartient à l'autorité administrative compétente et, le cas échéant, au juge de l'excès de pouvoir saisi d'un recours contre la décision prise, de se prononcer en considération du seul motif qui était invoqué par le demandeur pour solliciter la délivrance du visa ; que M. A... fait valoir que s'il n'a pas fondé sa demande de visa d'entrée et de long séjour sur sa qualité de conjoint de français, c'est en raison de la mauvaise information qui lui aurait été donnée par les autorités consulaires de France à Tunis ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que M. A... a rempli le 1er février 2010 le questionnaire relatif aux demandes de visa de retour, en se trompant certes sur l'identité des membres de sa famille en France, mais en mentionnant la référence exacte de son ancienne carte de résident ; que, dans le cadre des recours gracieux et hiérarchique qu'il a adressés respectivement le 5 avril 2010 au consul et le 10 mai 2010 au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, il n'a jamais mentionné son mariage avec une ressortissante française le 24 mars 2003 ; que, si étaient jointes à son recours du 2 octobre 2010 devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France une copie de son acte de mariage ainsi qu'une copie de l'acte de naissance de son épouse, M. A... a demandé la révision de la décision consulaire " pour pouvoir jouir de ses droits " et reprendre son " travail toujours à sa disposition grâce à une carrière exemplaire " ; que, dans ces conditions, ni la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, ni le tribunal administratif de Nantes n'ont inexactement apprécié la portée de sa demande de visa ;

6. Considérant, enfin, que la seule circonstance que M. A... ait exécuté la peine d'interdiction du territoire français prise à son encontre ou encore qu'il soit toujours marié à une ressortissante française ne lui confère pas un droit à la délivrance d'un visa ; que si le requérant fait valoir, que, n'étant pas divorcé, il souhaite reprendre la vie commune avec son épouse de nationalité française, il ressort des pièces du dossier qu'au vu des déclarations de son épouse, la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 12 avril 2005, a considéré que le mariage contracté par M. A... était un mariage frauduleux ; que, dans le courrier du 30 décembre 2009 adressé au président de la république française en vue de sa réhabilitation, il a indiqué avoir rompu toute vie commune avec elle et avoir " délaissé ses devoirs de mari " ; qu'il ne justifie d'aucune persistance du lien matrimonial depuis son départ de France ; que M. A..., qui a résidé en Tunisie de 1984 à 2001, et y réside de nouveau depuis 2004, n'établit pas ne plus avoir de liens familiaux en Tunisie ; que, dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, et en dépit de sa situation financière en Tunisie, et de la promesse d'embauche en qualité d'employé polyvalent de la restauration, signée le 2 octobre 2009, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au ministre à titre principal de lui délivrer le visa sollicité et à titre subsidiaire de réexaminer sa situation aux fins de le lui délivrer dans un délai de 15 jours ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2013, où siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2013.

Le rapporteur,

M-P. ALLIO-ROUSSEAULe président,

B. ISELIN

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT02365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02365
Date de la décision : 07/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 Étrangers. Entrée en France. Visas.


Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : CHAUMETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-06-07;12nt02365 ?
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