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28/12/2012 | FRANCE | N°11NT01989

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 décembre 2012, 11NT01989


Vu le recours enregistré le 20 juillet 2011, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2795 du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme Khadjou A épouse B, sa décision du 18 décembre 2009 ajournant à deux ans la demande de naturalisation de cette dernière ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B devant le tribunal administratif de Nantes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° ...

Vu le recours enregistré le 20 juillet 2011, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2795 du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme Khadjou A épouse B, sa décision du 18 décembre 2009 ajournant à deux ans la demande de naturalisation de cette dernière ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B devant le tribunal administratif de Nantes ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2012 :

- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur,

- et les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

1. Considérant que par jugement du 1er juin 2011, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme B la décision du 18 décembre 2009 par laquelle le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ; que le ministre de l'intérieur interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la décision litigieuse :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : "(...) L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger." ; qu'aux termes de l'article 49 du décret susvisé du 30 décembre 1993 : "Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...)" ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'assimilation linguistique du postulant ;

3. Considérant que pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de Mme B, le ministre s'est fondé sur la circonstance que l'intéressée n'avait pas mis à profit la période d'ajournement de sa précédente demande de naturalisation pour améliorer de manière significative sa connaissance de la langue française ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier du procès-verbal d'assimilation établi le 25 mai 2009 par un agent de la préfecture de Meurthe-et-Moselle, qu'en dépit de sa participation à des cours de sensibilisation à la langue française, entre 2005 et 2010, au sein de l'association femmes-relais de Toul, et bien qu'elle puisse être regardée comme capable d'accomplir seule les démarches de la vie courante et comprendre le français, Mme B communique toutefois avec difficulté en langue française, et ne sait de surcroît ni la lire ni l'écrire ; que les attestations établies à la demande de l'intéressée, au demeurant non datées ou postérieures à la date de la décision litigieuse, ne sont pas de nature à infirmer les constatations du procès-verbal susmentionné ; qu'elle n'établit pas, par les pièces qu'elle verse au dossier, avoir suivi une formation linguistique de 200 heures, au sein de l'association pour l'enseignement et la formation des travailleurs immigrés et de leurs familles ; que la circonstance qu'elle aurait accompli des progrès notables lors des ateliers d'initiation au code de la route est sans influence sur la légalité de la décision litigieuse ; que, dans ces conditions, le ministre, qui dispose d'un large pouvoir d'appréciation de l'opportunité d'accorder la naturalisation sollicitée, a pu, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, ajourner à deux ans la demande de naturalisation présentée par la postulante pour le motif susmentionné ; qu'eu égard au motif ainsi retenu, Mme B ne peut utilement invoquer les circonstances que son époux réside en France depuis de nombreuses années et y travaille, que ce dernier et ses quatre enfants ont obtenu la nationalité française et qu'elle serait bien intégrée dans la société française ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a annulé pour ce motif la décision litigieuse ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme B devant le tribunal administratif de Nantes ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par décret du 15 juillet 2009, régulièrement publié au Journal officiel de la République Française du 16 juillet 2009, M. Michel Aubouin a été nommé directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté au ministère chargé des naturalisations et que par décision du 21 juillet 2009, régulièrement publiée au Journal officiel de la République Française du 25 juillet 2009, M. Eric Magnes, chef du premier bureau des naturalisations, a reçu délégation de ce dernier à l'effet de signer, au nom du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, dans la limite des attributions qui lui sont confiées, au nombre desquelles figurent les décisions d'ajournement des demandes de naturalisation ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait ;

7. Considérant, en second lieu, qu'en précisant avoir, en application de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993, décidé d'ajourner à nouveau à deux ans la demande de Mme B, au motif que l'intéressée n'avait pas mis à profit la période d'ajournement de sa précédente demande de naturalisation pour améliorer de manière significative sa connaissance de la langue française, le ministre, qui a procédé à un examen particulier de la demande de naturalisation de la postulante, a suffisamment énoncé les circonstances de droit et de fait sur lesquelles il s'est fondé pour prendre sa décision ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée manque en fait ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme B, sa décision du 18 décembre 2009 ajournant à deux ans la demande de naturalisation de cette dernière ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à l'avocat de Mme B de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 1er juin 2011 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative qu'elle présente en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme Khadjou A épouse B.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01989
Date de la décision : 28/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain PEREZ
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : LEVI-CYFERMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-12-28;11nt01989 ?
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