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21/12/2012 | FRANCE | N°11NT01894

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 décembre 2012, 11NT01894


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2011, présentée pour Mme Isabelle A, demeurant ..., par Me Chouquer, avocat au barreau du Mans ; Mme A demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 09-0186, 09-188 du 27 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de Mortagne-au-Perche à lui verser une indemnité correspondant aux deux tiers du traitement de fonctionnaire qu'elle aurait dû percevoir à compter du 19 janvier 2005, déduction faite des sommes perçues au titre du revenu minimum d'insertion, l'a renvoyée devant la commune pour liquid

ation de cette indemnité et a rejeté le surplus de sa demande tendant...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2011, présentée pour Mme Isabelle A, demeurant ..., par Me Chouquer, avocat au barreau du Mans ; Mme A demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 09-0186, 09-188 du 27 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de Mortagne-au-Perche à lui verser une indemnité correspondant aux deux tiers du traitement de fonctionnaire qu'elle aurait dû percevoir à compter du 19 janvier 2005, déduction faite des sommes perçues au titre du revenu minimum d'insertion, l'a renvoyée devant la commune pour liquidation de cette indemnité et a rejeté le surplus de sa demande tendant à ce que la commune de Mortagne-au-Perche soit condamnée à lui verser la somme de 112 583,34 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction illégale du service ;

2) de condamner la dite commune à lui verser la somme de 227 392,70 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;

Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des comités médicaux,

aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2012 ;

- le rapport de M. Villain, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un arrêté du 30 juillet 1996, le maire de Mortagne-au-Perche a procédé à la réintégration de Mme A, maître-nageur sauveteur appartenant au cadre d'emplois des éducateurs territoriaux des activités physiques et sportives, après l'avis favorable rendu le 24 juillet 1996 par le comité médical départemental sur l'aptitude de l'intéressée à l'issue de sa dernière période de congé de maladie ; que toutefois, l'intéressée n'ayant pas repris ses fonctions, par un arrêté du 5 septembre 1996, le maire a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste ; que, par un arrêt du 26 décembre 2002, la cour administrative d'appel de Nantes a accueilli les conclusions de Mme A dirigées contre la décision prononçant sa réintégration, mais a rejeté celles tendant à l'annulation de l'arrêté de radiation des cadres pour abandon de poste ; que par une décision du 14 juin 2004, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté du 5 septembre 1996 par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté du 30 juillet 1996 prononcée par la Cour ; que la commune a alors de nouveau saisi le comité médical départemental qui, dans sa séance du 19 janvier 2005, a déclaré Mme A inapte à la fonction de maitre nageur sauveteur mais apte à occuper un autre emploi ; que par jugement du 27 mai 2011, le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de Mortagne-au-Perche à verser à Mme A une indemnité correspondant aux deux tiers du traitement qu'elle aurait dû percevoir à compter du 19 janvier 2005, déduction faite des sommes perçues au titre du revenu minimum d'insertion ; que Mme A relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de la perte des traitements qu'elle aurait du selon elle percevoir à compter du 5 septembre 1996 ;

Sur la régularité du jugement ;

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme A, les premiers juges, en fixant de manière suffisamment précise les bases de calcul de son indemnisation et en la renvoyant devant la commune de Mortagne-au-Perche pour liquidation de cette indemnité n'ont pas méconnu leur office ;

Sur la responsabilité de la commune de Mortagne-au-Perche :

3. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, Mme A a été radiée des cadres par une décision illégale ; qu'elle a ainsi droit à la réparation du préjudice que lui a causé la faute commise par la commune de Mortagne-au-Perche ; que l'indemnité à laquelle peut prétendre la requérante à raison d'une perte de revenus doit, toutefois, être évaluée en fonction du préjudice effectivement subi par elle compte tenu d'une part de la faute de la commune, mais aussi d'autre part du comportement de l'intéressée ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que si Mme A a été placée en congé de maladie jusqu'à fin juillet 1996, le 24 juillet 1996 le comité médical départemental, saisi à la demande de la commune, l'a déclarée apte à reprendre ses fonctions le jour même et le 30 juillet suivant le maire a pris un arrêté, notifié dès le lendemain, prononçant sa réintégration ; que toutefois Mme A a personnellement estimé que son état de santé ne lui permettait toujours pas de reprendre ses fonctions et, en dépit des deux mises en demeure successives que le maire lui a adressées le 2 puis le 22 août 1996, elle n'a pas rejoint son poste, refusant ainsi de déférer à l'obligation de rejoindre son emploi, qui s'imposait à elle en l'absence de décision manifestement illégale et de nature à compromettre un intérêt public, sans apporter aucun élément nouveau relatif à son état de santé tel qu'il avait été apprécié par le comité médical et qui l'aurait mise dans l'impossibilité de se présenter sur son lieu de travail ; que, dans ces conditions, elle n'établit pas, et n'allègue d'ailleurs même pas, qu'elle aurait été apte en septembre 1996 à être réintégrée dans ses anciennes fonctions ou dans un autre emploi ; que, par ailleurs, il résulte de l'article 57 2° de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et de l'article 17 deuxième alinéa du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 qu'elle avait épuisé ses droits à congé de maladie rémunérés ; que, par suite, elle ne peut être regardée comme justifiant d'un préjudice indemnisable tenant à la perte de ses traitements pour la période du 1er septembre 1996 au 19 janvier 2005 ;

5. Considérant en revanche, en second lieu, qu'après l'avis susmentionné du comité médical départemental du 19 janvier 2005, il est constant que la commune de Mortagne-au-Perche ne justifie pas avoir procédé à la recherche d'une possibilité de reclasser Mme A dans un autre emploi que celui qu'elle occupait avant ses congés de maladie et n'a pris aucune décision pour régulariser la situation de la requérante ; que cette carence fautive de la commune est de nature à engager sa responsabilité, laquelle doit toutefois être atténuée à hauteur d'un tiers en raison de la propre inertie de l'intéressée, qui s'est abstenue de toute démarche à la suite de l'avis du comité médical départemental du 19 janvier 2005, avant la présentation de sa demande préalable d'indemnité du 28 septembre 2008 ;

Sur le préjudice :

6. Considérant qu'en l'absence de service fait, Mme A ne peut prétendre au paiement de l'intégralité des revenus qu'elle aurait perçus si elle n'avait pas été irrégulièrement privée d'une chance de réintégrer les services de la commune de Mortagne-au-Perche dans un emploi de reclassement, mais seulement de la différence entre les traitements qu'elle aurait pu percevoir et les sommes qu'elle a effectivement perçues au titre du revenu minimum d'insertion (RMI) dont elle indique avoir été bénéficiaire ; que les sommes reçues à ce dernier titre doivent donc être déduites du montant de l'indemnisation qui lui est due ; que l'état du dossier ne permettant pas d'évaluer l'indemnité ainsi due à Mme A, c'est à bon droit que le tribunal a renvoyé celle-ci devant la commune pour liquider cette indemnité dans les conditions définies par le jugement attaqué ;

Sur l'appel en garantie de l'Etat par la commune de Mortagne-au-Perche :

7. Considérant qu'aucune indemnité n'étant accordée par le présent arrêt au titre de l'illégalité de la situation administrative de Mme A pour la période du 5 septembre 1996 au 19 janvier 2005, les conclusions de la commune de Mortagne-au-Perche tendant à ce que l'Etat, en raison de l'irrégularité de l'avis donné le 24 juillet 1996 par le comité médical départemental dont le secrétariat était assuré par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS), la garantisse des condamnations prononcées à son encontre au titre de cette période sont dénuées d'objet et, par suite, ne peuvent qu'être rejetées ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a limité l'indemnisation qui lui était accordée aux deux tiers du traitement de fonctionnaire qu'elle aurait pu percevoir à compter du 19 janvier 2005, déduction faite des sommes perçues au titre du revenu minimum d'insertion, et l'a renvoyée devant la ville de Mortagne-au-Perche pour la liquidation de l'indemnité ainsi définie, et d'autre part que les conclusions d'appel incident de la commune de Mortagne-au-Perche doivent être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge des frais qu'elle ont du exposer à l'occasion de la présente instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A et les conclusions d'appel incident de la commune de Mortagne-au-Perche sont rejetées.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme Isabelle A, à la commune de Mortagne-au-Perche et au ministre de la santé.

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N° 11NT01894


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01894
Date de la décision : 21/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Jean-Francis VILLAIN
Rapporteur public ?: M. MARTIN
Avocat(s) : CHOUQUER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-12-21;11nt01894 ?
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