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07/12/2012 | FRANCE | N°10NT02460

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 07 décembre 2012, 10NT02460


Vu la requête enregistrée le 27 novembre 2010, présentée pour M. Tarcisuis Yves Bienvenu A, demeurant ..., par Me Mesans-Conti, avocat au barreau de Montpellier ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1004136 du 14 septembre 2010 par laquelle le président de la 5ème Chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er avril 2010 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours visant au réexamen de la décision par laquelle le Consul de Fr

ance à Cotonou a refusé de lui délivrer un visa d'entrée en France ;
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Vu la requête enregistrée le 27 novembre 2010, présentée pour M. Tarcisuis Yves Bienvenu A, demeurant ..., par Me Mesans-Conti, avocat au barreau de Montpellier ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1004136 du 14 septembre 2010 par laquelle le président de la 5ème Chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er avril 2010 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours visant au réexamen de la décision par laquelle le Consul de France à Cotonou a refusé de lui délivrer un visa d'entrée en France ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères et au ministre de l'immigration de lui délivrer un visa d'entrée en France sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2012 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A, de nationalité Centreafricaine, relève appel de l'ordonnance du 14 septembre 2010 par laquelle le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er avril 2010 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours visant au réexamen de la décision par laquelle le Consul de France à Cotonou a refusé de lui délivrer un visa d'entrée en France ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-3 du code de justice administrative : " Les requêtes doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées de copies, en nombre égal à celui des autres parties en cause, augmenté de deux " ; qu'aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) La demande de régularisation mentionne qu'à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 222-1 de ce code : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) " ;

3. Considérant que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande présentée par M. A au motif que les copies de la requête, prévues par l'article R. 411-3 du code de justice administrative, n'avaient pas été produites dans le délai de 15 jours imparti par la demande de régularisation du 28 juin 2010 dont l'avocat de l'intéressé a accusé réception le lendemain ; que, toutefois, le conseil de M. A soutient avoir transmis au tribunal administratif de Nantes, suivant courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 1er juillet 2010, mentionnant la référence du dossier telle qu'elle était indiquée dans la demande de régularisation, 4 originaux de la requête accompagnés de 3 jeux de pièces ; qu'à l'appui de ses dires, il verse une pièce attestant de l'apposition du tampon encreur du tribunal portant accusé réception des pièces produites à la date du 5 juillet 2010 ; que, dès lors, quand bien même les exemplaires initialement produits auraient été classés par erreur par le greffe du tribunal dans un autre dossier, la requête de M. A doit être regardée comme ayant été régularisée dans le délai imparti ; que, par suite, M. A est fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande comme manifestement irrecevable, à défaut de régularisation, l'ordonnance du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Nantes a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ; qu'il suit de là que ladite ordonnance doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Nantes ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant, en premier lieu, que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France se substitue à la décision du consul ; que, par suite, les moyens tirés de ce que cette dernière décision aurait été signée par une autorité incompétente et de ce qu'elle viserait, bien qu'elle n'ait pas à être motivée, des textes inadéquats, sont inopérants ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que M. Alain Peloux, président suppléant de la commission de recours et signataire de la décision du 1er avril 2010, portant mention de son nom, prénom, et qualité, a été nommé dans ses fonctions par le ministre des affaires étrangères, et non par le premier ministre, en méconnaissance de l'article D. 211-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des pièces du dossier que M. Peloux, vice président de la commission de recours, a été nommé par décret en date du 30 avril 2007 et qu'il avait, dès lors, qualité pour siéger au sein de la commission et était compétent pour signer la décision contestée ; que, par suite, les moyens tirés de ce que la commission n'aurait pas délibéré régulièrement, conformément aux dispositions du 1 de l'arrêté du 4 décembre 2009, et de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, doivent être écartés ;

7. Considérant que la demande de visa court séjour présentée par M. A, alors âgé de 23 ans, avait pour objet de lui permettre de rendre visite à son beau-père, ressortissant français ; que si la mère de l'intéressé, Mme B, épouse C, a acquis la nationalité française par déclaration le 21 avril 2008, il n'est ni établi, ni même allégué que M. A puisse être regardé comme enfant majeur à charge d'un ascendant français ; qu'ainsi, l'intéressé n'entrait dans aucune des catégories d'étrangers énumérées par l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour lesquelles les refus de visa doivent être motivés ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait dû être motivée en fait et en droit et qu'elle serait stéréotypée doit être écarté ;

8. Considérant que la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. A est fondée sur le risque de détournement à des fins migratoires de l'objet du visa sollicité ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, âgé de 23 ans au moment de la décision de refus de visa, était célibataire sans enfant et ne justifiait ni d'une activité professionnelle, ni de ressources personnelles au Bénin, où il était étudiant ; que, dans ces circonstances, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le risque de détournement de l'objet du visa, alors même que M. A invoque les perspectives d'emploi " stable et confortable " que sa formation de technicien en informatique et téléphonie mobile, et l'expansion de ce secteur au Bénin, lui permettraient d'envisager ;

9. Considérant que M. A n'établit pas que les membres de sa famille résidant en France, et notamment sa mère, seraient dans l'impossibilité de lui rendre visite au Bénin ; que, dans les circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 1er avril 2010 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du consul général de France à Cotonou refusant de lui délivrer le visa qu'il avait sollicité ;

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, qu'il présente, ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions du ministre tendant à l'application des dispositions des articles L. 741-2 et L. 741-3 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " Sont (...) applicables les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-après reproduites : " Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte-rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages et intérêts. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 741-3 du même code : " Si des dommages-intérêts sont réclamés à raison des discours et des écrits d'une partie ou de son défenseur, la juridiction réserve l'action, pour qu'il y soit statué ultérieurement par le tribunal compétent, conformément au cinquième alinéa de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-dessus reproduit. Il en est de même si, outre les injonctions que la juridiction peut adresser aux avocats et aux officiers ministériels en cause, elle estime qu'il peut y avoir lieu à une autre peine disciplinaire. " ;

13. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les passages incriminés par le ministre ne peuvent être regardés comme injurieux, outrageants ou diffamatoires au sens des dispositions précitées ; que, par suite, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration n'est fondé ni à en demander la suppression ni à solliciter le bénéfice des dispositions des articles L. 741-2 et L. 741-3 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. A de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1004136 du 14 septembre 2010 du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Nantes est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Nantes et le surplus de ses conclusions devant la cour sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales, et de l'immigration tendant à l'application des dispositions des articles L. 741-2 et L. 741-3 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Tarcisuis Yves Bienvenu A et au ministre de l'intérieur.

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N° 10NT02460


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10NT02460
Date de la décision : 07/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : MESANS-CONTI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-12-07;10nt02460 ?
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