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16/11/2012 | FRANCE | N°11NT01999

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 16 novembre 2012, 11NT01999


Vu le recours, enregistré le 21 juillet 2011, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2499 du 22 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes annulé, à la demande de Mme Liana A, sa décision du 27 juillet 2009 déclarant irrecevable la demande de naturalisation de l'intéressée ainsi que sa décision implicite de rejet du recours gracieux présenté par cette dernière ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Nantes ;

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Vu le recours, enregistré le 21 juillet 2011, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-2499 du 22 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes annulé, à la demande de Mme Liana A, sa décision du 27 juillet 2009 déclarant irrecevable la demande de naturalisation de l'intéressée ainsi que sa décision implicite de rejet du recours gracieux présenté par cette dernière ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Nantes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2012 :

- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur,

- et les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

1. Considérant que par jugement du 22 juin 2011, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme A, la décision du 27 juillet 2009 par laquelle le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a déclaré irrecevable sa demande de naturalisation ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; que le Ministre de l'intérieur interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité des décisions litigieuses :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du Code civil : "Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation" ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts matériels et familiaux ; que, pour apprécier si cette dernière condition est remplie, l'administration peut notamment se fonder, sous le contrôle du juge, sur la situation familiale du demandeur et sur le caractère suffisant et durable des ressources qui lui permettent de demeurer en France ;

3. Considérant que pour déclarer irrecevable la demande de naturalisation de Mme A, le ministre s'est fondé sur la circonstance que ses deux enfants mineurs résidaient à l'étranger; que le ministre a ajouté dans son mémoire en défense devant le tribunal administratif que la requérante ne disposait pas de ressources lui permettant de subvenir à ses besoins ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date des décisions litigieuses, les deux enfants mineurs de Mme A, nés respectivement en 1997 et en 1998, demeuraient à l'étranger ; que l'intéressée affirme, sans être contredite, qu'elle n'a eu aucun contact avec eux depuis son entrée en France en 2002, ignore leur localisation et s'est de fait trouvée dans l'impossibilité d'engager une procédure dite "de famille rejoignante d'un réfugié statutaire" ; que toutefois, il ressort également des pièces du dossier, qu'à la date des décisions litigieuses, Mme A ne percevait, outre une prestation compensatoire mensuelle de 344 euros allouée pour l'entretien de son père, que des prestations sociales et que son activité professionnelle ne lui procurait pas de revenus suffisants pour subvenir à ses besoins ; que, dans ces conditions, l'intimée, qui ne peut utilement se prévaloir de la conclusion postérieure de contrats de travail à durée déterminée et indéterminée, ne peut être regardée comme ayant fixé en France le centre de ses intérêts matériels ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler les décisions litigieuses, le tribunal administratif de Nantes a estimé que le ministre avait fait une appréciation erronée de la condition posée à l'article 21-16 précité du code civil ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par

l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A tant devant le tribunal administratif de Nantes que devant la cour ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement : "A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre (...) et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : 1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale (...)" ; que l'article 3 du même décret prévoit que "Les personnes mentionnées aux 1° et 3° de l'article 1er peuvent donner délégation pour signer tous actes relatifs aux affaires pour lesquelles elles ont elles-mêmes reçu délégation : 1° Aux magistrats, aux fonctionnaires de catégorie A et aux agents contractuels chargés de fonctions d'un niveau équivalent, qui n'en disposent pas au titre de l'article 1er (...)" ; que par décret du 15 juillet 2009, publié au Journal Officiel de la République Française du 16 juillet suivant, M. Aubouin a été nommé directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté à l'administration centrale du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ; que par une décision du 21 juillet 2009 publiée au Journal Officiel de la République Française du 25 juillet suivant, M. Aubouin a régulièrement donné délégation à Mme Hakima Aubin, attachée d'administration des affaires sociales, pour signer tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, dans la limite des attributions qui lui sont confiées ; que, par suite, le moyen tiré de ce que Mme Aubin n'aurait pas été compétente pour signer la décision du 27 juillet 2009 contestée manque en fait ;

7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 27 du code civil : "Toute décision déclarant irrecevable (...) une demande de naturalisation (...) doit être motivée selon les modalités prévues à l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public" ; qu'aux termes de l'article 3 de la loi susmentionnée du 11 juillet 1979 : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ; qu'en précisant avoir, sur le fondement de l'article 21-16 du code civil, constaté l'irrecevabilité de la demande de Mme A, au motif que ses deux enfants mineurs résidaient à l'étranger, le ministre a suffisamment énoncé les circonstances de droit et de fait sur lesquelles il s'est fondé pour prendre sa décision ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ladite décision manque en fait ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme A, sa décision du 27 juillet 2009, constatant l'irrecevabilité de la demande de naturalisation de l'intéressée ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par celle-ci ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que l'avocat de Mme A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 22 juin 2011 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative qu'elle présente en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme Liana A .

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N° 11NT019992

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01999
Date de la décision : 16/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain PEREZ
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : REVOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-11-16;11nt01999 ?
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