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26/10/2012 | FRANCE | N°11NT00467

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 26 octobre 2012, 11NT00467


Vu la requête, enregistrée le 14 février 2011, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ..., par Me de Mezerac, avocat au barreau de Caen ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-2442 du 14 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 juillet 2005 par laquelle le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un récépissé relatif à un gabion dont il est propriétaire sur le territoire de la commune de Gefosse-Fontenay ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la déci

sion du 19 juillet 2005 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados, à titre principa...

Vu la requête, enregistrée le 14 février 2011, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ..., par Me de Mezerac, avocat au barreau de Caen ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-2442 du 14 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 juillet 2005 par laquelle le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un récépissé relatif à un gabion dont il est propriétaire sur le territoire de la commune de Gefosse-Fontenay ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 19 juillet 2005 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados, à titre principal, de lui délivrer un récépissé ou à titre subsidiaire, de statuer à nouveau sur sa déclaration de gabion, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés

fondamentales, et notamment l'article 1er de son premier protocole additionnel ;

Vu la Constitution, et notamment son Préambule ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2012 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. X relève appel du jugement du 14 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 juillet 2005 par laquelle le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un récépissé relatif à un gabion dont il est propriétaire sur le territoire de la commune de Gefosse-Fontenay, afin d'y exercer la chasse de nuit ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que dans ses écritures de première instance, M. X soulevait deux moyens tirés de la méconnaissance de son droit de propriété en raison du délai fixé par l'article R. 424-17 du code de l'environnement pour déclarer les postes de chasse fixes existants avant le 1er janvier 2000, d'une part, au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, d'autre part, des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; qu'il présentait, toutefois, la même argumentation à l'appui de ces deux moyens ; qu'après avoir écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif que l'article R. 424-17 du code de l'environnement ne portait pas une atteinte illégale au droit de propriété des propriétaires de gabions, le tribunal a ainsi suffisamment motivé son jugement en énonçant que cet article " ne saurait davantage être regardé comme portant atteinte au droit de propriété tel que garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen " ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit, par suite, être écarté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 424-4 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Dans le temps où la chasse est ouverte, le permis donne à celui qui l'a obtenu le droit de chasser de jour, soit à tir, soit à courre, à cor et à cri, soit au vol, suivant les distinctions établies par des arrêtés du ministre chargé de la chasse (...). / Il donne également le droit de chasser le gibier d'eau à la passée, à partir de deux heures avant le lever du soleil et jusqu'à deux heures après son coucher, dans les lieux mentionnés à l'article L. 424-6 (...) " ; que l'article L. 424-5 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce, énonce que : " Dans le temps où la chasse est ouverte, le permis de chasser donne en outre à celui qui l'a obtenu le droit de chasser le gibier d'eau la nuit à partir de postes fixes tels que hutteaux, huttes, tonnes et gabions existants au 1er janvier 2000 dans les départements où cette pratique est traditionnelle. Ces départements sont : (...) le Calvados (...) / Tout propriétaire d'un poste fixe visé au premier alinéa doit déclarer celui-ci à l'autorité administrative contre délivrance d'un récépissé dont devront être porteurs les chasseurs pratiquant la chasse de nuit à partir de ce poste fixe. / La déclaration d'un poste fixe engage son propriétaire à participer, selon des modalités prévues par le schéma départemental de mise en valeur cynégétique, à l'entretien des plans d'eau et des parcelles attenantes de marais et de prairies humides sur lesquels la chasse du gibier d'eau est pratiquée sur ce poste (...) " ; que l'article R. 424-17 du même code énonce que : " I. - La chasse de nuit au gibier d'eau ne peut s'exercer dans les départements mentionnés à l'article L. 424-5 qu'à partir de huttes, tonnes, gabions, hutteaux ou autres postes fixes qui existaient au 1er janvier 2000 et qui ont fait l'objet d'une déclaration auprès du préfet du département de situation avant le 1er janvier 2001 (...). / II. - La déclaration est souscrite par le propriétaire de l'installation (...) / IV. - Le préfet délivre un récépissé de la déclaration avec attribution d'un numéro de poste fixe que le déclarant est tenu d'apposer à l'extérieur du poste fixe et, si ce poste est situé dans un terrain clos, à l'extérieur de celui-ci (...) " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions que les chasseurs souhaitant pratiquer la chasse au gibier d'eau de nuit à partir de postes fixes doivent détenir le récépissé qui leur est délivré lors de la déclaration de leur installation, le législateur ayant entendu n'autoriser cette pratique que dans les départements limitativement énumérés par l'article L. 424-5 du code de l'environnement pour les seuls postes fixes existants au 1er janvier 2000 qui ont été déclarés ; qu'ainsi, en fixant au 1er janvier 2011 la date limite à laquelle les propriétaires de postes fixes de chasse existants au 1er janvier 2000 doivent déclarer leur installation pour pouvoir légalement pratiquer la chasse de nuit au gibier d'eau, l'article R. 424-17 précité, qui n'a ni pour objet ni pour effet de déterminer les conditions dans lesquelles la chasse de nuit au gibier d'eau peut être légalement exercée, n'a méconnu ni l'intention du législateur, ni la portée des articles L. 424-4 et L. 424-5 du code de l'environnement ; que le moyen tiré de ce que l'article R. 424-17 du code de l'environnement méconnaîtrait les articles L. 424-4 et L. 424-5 du même code doit, par suite, être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général (...) " ; que la réglementation du droit de chasser de nuit au gibier d'eau répond à un motif d'intérêt général, visant à prévenir une pratique désordonnée de la chasse de nuit et à favoriser une gestion rationnelle du patrimoine cynégétique en limitant cette pratique aux seuls postes fixes existants au 1er janvier 2000 ; qu'en contrepartie de la déclaration de leur installation avant le 1er janvier 2001, les propriétaires d'installations fixes ont le droit de pratiquer la chasse de nuit au gibier d'eau ; que si M. X soutient que l'obligation de déclaration des installations existantes avant le 1er janvier 2001 prive les propriétaires n'ayant pas effectué cette déclaration dans le délai imparti par l'article R. 424-17 du code de l'environnement de l'usage de leur poste fixe de chasse et méconnaît ainsi leur droit de propriété, ce délai, qui assure un juste équilibre des intérêts en présence, ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété tel que protégé par les stipulations précitées ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : " Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression. " ; qu'ainsi qu'il a été dit, le délai fixé par l'article R. 424-17 du code de l'environnement pour déclarer un poste fixe de chasse en contrepartie duquel la chasse de nuit au gibier d'eau peut être légalement exercée est justifié par le motif d'intérêt général visant à favoriser une pratique ordonnée de la chasse la nuit ; qu'il suit de là que la seule restriction apportée à la pratique de la chasse de nuit des propriétaires qui n'auraient pas déclaré leur poste fixe de chasse dans les délais impartis n'entraîne aucune atteinte à leur droit de propriété qui en dénaturerait le sens ou la portée ; que l'article R. 424-17 du code de l'environnement, qui n'a ni pour objet ni pour effet d'autoriser une quelconque dépossession, n'entre pas dans le champ d'application de la garantie instituée à l'article 17 de cette Déclaration ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ; que la différence de traitement résultant de l'article R. 424-17 précité du code de l'environnement est en rapport avec l'objectif d'intérêt général poursuivi de régulation de la pratique de la chasse de nuit et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de la différence de situation entre les propriétaires qui, ayant déclaré un poste fixe de chasse existant avant le 1er janvier 2001, peuvent, par suite, pratiquer la chasse de nuit et ceux qui ne se sont pas soumis à cette obligation de déclaration ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen doit être écarté ;

8. Considérant, enfin, qu'il est constant que M. X n'a déclaré que le 16 mai 2005 le gabion situé sur la parcelle dont il s'était porté acquéreur, soit postérieurement à la date limite imposée par les dispositions de l'article R. 424-17 précité ; que le préfet du Calvados était, par suite, tenu de refuser de lui délivrer le récépissé de déclaration prévu par ces dispositions ; qu'ainsi, le requérant ne saurait utilement invoquer les moyens tirés des erreurs de droit et de fait du préfet à avoir estimé que l'implantation du gabion et des axes de tir face à une route située à moins de 400 mètres ne serait pas de nature à assurer parfaitement la sécurité publique ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de sa requête ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à ce titre à la

charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que

M. X demande à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Pierre X et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Calvados.

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