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18/10/2012 | FRANCE | N°12NT00519

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 18 octobre 2012, 12NT00519


Vu la requête, enregistrée le 21 février 2012, présentée pour M. Eimal X, domicilié ..., par Me Launay, avocat au barreau de Caen; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2154 du 26 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2011 du préfet de la Manche lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, fixant le pays de destination, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de six mois, et l'informant d'un

signalement aux fins de non-admission dans le système Schengen ;

2°) d...

Vu la requête, enregistrée le 21 février 2012, présentée pour M. Eimal X, domicilié ..., par Me Launay, avocat au barreau de Caen; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2154 du 26 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2011 du préfet de la Manche lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, fixant le pays de destination, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de six mois, et l'informant d'un signalement aux fins de non-admission dans le système Schengen ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Manche de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me Launay de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de la renonciation de cet avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement n° 343/2003 du 18 février 2003 du Conseil de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. X, ressortissant afghan, interjette appel du jugement du

26 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 2011 du préfet de la Manche l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, fixant le pays de destination, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de six mois, et l'informant d'un signalement aux fins de non-admission dans le Système d'Information Schengen ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée " ; qu'aux termes de l'article 2 du règlement n° 343/2003 du 18 février 2003 du Conseil de l'Union européenne établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un Etat tiers : " Aux fins du présent règlement, on entend par : (...) c) "demande d'asile", la demande présentée par un ressortissant d'un pays tiers qui peut être comprise comme une demande de protection internationale par un Etat membre en vertu de la convention de Genève. Toute demande de protection internationale est présumée être une demande d'asile, à moins que le ressortissant d'un pays tiers concerné ne sollicite explicitement une autre forme de protection pouvant faire l'objet d'une demande séparée (...) " ; qu'en application de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsqu'un étranger a demandé à bénéficier de l'asile, l'autorité compétente est tenue de l'admettre provisoirement au séjour jusqu'à la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'un étranger, qui vient d'entrer irrégulièrement sur le territoire national, fait état de circonstances qui pourraient être invoquées à l'appui d'une demande d'asile et manifeste son intention de demander l'asile en France, il ne peut légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement avant d'avoir été mis à même de compléter une demande écrite en ce sens ;

3. Considérant, en premier lieu, que M. X, se disant de nationalité afghane, a été interpellé le 27 septembre 2011 à la gare maritime de Cherbourg après avoir été refoulé par les autorités irlandaises à la sortie du ferry ; que, selon ses déclarations recueillies lors de son audition par les services de police le 27 septembre 2011, il serait entré en France une quinzaine de jours avant son interpellation, après avoir transité par l'Iran, la Turquie, la Grèce, où il serait resté quatre mois, et l'Italie ; qu'il indique avoir quitté l'Afghanistan le 10 avril 2011, en raison de menaces de mort exercées par les Talibans en raison de son activité de chauffeur pour une société de déminage américaine, et avoir l'intention de se rendre en Irlande pour y demander l'asile ; que, toutefois, il précise n'avoir entrepris aucune démarche en vue de demander l'asile dans aucun des pays traversés ; qu'ainsi, M. X ne peut être regardé comme ayant ainsi manifesté sa volonté de présenter une demande d'asile en France avant l'intervention de l'arrêté contesté ; qu'en l'absence d'une telle demande, le préfet de la Manche n'était pas tenu d'examiner sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X ne justifie pas de son entrée régulière sur le territoire français et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il entre ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider de l'obliger à quitter le territoire français ; qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté contesté ayant été légalement pris sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Manche n'a pas méconnu la compétence réservée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée vise les articles applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'après avoir rappelé que le requérant avait déclaré être entré irrégulièrement sur le territoire français le 12 septembre 2011 sans être en possession des documents et visas mentionnés à l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que, compte tenu de l'absence de mention de toute famille, il n'était pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, le préfet a indiqué que M. X ne produisait aucun élément probant de nature à établir qu'il encourrait des risques le visant personnellement en cas de retour dans le pays d'origine ; qu'ainsi il a suffisamment motivé son arrêté au regard des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en troisième lieu, que M. X entre dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 I 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider de l'obliger à quitter le territoire français ; que, cette décision ne tirant pas les conséquences d'une décision de refus de titre de séjour, le requérant ne peut utilement se prévaloir de l'exception d'illégalité d'un tel refus ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

6. Considérant, d'une part, que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de renvoi en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;

7. Considérant, d'autre part, que l'arrêté contesté, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précise que

M. X, s'il allègue être exposé à des peines ou traitements contraires à ladite convention, n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de ses allégations qui ne peuvent à elles seules suffire à établir l'existence de risques actuels auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de destination ne peut être accueilli ;

En ce qui concerne la légalité de la décision interdisant le retour sur le territoire et ordonnant le signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen :

8. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français " ;

9. Considérant que les moyens tirés de l'exception d'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et prescrivant que M. X pourra être reconduit d'office dans le pays dont il a la nationalité, invoqués à l'encontre de la décision interdisant le retour sur le territoire français et ordonnant le signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. X de la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Eimal X et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Manche.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT00519
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-10-18;12nt00519 ?
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