Vu le recours, enregistré le 13 janvier 2011, présenté par le MINISTRE de L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ;
Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 08-3785 du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal Administratif d'Orléans a annulé, à la demande de la Société du parc éolien de Bouville, de la Société du parc éolien des Ramiers et de la Société du parc éolien de la Grande Epine, l'arrêté du 5 septembre 2008 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a refusé auxdites sociétés la délivrance de sept permis de construire portant sur la construction de douze éoliennes et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Bouville, Saumeray, Charonville et Ermenonville-la- Petite ;
2°) de rejeter les demandes présentées par la Société du parc éolien de Bouville, la Société du parc éolien des Ramiers et la Société du parc éolien de la grande Epine devant le tribunal administratif d'Orléans ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 juin 2012, présentée pour la Société du parc éolien de Bouville, la Société du parc éolien des Ramiers et la Société du parc éolien de la Grande Epine ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2012 :
- le rapport de M. François, premier conseiller ;
- les conclusions de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur public ;
- et les observations de Me Enckell, avocat de la Société du parc éolien de Bouville, de la Société du parc éolien des Ramiers et de la Société du parc éolien de la Grande Epine ;
Considérant que le préfet d'Eure-et-Loir, estimant que les sept demandes de permis de construire portant sur la construction de douze éoliennes et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Bouville, Saumeray, Charonville et Ermenonville-la- Petite, présentées par la Société du parc éolien de Bouville, la Société du parc éolien des Ramiers et la Société du parc éolien de la Grande Epine, étaient constitutives d'une opération d'ensemble afférente à un parc éolien, a refusé par arrêté du 5 septembre 2008 la délivrance des permis de construire sollicités ; que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT relève appel du jugement du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal Administratif d'Orléans a annulé cet arrêté à la demande des sociétés pétitionnaires ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 553-2 du code de l'environnement : " I. L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la hauteur du mât dépasse 50 mètres est subordonnée à la réalisation préalable : a) De l'étude d'impact définie à la section 1 du chapitre II du titre II du livre 1er du présent code (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 122-3 dudit code : " (...) L'étude d'impact présente successivement : (...) 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet (...) sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique (...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les demandes de permis de construire présentées par les sociétés pétitionnaires comportaient une étude acoustique commune, laquelle, pour évaluer les émissions sonores du parc éolien, a déterminé le bruit ambiant initial mesuré sur une période de dix nuits et dix jours, en six points différents localisés au niveau des habitations les plus proches et a calculé les valeurs d'émergence globale en prenant en considération les niveaux acoustiques d'éoliennes comparables à celles projetées ; que le bruit résiduel élevé constaté en l'un des points de mesure résulte de la présence d'une autoroute et d'une route à grande circulation à quelques kilomètres de ce dernier ; qu'une modélisation acoustique a par ailleurs été réalisée à partir d'un logiciel spécifique ; que les sociétés pétitionnaires, qui ont déposé leurs demandes de permis de construire le 21 juin 2007, n'étaient pas tenues d'inclure dans l'étude acoustique le calcul de l'émergence spectrale, paramètre que le décret n° 2006-1099 du 31 août 2006 n'a rendu obligatoire qu'à compter du 1er juillet 2007 ; que dès lors, c'est à tort que le préfet , pour refuser les permis sollicités, s'est fondé sur l'insuffisance du volet acoustique de l'étude d'impact ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le parc éolien projeté, composé d'éoliennes d'une hauteur de 150 mètres pales incluses, doit être implanté dans la zone dite " de coordination ", s'étendant de 5 à 30 kilomètres autour du radar militaire de détection de basse altitude de Châteaudun, l'aérogénérateur le plus proche étant situé à 21 kilomètres de ce radar ; que, par lettre du 3 décembre 2010, le général commandant en second la défense et les opérations aériennes de la région aérienne nord a indiqué qu'il résultait d'une campagne de mesures conduite du 12 au 16 octobre 2009 autour du radar de Châteaudun, que " l'occupation angulaire " du projet refusé comprend deux secteurs d'éoliennes de respectivement 4 et 2 degrés, espacés l'un de l'autre de deux degrés, alors que seul un angle maximal de 1,5° peut être accepté au sein d'un même secteur et que chaque secteur doit par ailleurs être séparé de 5° au minimum du secteur contigu ; que cette autorité précise que dans ces conditions et eu égard à la hauteur des éoliennes, l'implantation retenue était susceptible, par un effet de masque , d'entraîner une forte dégradation de la détection primaire du radar, pouvant aller jusqu'à la perte de détection d'aéronefs, de nature à nuire à la sécurité des vols et à la réalisation des missions de la Défense ; que, dans ces conditions, et sans que les sociétés pétitionnaires puissent utilement se prévaloir d'un courriel du 6 janvier 2011 émanant d'un officier de la zone de défense aérienne nord informant un de leurs collaborateurs qu'un projet limité à six éoliennes serait le cas échéant susceptible de recevoir un avis favorable, le préfet d'Eure-et-Loir a pu sans commettre d'erreur d'appréciation se fonder sur les dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour refuser la délivrance des permis sollicités ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. " ; que ces dispositions ne permettent pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales ; que le motif de la décision contestée fondé sur l'application de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme est, par suite, entaché d'erreur de droit ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. " ;
Considérant que le parc éolien projeté est situé à l'orée de la Beauce dans un paysage de plaine à forte densité d'îlots végétaux affecté d'une sensibilité moyenne à modérée, selon l'étude des enjeux faunistiques et paysagers liée à l'installation de parcs éoliens en Beauce réalisée par la direction régionale de l'environnement, et donne au sud sur la vallée du Loir, laquelle est classée par la même étude en zone de sensibilité majeure ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des photomontages du volet paysager de l'étude d'impact, que, depuis le plateau beauceron, plusieurs éoliennes seront en covisibilité directe avec l'église d'Illiers-Combray, située à 6,3 km du parc, et s'inscriront dans l'alignement direct de cet édifice ; qu'elles sont aussi situées dans le champ de visibilité de l'église et du donjon classés d'Alluyes distants de 4,8 kilomètres, dont elles perturberont la vision ; enfin, qu'elles seront en covisibilité avec l'église de Saumeray éloignée de 4,1 kilomètres, dont elles surplomberont le clocher ; qu'au vu de ces éléments, le directeur régional de l'environnement et la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ont émis à l'unanimité respectivement les 12 et 26 juin 2008 des avis défavorables à l'opération ; que, dans ces conditions, et alors même que la covisibilité de l'opération avec l'église classée de Dangeau serait peu perceptible, le préfet, en refusant de délivrer les permis sollicités, n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;
Considérant que par suite c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté contesté pour l'ensemble des motifs susmentionnés ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que les motifs tirés de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-21 du code de l'urbanisme ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Société du parc éolien de Bouville, la Société du parc éolien des Ramiers et la Société du parc éolien de la Grande Epine devant le Tribunal administratif d'Orléans ;
Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 9 juin 2008, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de juin 2008 " spécial délégations de signatures ", M. Alain Espinasse, secrétaire général de la préfecture, signataire de l'arrêté contesté, a reçu délégation de signature du préfet d'Eure-et-Loir à l'effet de signer tous arrêtés relevant des attributions de l'Etat dans le département au nombre desquels figure l'arrêté contesté ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article A 424-1 du code de l'urbanisme : " La décision expresse prise sur une demande de permis de construire, d'aménager ou de démolir ou sur une déclaration préalable prend la forme d'un arrêté. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que, bien qu'émanant de trois sociétés distinctes spécifiquement créées pour l'opération envisagée, les sept demandes de permis de construire à l'origine de la décision litigieuse portent sur un ensemble éolien intercommunal formant un parc unique conçu par la même entreprise et ont donné lieu à un dossier de présentation commun, notamment en ce qui concerne l'étude d'impact ; que, par suite, le préfet a pu régulièrement statuer sur ces demandes par une décision unique ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 5 septembre 2008 du préfet d'Eure-et-Loir ;
Sur les conclusions à fin d'injonction des sociétés intimées X :
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il suit de là que les conclusions à fin d'injonction de la Société du parc éolien de Bouville, de la Société du parc éolien des Ramiers et de la Société du parc éolien de la Grande Epine doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme demandée à ce titre par la Société du parc éolien de Bouville, la Société du parc éolien des Ramiers et la Société du parc éolien de la Grande Epine ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal Administratif d'Orléans du 9 novembre 2010 est annulé.
Article 2 : Les demandes présentée par la Société du parc éolien de Bouville, la Société du parc éolien des Ramiers et la Société du parc éolien de la Grande Epine devant le Tribunal Administratif d'Orléans sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la Société du parc éolien de Bouville, de la Société du parc éolien des Ramiers et de la Société du parc éolien de la Grande Epine tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'ENERGIE, à la société du parc éolien de Bouville, à la société du parc éolien des Ramiers et à la société du parc éolien de la Grande Epine.
Une copie en sera transmise au préfet d'Eure-et-Loir.
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N° 11NT00127 2
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