Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2010, présentée pour M. Albert X, demeurant ..., par Me Dubourg, avocat au barreau de Rennes ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 07-3548 du 6 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 mai 2007 de la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan relative aux opérations de remembrement des communes de Surzur et Noyalo ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2012 :
- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
Considérant que M. Albert X est propriétaire de terres agricoles situées sur les territoires des communes de Surzur et de Noyalo et dont l'exploitation est confiée à son fils Alain ; qu'une procédure de remembrement foncier a été engagée en 1996 sur la commune de Surzur avec une extension sur la commune de Noyalo ; qu'en dépit des demandes de
M. X, le siège de l'exploitation de son fils, situé sur la commune de Noyalo, à l'ouest de la RD 780, n'a pas été inclus dans le périmètre du remembrement, lequel concernait en revanche les terres destinées au pâturage de ses animaux, situées à l'est de cette voie ; qu'à la suite d'une réclamation de M. X, la commission communale d'aménagement foncier a décidé, les 18, 19 et 26 octobre 2000, le maintien en l'état du projet de remembrement en créant cependant, sur la parcelle ZA 1034, un chemin d'accès spécifique entre la sortie du boviduc permettant aux animaux de traverser la route départementale et les parcelles de pâturage se trouvant de l'autre côté de cette voie ; que, le 3 avril 2001, la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan a rejeté la réclamation de M. X, qui s'était vu attribuer la parcelle ZA 1030 afin d'y établir le nouveau siège de son exploitation ; qu'elle a en revanche accueilli favorablement la réclamation d'un autre exploitant agricole, M. Y, en remettant en cause l'attribution à M. X de la parcelle ZA 1034 qui servait d'assiette au chemin d'accès de ses bovins aux parcelles à usage de pâturages ; que ce dernier a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier accueillant la réclamation de M. Y ; que, par un jugement du 27 mai 2004 le tribunal administratif a rejeté sa demande en estimant que l'attribution de la parcelle ZA 1034 n'aurait pas permis de sécuriser le convoyage du troupeau et que le maintien de cette parcelle dans les attributions de l'intéressé n'aurait pas amélioré ses conditions d'exploitation ; que, par un arrêt du 16 mars 2006, la cour a toutefois infirmé ce jugement, en estimant que le projet de création d'un nouveau centre d'exploitation par M. Alain X sur le territoire de la commune de Surzur était hypothétique et que la commission départementale d'aménagement foncier ne pouvait fonder sa décision sur ce motif ; que, le 14 mai 2007, la commission départementale d'aménagement foncier a décidé à nouveau de supprimer l'attribution de la parcelle ZA 1034 au compte de propriété de M. X ; que l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de cette décision ; que M. X interjette appel du jugement du 6 juillet 2010, par lequel les premiers juges ont rejeté sa demande ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'aux termes de l'article 1421 du code civil : "Chacun des époux a le pouvoir d'administrer seul les biens communs (...)" ; qu'aux termes de l'article 1988 du même code : "Le mandat conçu en termes généraux n'embrasse que les actes d'administration. S'il s'agit d'aliéner ou hypothéquer, ou de quelque autre acte de propriété, le mandat doit être exprès." ; que les actes relatifs aux opérations de réorganisation foncière sont des actes d'administration des biens ; qu'en conséquence, chacun des époux a le pouvoir de déposer seul une réclamation relative au compte des biens de communauté devant la commission départementale d'aménagement foncier, puis de saisir le juge administratif en cas de rejet de sa réclamation ; qu'ainsi M. X n'était, même en l'absence de mandat de son épouse, pas dépourvu de qualité pour introduire sa demande de première instance ;
Sur la légalité de la décision contestée et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur : "L'aménagement foncier rural a pour objet d'assurer la mise en valeur et l'amélioration des conditions d'exploitation des propriétés agricoles ou forestières (...)" ; qu'il est constant qu'avant les opérations de remembrement foncier, M. X disposait des parcelles ZA 893 et 894 situées à proximité du boviduc permettant aux animaux de son fils de rejoindre le siège de son exploitation situé de l'autre côté de la RD 780 ; qu'en compensation de la non réattribution de ces parcelles, la commission communale d'aménagement foncier a envisagé l'affectation au compte de propriété de M. X d'une bande de terrain cadastrée ZA 1034, dont l'assiette empiétait sur une parcelle attribuée à M. Y ; qu'à la demande de celui-ci, la commission départementale a cependant supprimé ce passage et n'a pas attribué la parcelle ZA 1034 à M. X ; qu'ainsi, les animaux du fils de M. X doivent emprunter un chemin rural préexistant sur lequel circulent des véhicules automobiles pour accéder au boviduc et rejoindre le siège de l'exploitation ; que, dès lors, et en dépit du fait que les opérations de remembrement ont permis un regroupement, dans une certaine mesure, des parcelles de M. X, la décision contestée est à l'origine d'une aggravation des conditions d'exploitation des terres appartenant à l'intéressé ; que la circonstance que ce dernier n'a pas contesté le rejet de sa propre réclamation est à cet égard sans incidence dès lors qu'il est constant que M. Y s'opposait à l'attribution à M. X d'une nouvelle parcelle qui visait à compenser la perte des parcelles ZA 893 et 894 et que ce dernier n'a cessé de contester l'éloignement des parcelles qui lui étaient réattribuées du siège de l'exploitation de son fils ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. X d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 07-3548 du 6 juillet 2010 du tribunal administratif de Rennes ainsi que la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Morbihan du 14 mai 2007, dans sa partie contestée par M. X, sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Albert X et au ministre de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
Une copie sera transmise au préfet du Morbihan.
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N° 10NT02066 2
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