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01/03/2012 | FRANCE | N°11NT02002

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 01 mars 2012, 11NT02002


Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2011, présentée pour M. Muzaffar X, demeurant ..., par Me Tottereau-Retif, avocat au barreau d'Orléans ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102173 du 1er juillet 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 20 juin 2011 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer un titre

de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de trois mois à compter d...

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2011, présentée pour M. Muzaffar X, demeurant ..., par Me Tottereau-Retif, avocat au barreau d'Orléans ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102173 du 1er juillet 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 20 juin 2011 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Tottereau-Retif, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 2012 :

- le rapport de Mlle Wunderlich, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 20 juin 2011 :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1, alors applicable, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ;

Considérant que M. X, ressortissant pakistanais dans l'impossibilité de justifier de la régularité de son entrée en France et dépourvu de titre de séjour, se trouvait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté par adoption des motifs retenus par le premier juge ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. X, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux lui a été notifié par voie administrative le jour de son édiction avec l'assistance d'un interprète en langue pakistanaise ; que le moyen tiré de ce que ledit arrêté ne lui a pas été notifié dans une langue qu'il comprend manque en tout état de cause en fait ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4, alors applicable, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet (...) d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant ; (...) ; que si M. X soutient qu'il est présent en France, où il serait entré pour la première fois en 1998, depuis plus de dix ans, il est constant qu'il n'a jamais été autorisé à y séjourner régulièrement en dehors des périodes où il a été muni d'une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11, alors applicable, du même code : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 511-4 de ce code des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il réside en France depuis 1998, qu'il vit en concubinage avec une ressortissante française depuis le 4 juillet 2010 et qu'il n'a plus de nouvelles de sa famille restée au Pakistan ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui a vécu dans son pays d'origine, où résident toujours son épouse et ses cinq enfants, jusqu'à l'âge de 46 ans, a fait l'objet d'un précédent arrêté de reconduite à la frontière le 23 mai 2005 et d'un refus de séjour assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois le 16 avril 2010 ; que les liens personnels et familiaux en France de M. X ne présentent pas dans ces conditions les caractéristiques définies au 7° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, nonobstant l'ancienneté de sa présence en France ; que, par suite, le moyen tiré de ce que, dès lors qu'il devait se voir délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale en application de ces dispositions, le préfet d'Eure-et-Loir ne pouvait légalement décider sa reconduite à la frontière ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de M. X, dont le concubinage est récent et qui n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a par suite pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. X, n'implique aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au profit de l'avocat de M. X au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Muzaffar X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Une copie sera transmise, pour information, au préfet d'Eure-et-Loir et à Me Tottereau-Retif.

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N° 11NT02002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02002
Date de la décision : 01/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHRISTIEN
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine WUNDERLICH
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : TOTTEREAU-RETIF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-03-01;11nt02002 ?
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