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26/01/2012 | FRANCE | N°11NT02678

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 26 janvier 2012, 11NT02678


Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2011, présentée par le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-3281 du 30 août 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 25 août 2011 portant placement en rétention administrative de M. Armen X ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

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Vu les autres pièces du

dossier ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du parlement européen et du conseil du 16 déce...

Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2011, présentée par le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-3281 du 30 août 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 25 août 2011 portant placement en rétention administrative de M. Armen X ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ;

Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 2011-820 du 8 juillet 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2012 :

- le rapport de M. Pouget, rapporteur,

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public,

- les observations de M. Coconnier, représentant le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ;

- et les observations de Me Le Strat, avocat de M. X ;

Considérant que le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE relève appel du jugement en date du 30 août 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 25 août 2011 ordonnant le placement de M. X, ressortissant arménien, en rétention administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...)" ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : "Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...)" ; que l'article L. 562-1 du même code prévoit que : "Dans les cas prévus à l'article L. 555-1, lorsque l'étranger est père ou mère d'un enfant mineur résidant en France dont il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans et lorsque cet étranger ne peut pas être assigné à résidence en application de l'article L. 561-2 du présent code, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence sous surveillance électronique, après l'accord de l'étranger. La décision d'assignation à résidence avec surveillance électronique est prise par l'autorité administrative pour une durée de cinq jours. La prolongation de la mesure par le juge des libertés et de la détention s'effectue dans les mêmes conditions que la prolongation de la rétention administrative prévue au chapitre II du livre V du présent code" ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, intervenues pour transposer la directive

communautaire du 16 décembre 2008 susvisée, et éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 16 juin 2011, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle entend mettre à exécution une des décisions d'éloignement visées à l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prise à l'égard d'un étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français, d'apprécier, au regard des circonstances propres à l'intéressé, notamment au regard du risque que celui-ci tente de se soustraire à la mesure d'éloignement et aux garanties de représentation effectives dont il dispose, s'il peut le laisser en liberté, l'assigner à résidence, ou le placer en rétention administrative ; que, s'agissant des étrangers parents d'enfants mineurs ne présentant pas de garanties suffisantes de représentation, visés à l'article L. 562-1 du même code, le recours au placement en rétention ne doit constituer qu'une mesure d'exception réservée au cas où l'étranger ne disposerait pas, à la date à laquelle l'autorité préfectorale prend les mesures nécessaires à la préparation de l'éloignement, d'un lieu de résidence stable ;

Considérant que par la décision du 25 août 2011 du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE, M. X, dépourvu de passeport en cours de validité et de documents d'identité, qui était sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 23 mai 2011, a été placé en rétention administrative ; que si, au moment de l'intervention de la décision litigieuse, M. X était hébergé avec son épouse et ses trois enfants dans un centre d'accueil de demandeurs d'asile, il est constant que la Cour nationale du droit d'asile avait rejeté sa demande d'asile et celle de son épouse par des décisions définitives du 11 mars 2011 ; qu'il avait par conséquent, conformément aux dispositions de l'article L. 348-2 du code de l'action sociale et des famille susvisé qui réserve l'accueil dans les centres aux personnes dont les demandes d'asile sont en cours d'instruction, épuisé ses droits à hébergement dans ce centre ; que M. X avait été, au demeurant, mis en demeure de quitter celui-ci avant le 21 avril 2011 ; qu'il ne pouvait ainsi être regardé comme disposant d'un lieu de résidence suffisamment stable pour y permettre une assignation à résidence sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 562-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision du 25 août 2011 ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a estimé que le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE avait inexactement apprécié les faits de l'espèce en se fondant sur l'absence de domicile adéquat excluant toute mesure d'assignation à résidence ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M. X en première instance et en appel ;

Considérant, en premier lieu, qu'en indiquant que M. X n'est pas en possession d'un passeport en cours de validité ou d'autres documents justificatifs de son identité et en précisant qu'il ne dispose pas d'un domicile personnel fixe, le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE a suffisamment motivé l'arrêté prononçant le placement en rétention de l'intéressé, nonobstant l'absence de mention de son fils à ses côtés ; que cette motivation ne révèle par ailleurs aucun défaut d'examen particulier de la situation de M. X, notamment au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile issues de la loi susvisée du 16 juin 2011 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, eu égard à ses effets, la décision litigieuse plaçant M. X en rétention administrative accompagné d'un de ses enfants ait, dans les circonstances de l'espèce, porté atteinte à l'intérêt supérieur du fils de M. X et méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention de New-York ;

Considérant, enfin, que le détournement de procédure allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 25 août 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, supporte la charge des frais exposés en cours d'instance par M. X et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes en date du 30 août 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à M. Armen X.

Une copie sera transmise au PREFET D'ILLE-ET-VILAINE.

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N° 11NT026782


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02678
Date de la décision : 26/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-01-26;11nt02678 ?
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