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26/01/2012 | FRANCE | N°10NT01199

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 26 janvier 2012, 10NT01199


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2010, présentée pour Mme Louise X, demeurant ..., par Me Scharr, avocat au barreau de Paris ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-1544 en date du 15 avril 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à ce que le centre hospitalier régional (CHR) d'Orléans soit condamné, d'une part, à lui verser la somme totale de 250 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de la chute dont elle a été victime le 13 juillet 2007 lors de son hospitalisation, d'autre part,

à indemniser son mari de son préjudice financier et à condamner le cen...

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2010, présentée pour Mme Louise X, demeurant ..., par Me Scharr, avocat au barreau de Paris ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-1544 en date du 15 avril 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant à ce que le centre hospitalier régional (CHR) d'Orléans soit condamné, d'une part, à lui verser la somme totale de 250 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de la chute dont elle a été victime le 13 juillet 2007 lors de son hospitalisation, d'autre part, à indemniser son mari de son préjudice financier et à condamner le centre hospitalier à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral, enfin de condamner le même établissement à verser à son fils et à sa fille chacun la somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral ;

2°) de condamner le CHR d'Orléans, au besoin après avoir ordonné une nouvelle expertise, à lui verser la somme de 184 027,73 euros en réparation de l'intégralité des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge du même établissement la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2012 :

- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Ngo-Ndjigui, substituant Me Scharr, avocat des consorts X ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Louise X, alors âgée de 77 ans, qui souffrait de douleurs épigastriques, a été hospitalisée le 13 juillet 2007 à 8 heures 30 dans le service de soins intensifs de cardiologie du centre hospitalier régional (CHR) d'Orléans ; que le soir même, vers 19 heures, elle a chuté de son lit et s'est fracturé le col fémoral gauche ; qu'après une prise en charge par traction collée les praticiens du centre hospitalier ont réalisé le 24 juillet 2007 une ostéosynthèse par vissage percutané ; que la patiente, qui se plaignait de douleurs à la hanche, a fait l'objet d'une nouvelle intervention le 24 janvier 2008 pour une mise en place d'une prothèse totale de hanche ; qu'estimant que les praticiens du CHR d'Orléans avaient commis une première faute en ne posant pas de barrière à son lit et une seconde faute en traitant la fracture du col fémoral gauche avec retard, l'intéressée a saisi le centre hospitalier d'une demande indemnitaire ; que le CHR d'Orléans a rejeté cette réclamation le 17 février 2009 ; que Louise X a saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tenant à la condamnation du CHR d'Orléans à lui verser la somme globale de 159 777,73 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis et différentes sommes au titre du préjudice moral subi par son mari, son fils et sa fille ; que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret a, quant à elle, demandé à ce tribunal de condamner l'établissement à lui verser la somme de 91 012,94 euros en remboursement des débours exposés pour le compte de son assurée ; que Louise X a relevé appel du jugement du 15 avril 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande indemnitaire ; que, la requérante étant décédée le 29 décembre 2010, M. Jean X, M. Jean-Claude Louis X et Mlle Louisette X, respectivement conjoint survivant et héritiers de Louise X, ont repris l'instance ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, en particulier du rapport déposé le 11 août 2009 par l'expert désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans, que Louise X, alors âgée de 77 ans, n'a pas été immobilisée lors de son hospitalisation dans le service de soins intensifs alors que son état, susceptible de provoquer des épisodes confusionnels selon les déclarations de l'expert, et son âge auraient nécessité la pose de barreaux de sécurité, voire une surveillance accrue, qui a également fait défaut ; que, dans ces conditions, les agents du service de soins intensifs de cardiologie du CHR d'Orléans doivent être regardés comme ayant commis une négligence fautive ; qu'ainsi la fracture du col fémoral gauche de l'intéressée, conséquence directe de la chute dont elle a été victime, doit être regardée comme imputable à la faute commise dans le fonctionnement du service hospitalier, qui est de nature à engager la responsabilité du CHR d'Orléans ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la responsabilité du CHR d'Orléans ne pouvait être engagée en l'absence de toute faute ;

Sur les préjudices de Louise X :

Sur les préjudices à caractère patrimoniaux :

Considérant que la CPAM du Loiret justifie par les pièces produites avoir effectivement exposé une somme de 82 557,15 euros au titre des frais médicaux, pharmaceutiques, de transport et d'appareillage en lien direct avec la fracture du col fémoral de Louise X et les périodes d'hospitalisation que son traitement a nécessité ; qu'elle a droit au remboursement par le CHR d'Orléans de ses débours pour le montant ainsi déterminé ; qu'en revanche, elle ne justifie pas avoir exposé, avant le décès de Mme X survenu le 29 décembre 2010, des dépenses au titre des frais futurs que l'expert avait retenus à son profit ;

Considérant que l'expert a estimé que Louise X, dont l'état a été regardé comme consolidé à la date du 31 juillet 2008, avait besoin de l'assistance d'une tierce personne, notamment pour sa toilette et les besoins de la vie courante, à raison d'une heure par jour, 7 jours sur 7, et a indiqué qu'elle y avait déjà eu recours pendant deux mois à son retour à domicile à raison de deux fois une heure par jour cinq jours par semaine ; que Louise X justifie avoir acquitté les sommes de 345,30 euros et 46,81 euros pour la période courant du mois de septembre 2007 au mois d'août 2008 et pour le mois de septembre 2008 au titre d'une aide à domicile ; qu'il n'est, en revanche, pas justifié des frais qui auraient été exposés par l'intéressée à ce titre depuis le mois de septembre 2008 jusqu'à son décès ; qu'ainsi seule la somme de 392,11 euros peut être accordée à ce titre ;

Sur les préjudices à caractère personnel :

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances endurées par Louise X, évaluées à 4,5 sur une échelle de 7, en fixant la réparation de ce chef de préjudice à la somme de 4000 euros ;

Considérant que le préjudice esthétique subi par Louise X du fait de la cicatrice à la face externe de la hanche gauche, de la nécessité de se déplacer avec une canne et de la persistance d'une boiterie, évalué par l'expert à 3 sur une échelle de 7, peut être évalué, dans les circonstances de l'espèce, à la somme de 2500 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Louise X a, à la suite de sa chute, été hospitalisée, une première fois, du 13 juillet au 20 août 2007 dans différents services du CHR d'Orléans, puis du 20 août au 27 septembre 2007 au centre des soins de suite et réadaptation gériatrique de Saran et, une deuxième fois, pour la mise en place de la prothèse totale de hanche, du 23 au 31 janvier 2008, puis du 31 janvier au 11 mars 2008 respectivement dans les mêmes établissements, enfin du 11 mars au 15 avril 2008 à l'hôpital de Sully-sur-Loire ; que son déficit fonctionnel permanent a été fixé à 25 % par l'expert ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, y compris le préjudice d'agrément, subis par Mme X, en les évaluant à la somme de 5 500 euros ;

Sur les droits de Louise X et de la CPAM du Loiret :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le CHR d'Orléans doit être condamné à payer la somme de 392,11 euros, au titre des frais de garde à domicile exposés par Louise X et restant à sa charge ainsi que la somme de 12 000 euros au titre de ses préjudices personnels soit un total de 12 392,11 euros ;

Considérant, en second lieu, que le CHR d'Orléans doit être condamné à payer à la CPAM du Loiret, d'une part, et comme indiqué ci-dessus, la somme de 82 557,15 euros au titre des frais médicaux, pharmaceutiques, de transport et d'appareillage exposés, d'autre part, la somme de 966 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale ;

Sur le préjudice moral du conjoint et des enfants de Louise X :

Considérant que M. Jean X, M. Jean-Claude Louis X et Mlle Louisette X, respectivement conjoint survivant et héritiers de Louise X, personnes capables juridiquement, avaient seules qualité pour demander devant le tribunal l'indemnisation de leur propre préjudice moral ; qu'ainsi les conclusions présentées à ce titre par Louise X devant les premiers juges n'étaient pas recevables ; que si les intéressé ont présenté, à la suite de leur reprise d'instance, leurs propres conclusions tendant à la réparation de ce préjudice, de telles conclusions, présentées pour la première fois en appel, ne sont pas recevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de maintenir à la charge définitive du CHR d'Orléans d'Orléans les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 700 euros par une ordonnance du président du tribunal en date du 24 août 2009 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge du CHR d'Orléans, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le versement, d'une part, à M. Jean X, M. Jean-Claude Louis X et Mlle Louisette X de la somme totale de 1 500 euros, d'autre part, à la CPAM du Loiret de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE

Article 1er : Le jugement n° 09-1544 du tribunal administratif d'Orléans en date du 15 avril 2010 est annulé.

Article 2 : Le CHR d'Orléans est condamné à verser à M. Jean X, M. Jean-Claude Louis X et Mlle Louisette X la somme globale de 12 392,11 euros (douze mille trois cent quatre-vingt-douze euros et onze centimes).

Article 3 : Le CHR d'Orléans versera à la CPAM du Loiret les sommes de 82 557,15 euros (quatre-vingt-deux mille cinq cent cinquante-sept euros et quinze centimes) au titre de ses débours et de 966 euros (neuf cent soixante-six euros) au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale.

Article 4 : Le CHR d'Orléans versera à M. Jean X, M. Jean-Claude Louis X et Mlle Louisette X la somme totale de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le CHR d'Orléans versera à la CPAM du Loiret la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête et des conclusions de la CPAM du Loiret est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean X, à M. Jean-Claude Louis X, à Mlle Louisette X, au centre hospitalier régional d'Orléans et à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10NT01199
Date de la décision : 26/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : SCHARR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-01-26;10nt01199 ?
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