Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2010, présentée pour M. Alain X, demeurant ... par Me Riandey, avocat au barreau d'Orléans ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 09-2098 en date du 12 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mars 2009 de l'inspecteur du travail de la 4ème section de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Loiret autorisant son licenciement pour inaptitude ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2011 :
- le rapport de M. Hervouet, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Geffray, rapporteur public ;
- et les observations de Me Humbert, substituant Me Bredon, avocat de la SA Baudin Châteauneuf ;
Considérant que M. X a été recruté le 27 février 1989 comme charpentier fer, puis comme magasinier, par la SA Baudin Châteauneuf, dont le siège social est situé à Châteauneuf-sur-Loire (Loiret), qui exerce une activité de bâtiments et travaux publics en fabriquant et installant notamment des ponts et des charpentes ; qu'il était représentant du personnel auprès du comité d'entreprise ; qu'ayant été victime de plusieurs accidents du travail, dont le dernier en date du 28 mars 2001, il a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail lors de deux visites les 30 janvier et 13 février 2006, et apte à un poste sans charges lourdes et sans gestes répétés ; que la société a sollicité une première fois l'autorisation de le licencier pour inaptitude médicale le 22 mars 2006 ; que la décision d'autorisation prise le 4 mai 2006 par l'inspecteur du travail du Loiret, ainsi que la décision du 3 novembre 2006 du ministre chargé du travail ayant confirmé cette autorisation ont été annulées par jugement du tribunal administratif d'Orléans du 27 mars 2008, confirmé par l'arrêt nos 08NT01270 et 08NT01271 du 30 octobre 2008 de la cour administrative d'appel de Nantes et la décision n° 324478 du Conseil d'Etat du 29 mai 2009 ; qu'après sa réintégration dans l'entreprise en exécution d'une ordonnance de référé du conseil des prud'hommes d'Orléans du 6 octobre 2008, M. X a fait l'objet, dans le cadre de la visite médicale de reprise, d'un avis du médecin du travail du 21 novembre 2008 mentionnant qu'il était inapte au poste proposé. Apte à un poste sans charges lourdes et sans gestes répétés ; que, postérieurement à son refus d'occuper un emploi de magasinier dans une filiale du groupe Baudin Châteauneuf à Lille qui lui avait été proposé pour le reclasser, M. X a été convoqué le 20 janvier 2009 à un entretien préalable en vue de son licenciement pour inaptitude ; que le comité d'entreprise a émis un avis favorable à ce projet de licenciement le 27 janvier 2009 ; que, saisi d'une demande d'autorisation de licenciement pour inaptitude reçue le 4 février 2009, l'inspecteur du travail de la 4ème section de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Loiret a, le 31 mars 2009, autorisé le licenciement ; que M. X a été licencié par lettre du 2 avril 2009 ; qu'il interjette appel du jugement n° 09-2098 du 12 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-24-4 du code du travail, dans sa numérotation alors en vigueur : A l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail. / Si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de verser à l'intéressé, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. / Les dispositions prévues à l'alinéa précédent s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail. ; que, par ailleurs, en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique consécutive à un accident du travail, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement du salarié, compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise selon les modalités et conditions définies par l'article L. 122-32-5 du code du travail ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, le ministre, saisi du cas d'un salarié protégé reconnu inapte à son emploi, doit vérifier, dans les conditions prévues par l'article L. 122-24-4 et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi, des caractéristiques de l'emploi exercé par le salarié à la date à laquelle son inaptitude est constatée et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise, notamment par des mutations ou transformations de postes de travail, et si la mesure de licenciement envisagée est en rapport avec le mandat détenu par l'intéressé ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 2421-12 du code du travail : La décision de l'inspecteur est motivée (...) ; que la décision du 31 mars 2009 de l'inspecteur du travail comporte l'énoncé des considérations de droit qui en constituent le fondement juridique, prend acte de l'inaptitude de M. X à son poste de magasinier, constate qu'un poste de reclassement lui a été proposé au sein d'une des filiales de la société, et se prononce sur l'absence de lien entre le licenciement et le mandat détenu par l'intéressé ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ; que, par ailleurs, la circonstance qu'elle mentionne que même si le lien entre mandat et décision de licencier ne peut a priori être écarté, il ne saurait pour autant être démontré sur la foi de considérations objectives ne constitue pas une contradiction de motifs ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, suite à l'avis du médecin du travail faisant état de l'inaptitude de M. X à la reprise de son poste de manutentionnaire et de sa seule aptitude à occuper un poste sans charges lourdes et sans gestes répétés, la direction des ressources humaines du site de Châteauneuf a interrogé, par des courriels du 21 novembre 2008, ses homologues des autres agences, sites et filiales du groupe sur leurs possibilités de reclassement de M. X ; que, lors de la réunion des délégués du personnel du 12 décembre 2008, l'intéressé a reconnu ne pas avoir les qualifications requises ou le niveau de formation suffisant pour pouvoir occuper un poste de niveau employés, techniciens et agents de maîtrise, même après formation-adaptation ; que, s'agissant des emplois vacants de niveau ouvriers, il a considéré qu'il n'avait ni les connaissances professionnelles, ni la capacité à acquérir le niveau de formation nécessaire pour passer le certificat indispensable pour occuper un poste de contrôleur soudure, requérant par ailleurs une bonne condition physique ; qu'aucun emploi administratif, d'exécution, de grutier, de mécanicien d'entretien en atelier, de chauffeur poids lourds ou de magasinier n'était par ailleurs vacant ou susceptible de le devenir à court terme ; que si M. X a estimé que, parmi les postes déclarés vacants, seul celui de magasinier dans la filiale Eau Air Système à Lille pouvait lui convenir, il l'a néanmoins refusé par lettre du 26 décembre 2008 ; que, dans ces conditions, la SA Baudin Châteauneuf doit être regardée comme ayant satisfait à l'obligation de reclassement qui lui incombait ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. X a exercé un rôle actif dans le domaine de l'hygiène, de la sécurité et des conditions de travail en intervenant à plusieurs reprises auprès de son employeur et d'administrations, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de licenciement formulée par son employeur présenterait un lien avec son mandat représentatif ; qu'en particulier, les circonstances, d'une part, qu'à l'occasion de la précédente procédure de licenciement le concernant, la société ne lui a pas proposé un poste de chauffeur, pour lequel il ne disposait pas de qualifications et ne l'a réintégré que sur ordonnance de référé du conseil des prud'hommes d'Orléans, et, d'autre part, que, dans le cadre de la procédure litigieuse, une seule proposition d'emploi de magasinier lui a été proposée dans une filiale du groupe Baudin Châteauneuf implantée à Lille, n'établissent pas le lien allégué ; que par suite, le moyen tiré de ce que la mesure de licenciement est en rapport avec les fonctions représentatives exercées par M. X doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la SA Baudin Châteauneuf, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SA Baudin Châteauneuf présentées au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la SA Baudin Châteauneuf tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Alain X, à la SA Baudin Châteauneuf et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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N° 10NT00105 2
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