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03/06/2011 | FRANCE | N°09NT01965

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 03 juin 2011, 09NT01965


Vu le recours enregistré le 24 juillet 2009, présenté au nom de l'Etat, par le MINSITRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 06-347 et 07-173 du 20 mai 2009 du Tribunal administratif de Rennes, en tant qu'il a prononcé l'annulation des décisions du préfet de la région Bretagne portant répartition et fixation de la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) au titre des exercices 2005 et 2006, et a enjo

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Vu le recours enregistré le 24 juillet 2009, présenté au nom de l'Etat, par le MINSITRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 06-347 et 07-173 du 20 mai 2009 du Tribunal administratif de Rennes, en tant qu'il a prononcé l'annulation des décisions du préfet de la région Bretagne portant répartition et fixation de la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) au titre des exercices 2005 et 2006, et a enjoint en conséquence audit préfet de prendre, sous trois mois, deux nouvelles décisions d'attribution de la DDEC au département d'Ille-et-Vilaine au titre de ces mêmes exercices ;

2°) de rejeter la demande présentée par le département d'Ille-et-Vilaine devant le Tribunal administratif de Rennes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2011 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Donias, substituant Me Martin, avocat du département d'Ille-et-Vilaine ;

Considérant que par décisions des 25 août et 3 octobre 2005, le préfet de la région Bretagne a procédé à la répartition de la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) pour l'exercice 2005, et attribué la dotation revenant au Département d'Ille-et-Vilaine ; que, par décisions des 21 juillet, 6 et 19 septembre 2006, le même préfet a procédé à la répartition de la DDEC pour l'exercice 2006 et fixé la dotation de ce département ; que par jugement du 20 mai 2009, le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de cette collectivité territoriale, lesdites décisions, les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux, et enjoint au préfet de la région Bretagne de prendre de nouvelles décisions relatives à la répartition de la DDEC pour les exercices 2005 et 2006, dans un délai de trois mois ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité des décisions relatives à la DDEC au titre de l'exercice 2005 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3334-16 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur : La dotation départementale d'équipement des collèges évolue comme la dotation globale d'équipement (...) Elle est répartie entre les départements par la conférence des présidents des conseils généraux, après communication, par le représentant de l'Etat dans la région, de la liste des opérations de construction et d'extension prévue à l'article L. 211-2 du code de l'éducation (...) A défaut d'accord entre les présidents des conseils généraux, elle est répartie par le représentant de l'Etat dans la région dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ; que l'article L. 211-2 du code de l'éducation dispose que : Chaque année, les autorités compétentes de l'Etat arrêtent la structure pédagogique générale des établissements d'enseignement du second degré en tenant compte du schéma prévisionnel des formations mentionné à l'article L. 214-1. Le représentant de l'Etat arrête la liste annuelle des opérations de construction ou d'extension des établissements que l'Etat s'engage à doter des postes qu'il juge indispensables à leur fonctionnement administratif et pédagogique. Cette liste est arrêtée compte tenu du programme prévisionnel des investissements et après accord de la commune d'implantation et de la collectivité compétente (...) ; que selon l'article R. 3334-18 du code général des collectivités territoriales : Lorsque la part de l'ensemble des départements d'une région dans la dotation globale n'a pu être répartie entre les départements de cette région dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 3334-16, la répartition est faite suivant les modalités ci-après. / Le préfet de région choisit, sur la liste établie en application du IV de l'article 13 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, des opérations de construction ou d'extension dont la réalisation lui paraît nécessaire au fonctionnement normal du service public de l'enseignement. Il attribue aux départements qui ont la charge de ces opérations les crédits correspondants. / Le montant de ces crédits est égal, pour chaque opération, au produit du coût prévisionnel hors taxes de l'opération par un coefficient représentant la part du financement qui n'est pas à la charge de la commune ou du groupement de communes intéressé, calculé d'après le taux moyen réel de participation des communes défini au deuxième alinéa de l'article 15-1 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 précitée. / Le reliquat est réparti comme suit : / 1° A raison de 40 %, proportionnellement à la superficie développée hors oeuvre totale des bâtiments scolaires ; / 2° A raison de 25 %, proportionnellement à la superficie développée hors oeuvre totale des bâtiments scolaires construits avant 1973 ; / 3° A raison de 5 %, proportionnellement à la superficie des classes mobiles ; / 4° A raison de 30 %, proportionnellement aux effectifs des élèves des collèges publics. ; qu'enfin, le deuxième alinéa de l'article 15-1 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 avant sa codification à l'article L. 212-13 du code de l'éducation et son abrogation par la loi n° 2003-339 du 14 avril 2003, disposait que : (...) A défaut d'accord entre les collectivités intéressées, la participation des communes ou de leurs groupements est fixée par le représentant de l'Etat en tenant compte notamment du taux moyen réel de participation des communes ou de leurs groupements aux dépenses d'investissement des collèges transférés, constaté au cours des quatre derniers exercices connus précédant le transfert, dans le ressort du département (...) ;

Considérant, d'une part, que la suppression de la participation obligatoire des communes aux dépenses d'investissement des collèges par la loi du 4 juillet 1990 n'a eu ni pour objet, ni pour effet de modifier la procédure prévue à l' article L. 3334-16 du code général des collectivités territoriales quant à la répartition de la DDEC entre les départements, qui renvoie aux dispositions de l'article R. 3334-18 du même code en cas de défaut d'accord entre les présidents des conseils généraux ; que ces dispositions n'étant pas incompatibles avec la suppression de la participation prévue par la loi du 4 juillet 1990, celle-ci ne pouvait être regardée comme ayant implicitement abrogé ou rendu caduc ledit article R. 3334-18, lequel était ainsi toujours applicable à la date des décisions contestées ; que, lorsque la commune ou le groupement de communes intéressé n'a pas participé volontairement à l'opération de construction ou d'extension en cause, la part de financement qui n'est pas à la charge de la commune ou du groupement de communes représente ainsi 100 % du coût prévisionnel de l'opération, qui doit alors être pris intégralement en charge au titre de la DDEC de chaque exercice ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'opération de construction du collège d'Orgères a été retenue par l'arrêté du 19 avril 2005 fixant la liste annuelle des opérations de construction ou d'extension de collèges, en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code de l'éducation ; qu'en l'absence d'accord entre les présidents de conseils généraux quant à la répartition de la DDEC pour 2005, le préfet de la région Bretagne s'est borné à prendre en compte la moitié du coût du collège d'Orgères, pour un montant de 4 467 793 euros, en appliquant un accord obtenu avec les présidents de conseils généraux au cours des années 2002 à 2004, mais qui n'a pas été reconduit pour l'année 2005 ; qu'en ne retenant pas la totalité des crédits correspondant aux opérations nécessaires au fonctionnement du service public de l'enseignement, le préfet de la région Bretagne a ainsi méconnu les dispositions des articles L. 211-2 du code de l'éducation et R. 3334-18 du code général des collectivités territoriales ;

Sur la légalité des décisions relatives à la DDEC au titre de l'exercice 2006 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour établir la liste prévue à l'article

L. 211-2 du code de l'éducation au titre de l'année 2006, le préfet de la région Bretagne a demandé par lettre du 22 décembre 2005 aux présidents des conseils généraux de la région de lui communiquer le programme prévisionnel des investissements arrêtés pour les collèges du département ; que, par lettre du 27 février 2006, le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine a indiqué au préfet que l'année 2006 verrait la fin des opérations d'extension du collège de Châteaubourg pour la création de 300 places supplémentaires et des opérations d'extension du collège de Saint-Aubin-du-Cormier pour la création de 200 places supplémentaires, et qu'il souhaitait l'application des dispositions de l'article R. 3334-18 du code général des collectivités territoriales ; que, toutefois, après avoir sollicité l'avis du recteur de l'académie de Rennes et organisé une réunion de concertation avec les représentants des conseils généraux, le préfet de la région Bretagne a décidé qu'aucune de ces opérations d'extension ne serait retenue pour figurer sur la liste prévue à l'article L. 211-2 du code de l'éducation ;

Considérant, en premier lieu, que les dispositions susrappelées de l'article L. 211-2 du code de l'éducation prévoient que le représentant de l'Etat arrête la liste annuelle des opérations de construction ou d'extension que l'Etat s'engage à doter des postes qu'il juge indispensables au fonctionnement administratif et pédagogique des établissements ; que si le préfet, qui dispose d'un pouvoir d'appréciation, a pu estimer qu'aucune opération de construction ou d'extension de collèges ne devait figurer sur la liste dont s'agit, cette circonstance ne le dispensait pas du respect de cette formalité, dont il est constant qu'elle n'a pas été remplie ; que, par suite, les décisions contestées ont été prises à la suite d'une procédure irrégulière ;

Considérant, en second lieu, que lors de la présentation à la rentrée scolaire 2004 de la sectorisation des collèges publics d'Ille-et-Vilaine par l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'Education Nationale d'Ille-et-Vilaine, ce dernier a proposé l'extension du collège de Châteaubourg de 400 à 700 élèves et celui de Saint-Aubin-du-Cormier de 200 à 400 élèves ; que cette extension a été prévue au programme prévisionnel d'investissements (PPI) 2004 / 2008 des collèges publics adressé au préfet de région, la fin des opérations d'extension étant prévue pour l'année 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la rentrée scolaire 2006, les effectifs constatés du collège de Châteaubourg s'élevaient à 512 élèves et que les prévisions pour les années 2007 et 2008 s'élevaient respectivement à 539 et 542 élèves ; qu'à la rentrée scolaire 2006, les effectifs constatés du collège de Saint-Aubin-du-Cormier s'élevaient à 286 élèves et que les prévisions pour les années 2007 et 2008, s'élevaient respectivement à 315 et 310 élèves ; que l'augmentation significative du nombre d'élèves nécessitait à terme de créer les postes indispensables au fonctionnement administratif et pédagogique des établissements concernés ; que, dans ces conditions, en n 'inscrivant pas les opérations des deux collèges précités sur la liste prévue à l'article L. 211-2 du code de l'éducation, le préfet de la région Bretagne a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur les conséquences de l'illégalité des décisions contestées :

Considérant que l'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu ; que, toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation ; qu'il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine ;

Considérant que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales soutient que l'exécution avec effet rétroactif du jugement du 20 mai 2009, s'il devait être confirmé, se traduirait, pour les exercices en cause, par le versement d'une somme de 7 064 933 euros au bénéfice du département d'Ille-et-Vilaine et l'émission de titres de perception à fin de remboursement à l'encontre des autres départements de la région, par des difficultés de gestion des crédits de paiement (CP) de la DDEC compte tenu de leur mode de versement échelonné sur trois ans, et par des conséquences pérennes sur le calcul des dotations postérieures à 2007, du fait de la réforme de cette dotation par la loi de finances pour 2008, le nouvel article L. 3334-16 du code général des collectivités territoriales prenant comme base de référence la moyenne actualisée des crédits de paiement versés de 1998 à 2007 ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que la dotation forfaitaire du département d'Ille-et-Vilaine en serait seulement abondée de 663 411 euros, tandis que celles du Finistère, des Côtes d'Armor et du Morbihan seraient minorées des sommes respectives de 262 549 euros, 236 212 euros et 164 650 euros ; que, par ailleurs, il n'est pas établi que les sommes à reverser, le cas échéant, ne pourraient être absorbées par les budgets départementaux ; que, dans ces conditions, l'effet rétroactif de cette annulation n'emporte pas de conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que les actes concernés ont produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'ils étaient en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de leurs effets ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a annulé les décisions litigieuses et enjoint au préfet de la région Bretagne de prendre de nouvelles décisions relatives à la répartition de la DDEC au titre des exercices 2005 et 2006 ; que les conclusions à fin d'injonction présentées au mêmes fins par le département d'Ille-et-Vilaine devant la Cour sont dépourvues d'objet et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le département d'Ille-et-Vilaine et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES est rejeté.

Article 2 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par le département d'Ille-et-Vilaine sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera au département d'Ille-et-Vilaine une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION et au département d'Ille-et-Vilaine.

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N° 09NT01965

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT01965
Date de la décision : 03/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-06-03;09nt01965 ?
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