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22/10/2010 | FRANCE | N°09NT01230

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 22 octobre 2010, 09NT01230


Vu la requête enregistrée le 25 mai 2009, présentée pour l'ASSOCIATION KOAD BIHAN, représentée par sa présidente en exercice, dont le siège est chez Mme Le Goarnig, Kerrivoal à Landeleau (29530), par Me Magarinos-Rey, avocat au barreau de Brest ; l'ASSOCIATION KOAD BIHAN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-4371 du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2006 par lequel le préfet du Finistère a institué des servitudes d'utilité publique autour du dépôt d'explosifs e

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Vu la requête enregistrée le 25 mai 2009, présentée pour l'ASSOCIATION KOAD BIHAN, représentée par sa présidente en exercice, dont le siège est chez Mme Le Goarnig, Kerrivoal à Landeleau (29530), par Me Magarinos-Rey, avocat au barreau de Brest ; l'ASSOCIATION KOAD BIHAN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 06-4371 du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2006 par lequel le préfet du Finistère a institué des servitudes d'utilité publique autour du dépôt d'explosifs et de ses activités annexes exploité par la société Excia, devenue Maxam France SAS, sur le territoire de la commune de Plonévez-du-Faou, au lieudit Coat-Bihan ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu l'arrêté interministériel du 26 septembre 1980 fixant les règles de détermination des distances d'isolement relatives aux installations pyrotechniques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2010 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Fourès, substituant Me Clément, avocat de la société Maxam France SAS ;

Considérant que l'ASSOCIATION KOAD BIHAN relève appel du jugement du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2006 par lequel le préfet du Finistère a institué des servitudes d'utilité publique autour du dépôt d'explosifs et de ses activités annexes, dont la société Excia, devenue Maxam France SAS, a obtenu l'autorisation d'exploitation par un arrêté préfectoral du 8 août 2006 sur le territoire de la commune de Plonévez-du-Faou, au lieudit Coat-Bihan ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 515-8 du code de l'environnement : I. - Lorsqu'une demande d'autorisation concerne une installation classée à implanter sur un site nouveau et susceptible de créer, par danger d'explosion ou d'émanation de produits nocifs, des risques très importants pour la santé ou la sécurité des populations voisines et pour l'environnement, des servitudes d'utilité publique peuvent être instituées concernant l'utilisation du sol ainsi que l'exécution de travaux soumis au permis de construire. (...) / II. - Ces servitudes comportent, en tant que de besoin : 1° La limitation ou l'interdiction du droit d'implanter des constructions ou des ouvrages et d'aménager des terrains de camping ou de stationnement de caravanes ; 2° La subordination des autorisations de construire au respect de prescriptions techniques tendant à limiter le danger d'exposition aux explosions ou concernant l'isolation des bâtiments au regard des émanations toxiques ; 3° La limitation des effectifs employés dans les installations industrielles et commerciales qui seraient créées ultérieurement. / III. - Elles tiennent compte de la nature et de l'intensité des risques encourus et peuvent, dans un même périmètre, s'appliquer de façon modulée suivant les zones concernées (...) ; qu'aux termes de l'article L. 515-9 du même code : L'institution de servitudes d'utilité publique est décidée à l'intérieur d'un périmètre délimité autour de l'installation soit à la requête du demandeur de l'autorisation ou du maire de la commune d'implantation, soit à l'initiative du préfet. / Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions de délimitation du périmètre, qui tiennent compte notamment des équipements de sécurité de l'installation et des caractéristiques du site. / Le projet définissant les servitudes et le périmètre est soumis à enquête publique, conformément aux dispositions des articles L. 123-1 à L. 123-16, et à l'avis des conseils municipaux des communes sur lesquelles s'étend le périmètre. / Les servitudes et leur périmètre sont arrêtés par l'autorité compétente pour la délivrance de l'autorisation de l'installation classée. ; que l'article L. 515-10 dudit code dispose que : Les servitudes sont annexées au plan d'occupation des sols de la commune dans les conditions prévues à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme. ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24-2 du décret n° 77-1131 du 21 septembre 1977, applicable à la date de la décision contestée : Lorsqu'il est saisi par le demandeur de l'autorisation ou par le maire d'une demande tendant à l'institution de servitudes ou lorsqu'il en prend l'initiative lui-même, le préfet arrête le projet correspondant sur le rapport de l'inspection des installations classées et après consultation de la direction départementale de l'équipement et du service chargé de la sécurité civile. ; qu'aux termes de l'article 24-5 du même texte : Au vu du dossier de l'enquête et de l'avis du ou des conseils municipaux, l'inspection des installations classées, après consultation du service déconcentré de l'Etat en charge de l'urbanisme, du service chargé de la sécurité civile et, le cas échéant, des autres services intéressés, établit un rapport sur les résultats de l'enquête et ses conclusions sur le projet. / Le rapport et ces conclusions sont soumis au conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques. Le demandeur et le maire de la ou des communes d'implantation ont la faculté de se faire entendre par le conseil ou de désigner à cet effet un mandataire. Ils sont informés par le préfet, au moins huit jours à l'avance, de la date et du lieu de la réunion du conseil et reçoivent simultanément un exemplaire du rapport et des conclusions de l'inspection des installations classées. ; qu'enfin, l'article 24-6 dudit décret dispose que : La décision autorisant l'installation ne peut intervenir qu'après qu'il a été statué sur le projet d'institution des servitudes. ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, nonobstant leur lien, la demande d'autorisation d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement et l'institution de servitudes d'utilité publique autour de cette installation en raison de la particularité des dangers qu'elle présente font l'objet de procédures et de décisions distinctes ;

Considérant qu'il résulte du dernier alinéa de l'article L. 512-1 du code de l'environnement, aux termes duquel la délivrance de l'autorisation d'exploiter prend en compte les capacités techniques et financières dont dispose le demandeur, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1, du 5° du deuxième alinéa de l'article 2 du décret du 21 septembre 1977, imposant que la demande d'autorisation mentionne (...) les capacités techniques et financières de l'exploitant, et de son article 2-1, exigeant qu'elle précise en outre les modalités des garanties financières exigées par l'article L. 516-1 du code de l'environnement, notamment leur nature, leur montant et les délais de leur constitution, que la prise en compte des capacités techniques et financières et les modalités des garanties financières que doit apporter la société pétitionnaire concernent uniquement le dossier de demande, l'instruction et la délivrance de l'autorisation d'exploiter, et non la décision d'institution de servitudes d'utilité publique autour de l'exploitation ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que l'arrêté du préfet du Finistère du 7 août 2006 instituant des servitudes d'utilité publique autour du dépôt d'explosifs devant être exploité par la société Excia, devenue Maxam France SAS, aurait été pris sur la base d'un dossier ne comprenant pas les éléments relatifs aux capacités financières de l'entreprise et aux modalités des garanties financières est inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, que, de même, les moyens tirés du caractère prétendûment incomplet de l'étude d'impact, dont le 4° de l'article 3 du décret du 21 septembre 1977 impose qu'elle soit jointe à la demande d'autorisation, et des insuffisances de l'étude de dangers, qui entre dans la composition du dossier de demande d'autorisation d'exploiter en vertu de l'article L. 512-1 du code de l'environnement et de l'article 3-5° du décret du 21 septembre 1977, sont sans influence sur la régularité de la procédure à l'issue de laquelle a été prise la décision d'instituer les servitudes d'utilité publique susmentionnées ;

Considérant, en troisième lieu, que si après l'enquête publique, intervenue du 1er septembre au 1er octobre 2003 et portant conjointement sur le projet de servitudes d'utilité publique et la demande d'autorisation d'exploitation, a été réduit le périmètre de la zone de sécurité Z5, correspondant à très faibles possibilités de blessures légères pour les dommages aux personnes et dégâts très légers pour les dommages aux biens, selon les dispositions de l'article 9 de l'arrêté interministériel du 26 septembre 1980 fixant les règles de détermination des distances d'isolement relatives aux installations pyrotechniques, il ressort des pièces du dossier que cette modification visait à prendre en compte les observations de propriétaires riverains et une recommandation de la commission d'enquête, sans qu'il en résulte une quelconque méconnaissance des dispositions réglementaires applicables ; que, dans ces conditions, la réduction du périmètre de la zone de sécurité Z5 intervenue après l'enquête publique n'a pas constitué une modification portant atteinte à l'économie générale du projet de servitudes, et dès lors ne rendait pas nécessaire l'organisation d'une nouvelle enquête ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'association requérante ne peut utilement invoquer la prétendue insuffisance des capacités financières de la société Excia pour soutenir que la décision du préfet du Finistère d'instituer des servitudes d'utilité publique serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il résulte du III de l'article L. 515-8 du code de l'environnement, de l'article 24-3 du décret du 21 septembre 1977 et des dispositions de l'arrêté interministériel du 26 septembre 1980 que l'institution des servitudes d'utilité publique, qui est effectuée par le préfet lui-même et non par l'exploitant autorisé par le préfet, prend en compte uniquement les risques que présentent l'installation exploitée et les zones de dangers en résultant ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 24-3 du décret du 21 septembre 1977 : L'appréciation de la nature et de l'intensité des dangers encourus tient compte des équipements et des dispositifs de prévention et d'intervention, des installations de confinement, des mesures d'aménagement envisagées, au titre desquelles les servitudes d'utilité publique. / Le périmètre est étudié en considération des caractéristiques du site, notamment de la topographie, de l'hydrographie, du couvert végétal, des constructions et des voies existantes ; que l'arrêté interministériel susvisé du 26 septembre 1980 dispose en son article 9 que Dans chaque installation pyrotechnique élémentaire, c'est-à-dire dans chaque emplacement de travail situé en plein air ou dans un local, isolé ou faisant partie d'un atelier, dépôt ou magasin et contenant une charge de matières ou objets explosibles, cette charge se trouve à l'origine de zones dangereuses dont il faut distinguer les cinq catégories indiquées ci-après, classées suivant la gravité probable des dangers qu'elle présentent pour les personnes et pour les biens, et en son article 10 que L'étendue des zones de dangers dépend essentiellement de la configuration du terrain, des moyens de protection mis en place et de la nature et, en particulier, de la division de risque des matières ou objets explosibles qui leur donnent naissance ; que les articles 11 et 12 du même arrêté interministériel précisent, respectivement, que Les distances R (exprimées en mètres) (...) des limites des zones dangereuses à la charge de masse Q (exprimée en kilogrammes) de matières ou objets explosibles, placée au niveau du sol, sont définies en atmosphère normale (...), au-dessus d'un terrain plat sans protection particulière, et que ces distances peuvent être réduites si la configuration des terrains ou la mise en place de dispositifs de protection efficaces diminuent la gravité du danger ;

Considérant que le dépôt exploité par la société Maxam France SAS est organisé en quatre bâtiments de stockage de type igloos, contenant chacun quatre alvéoles abritant chacune quatre tonnes équivalent TNT d'explosifs et entourés de merlons de 2,50 mètres de hauteur, situés en fond de vallon au milieu d'une forêt constituant un écran naturel ; qu'eu égard au dispositif de protection spécifique que constitue ce mode de stockage, qui justifie la réduction des distances de sécurité à l'arrière et sur les côtés des bâtiments comme les dispositions précitées de l'article 12 de l'arrêté interministériel du 26 septembre 1980 en ouvrent la possibilité, et à la prise en compte de la topographie et du couvert végétal dans le choix du site d'implantation de l'installation, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Finistère aurait entaché d'erreur manifeste d'appréciation sa décision d'instituer les servitudes d'utilité publique en adoptant la délimitation des zones de sécurité Z1 à Z5 ressortant du plan annexé à l'arrêté contesté du 7 août 2006 ; qu'au regard de la brièveté du temps de stationnement des camions de livraison, de l'ordre de vingt minutes, et de la limitation à 5 tonnes équivalent TNT de leur charge maximale de produits explosibles par l'article 8.3 de l'arrêté d'autorisation d'exploitation du 8 août 2006, le préfet n'a pas davantage entaché d'erreur manifeste la décision d'institution des servitudes en ne prenant pas en compte le stationnement des camions de livraison à l'est du dépôt dans la délimitation des zones de sécurité susmentionnées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION KOAD BIHAN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par l'ASSOCIATION KOAD BIHAN doivent dès lors être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ASSOCIATION KOAD BIHAN le versement à la société Maxam France SAS d'une somme de 2 000 euros au titre de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION KOAD BIHAN est rejetée.

Article 2 : L'ASSOCIATION KOAD BIHAN versera à la société Maxam France SAS une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION KOAD BIHAN, à la société Maxam France SAS et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

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N° 09NT01230

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT01230
Date de la décision : 22/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : MAGARINOS-REY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-10-22;09nt01230 ?
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