La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2010 | FRANCE | N°09NT00912

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 juin 2010, 09NT00912


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 6 avril et 15 mai 2009, présentés pour Mme Najete X et M. Richard Y, demeurant ..., par Me Dokhan, avocat au barreau de Paris ; Mme X et M. Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-1593 du 6 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Deauville (Calvados) à leur verser la somme de 325 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait de la décision de préemption inter

venue le 19 janvier 2006 ;

2°) d'annuler la décision du 18 juin 2007 par...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 6 avril et 15 mai 2009, présentés pour Mme Najete X et M. Richard Y, demeurant ..., par Me Dokhan, avocat au barreau de Paris ; Mme X et M. Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-1593 du 6 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Deauville (Calvados) à leur verser la somme de 325 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait de la décision de préemption intervenue le 19 janvier 2006 ;

2°) d'annuler la décision du 18 juin 2007 par laquelle le maire de Deauville a rejeté leur demande indemnitaire ;

3°) de condamner la commune de Deauville à leur verser la somme de 325 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision de préemption intervenue le 19 janvier 2006, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de leur réclamation préalable du 10 mai 2007, et de la capitalisation des intérêts ;

4°) d'enjoindre à la commune de Deauville, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de leur verser la somme susmentionnée dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2010 :

- le rapport de M. Lainé, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

Considérant que M. Y et Mme X relèvent appel du jugement du 6 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Deauville (Calvados) à leur verser la somme de 325 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait de la décision du maire du 19 janvier 2006 de préempter les droits immobiliers faisant l'objet de la déclaration d'intention d'aliéner adressée à la commune le 21 novembre 2005, correspondant à la moitié indivise du lot n° 1 représentant 386,5 millièmes de l'ensemble immobilier en copropriété, cadastré section AE n°s 18, 19, 180 et 182, situé rue Reynaldo Hahn et boulevard de la Mer, sur lequel ils exploitaient un fonds de commerce de golf miniature, jeux, bar en plein air et restauration rapide ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, sans se prononcer sur les deux causes juridiques invoquées par les requérants pour justifier leur demande indemnitaire, la responsabilité sans faute pour rupture de l'égalité devant les charges publiques et la responsabilité pour illégalité fautive, le Tribunal s'est directement fondé sur l'absence de lien de causalité direct et certain entre le fait générateur invoqué, la décision de préemption du 19 janvier 2006, et le préjudice résultant du manque à gagner sur le prix de vente du fonds de commerce ; que l'existence d'un lien de causalité direct et certain étant une condition d'engagement de la responsabilité commune aux deux causes juridiques susmentionnées, le jugement attaqué, qui analyse dans ses visas tous les moyens soulevés devant le Tribunal, s'est ainsi prononcé sur l'ensemble de la demande de M. Y et Mme X, et n'est pas entaché de l'insuffisance de motivation alléguée ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

Considérant qu'après y avoir été autorisé par un jugement du Tribunal de commerce de Honfleur du 21 septembre 2005, dans le cadre du plan de redressement homologué par un précédent jugement du 19 novembre 1997, M. Y a conclu le 18 novembre 2005 avec la société Compagnie financière de Deauville deux promesses de vente portant respectivement sur le fonds de commerce et les droits immobiliers susmentionnés, une clause de chacun de ces actes stipulant que les deux cessions formaient un tout indissociable ; que les requérants imputent à la décision du maire de Deauville du 19 janvier 2006 de préempter l'immeuble, au prix de 75 000 euros indiqué dans la déclaration d'intention d'aliéner, le défaut de vente du fonds de commerce au prix initialement prévu de 525 000 euros et l'obligation de le céder à un nouvel acquéreur, la société Casa Cubaine, au prix plus réduit de 200 000 euros en vertu d'une promesse du 24 février 2006 régularisée par un acte de vente du 24 mars 2006 ;

En ce qui concerne la responsabilité pour faute :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que le titulaire du droit de préemption urbain peut légalement exercer ce droit, d'une part, s'il justifie, à la date à laquelle il l'exerce, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date et, d'autre part, s'il fait apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ;

Considérant, en premier lieu, que la motivation de la décision de préemption du 19 janvier 2006, d'où il ressort que le bien immobilier en cause est acquis afin d'être ultérieurement utilisé soit pour l'aménagement du front de mer par la création d'un espace paysager, ludique ou de loisirs, soit pour être intégré dans l'extension ultérieure du périmètre du port de plaisance, fait apparaître avec une précision suffisante la nature du projet en vue duquel est constituée la réserve foncière à laquelle doit être intégré ledit bien ;

Considérant, en second lieu, que les requérants n'apportent aucune justification, à l'appui de leur affirmation selon laquelle le programme d'aménagement du front de mer serait abandonné, alors que la commune de Deauville fait état d'éléments illustrant qu'il se poursuit autant qu'une maîtrise foncière progressive du secteur le permet ; qu'il résulte en effet de l'instruction que le conseil municipal a décidé par une délibération du 21 février 2003 d'acquérir la parcelle AE n° 20, voisine du fonds de commerce cédé par M. Y, pour y réaliser un aménagement paysager, et que la commune a fait réaliser fin 2003 sur la parcelle cadastrée AB 24 une aire de jeux comportant des terrains de skate-board et de basket ; qu'il n'est pas contesté, enfin, que l'immeuble en cause se situe dans le périmètre de l'extension ultérieure du port de plaisance de Deauville ; que la réalité des projets d'aménagement mentionnés dans la décision de préemption du 19 janvier 2006 est ainsi établie, et répond aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la commune de Deauville ne peut être engagée en raison d'une illégalité fautive de la décision de préemption litigieuse ;

En ce qui concerne la responsabilité sans faute :

Considérant qu'en exerçant régulièrement son droit de préemption sur les droits immobiliers susmentionnés, la commune de Deauville n'a pas fait subir aux requérants un aléa ou une sujétion excédant ceux que doivent normalement supporter les vendeurs et acquéreurs de biens immobiliers situés dans une zone urbaine, alors surtout qu'en ne mentionnant pas dans sa déclaration d'intention d'aliéner l'indissociabilité des ventes du fonds de commerce et de l'immeuble, M. Y n'a pas mis à même le maire de disposer de l'ensemble des renseignements utiles pour apprécier l'opportunité de la préemption ; qu'il suit de là que les requérants ne peuvent davantage prétendre à être indemnisés sur le terrain de la responsabilité sans faute ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'indemnisation présentées par M. Y et Mme X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants ne peuvent qu'être également rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. Y et Mme X la somme de 2 000 euros que demande la commune de Deauville au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Y et Mme X est rejetée.

Article 2 : M. Y et Mme X verseront à la commune de Deauville une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Richard Y, à Mme Najete X et à la commune de Deauville (Calvados).

''

''

''

''

N° 09NT00912 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT00912
Date de la décision : 15/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Laurent LAINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : DOKHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-06-15;09nt00912 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award