Vu la requête, enregistrée le 25 novembre 2008, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU (28700), représentée par son maire en exercice, par Me Lester, avocat au barreau de Chartres ; la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 08-3239 en date du 10 novembre 2008 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à ce que la SNC EPARCO Assainissement et l'Etat (direction départementale de l'agriculture et de la forêt d'Eure-et-Loir) soient condamnés à lui verser à titre de provision respectivement la somme de 72 500 euros et celle de 24 360 euros en réparation des désordres affectant les deux stations d'épuration réalisées rue du Général Patton et hameau des Essars ;
2°) de condamner ces constructeurs à lui verser à titre de provision les sommes ci-dessus ou, à tout le moins, la somme de 54 361,79 euros en ce qui concerne la SNC EPARCO Assainissement et la somme de 18 298,16 euros en ce qui concerne l'Etat, ainsi que les intérêts à courir sur ces sommes ;
3°) de condamner les mêmes à lui rembourser les frais d'expertise ;
4°) de mettre à leur charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2009 :
- le rapport de Mme Perrot, rapporteur ;
- les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;
- et les observations de Me Israël, avocat de la SNC Eparco Assainissement ;
Considérant que, par un marché passé le 5 octobre 1999, la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU a confié à la SNC Eparco Assainissement la réalisation et la mise en place de deux dispositifs de traitement des eaux usées par filtres à sable verticaux drainés sur les sites de la rue du Général Patton et du hameau des Essars ; que la maîtrise d'oeuvre était assurée par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF) d'Eure-et-Loir ; que la réception des ouvrages a été prononcée sans réserve le 15 décembre 2000 ; que, des dysfonctionnements étant apparus au cours de l'année 2004, la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU a saisi le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans d'une demande d'expertise ; que l'expert désigné a remis son rapport le 9 janvier 2008 ; que la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU a alors saisi ce même juge d'une demande tendant à la condamnation des deux constructeurs à lui verser une provision à valoir sur les sommes nécessaires à la réparation des désordres constatés ; que, par une ordonnance en date du 10 novembre 2008, le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU relève appel de cette ordonnance ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence ; qu'aux termes de l'article R. 541-1 du même code : Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ;
Considérant que l'ordonnance de référé accordant ou refusant une provision en application des dispositions précitées de l'article R. 541-1 est rendue à l'issue d'une procédure particulière, adaptée à la nature de la demande et à la nécessité d'une décision rapide ; que le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans a pu, sans méconnaître le caractère contradictoire de l'instruction, statuer sans avoir communiqué à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU le mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2008 et présenté devant lui par la SNC Eparco Assainissement, dès lors qu'il ressort de l'ordonnance attaquée et des pièces du dossier que les éléments contenus dans ce mémoire n'ont pas exercé d'influence sur la décision qu'il a prise ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée a été rendue à l'issue d'une procédure irrégulière, doit être écarté ;
Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :
Considérant que si la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU a évalué le montant des provisions dont elle sollicite le versement de la part de l'Etat et de la SNC Eparco Assainissement en retenant la solution de remise en fonction des ouvrages litigieux la plus onéreuse des deux préconisées par l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans, cette circonstance, qui peut avoir une influence sur le montant de l'obligation des constructeurs mis en cause, ne saurait, en revanche, avoir d'incidence sur le principe de cette obligation ; que, par suite, en déclarant, pour ce seul motif, sérieusement contestable l'obligation des constructeurs à l'égard de la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU, le juge des référés a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU tant en première instance qu'en appel ;
En ce qui concerne la responsabilité :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et, en particulier, de l'examen du rapport remis par l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans, que les désordres constatés, qui consistent en un colmatage des filtres à sable, ont pour effet de rendre les ouvrages impropres à leur destination et sont, par suite, de nature à engager la responsabilité des constructeurs sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant, en deuxième lieu, que les désordres affectant le dispositif d'épuration des eaux usées de la rue du Général Patton ont pour origine principale un sous-dimensionnement de ce dispositif qui n'est pas en mesure de traiter la quantité d'eaux usées envoyées par la station de pompage ; que l'expert met en évidence dans son rapport les distorsions constatées entre le débit d'eaux usées de cette station et celui qu'est capable de supporter l'installation litigieuse ; que ces désordres sont imputables tant à la DDAF d'Eure-et-Loir, laquelle n'a pas, à l'occasion de l'accomplissement de sa mission de conception, relevé les incohérences existant entre les divers éléments de l'ouvrage, qu'à la SNC Eparco Assainissement qui, bien qu'étant spécialisée dans ce type d'installation, n'a présenté au maître d'oeuvre ou au maître d'ouvrage aucune observation efficiente et a préconisé l'installation d'une station capable de traiter 2,61 m3 /heure alors que les ouvrages existant en amont assuraient un débit de 7 m3/heure ; qu'ainsi, et en l'état de l'instruction, l'obligation tant de la DDAF d'Eure-et-Loir que de la SNC Eparco Assainissement d'assurer, chacune pour moitié, la réparation des désordres n'apparaît pas sérieusement contestable ;
Considérant, en troisième lieu, que les dysfonctionnements dont est affectée la station d'épuration du hameau des Essars résultent, selon le rapport de l'expert, pour partie de surcharges hydrauliques imputables au maître d'ouvrage et pour partie d'une mauvaise conception de l'alimentation du filtre à sable imputable à l'entreprise ; que, contrairement à ce que prétend la SNC Eparco Assainissement, le nombre important des consignes d'entretien transmises par elle au maître d'ouvrage entre la remise de l'offre et la réception de l'ouvrage, s'il a été relevé par l'expert, n'a pas été regardé comme constituant une cause des désordres litigieux ; que, dans ces conditions et en l'état de l'instruction, l'obligation de la SNC Eparco Assainissement à réparer la moitié des dommages résultant des dysfonctionnements de cet ouvrage n'est, eu égard en particulier à la compétence et à la spécialisation de cette entreprise, pas sérieusement contestable ;
En ce qui concerne le montant de la provision :
Considérant que l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans a préconisé deux solutions de reprise des désordres, l'une consistant dans le raccordement des deux ouvrages à une station d'épuration existante de plus grande capacité et dont le coût a été évalué à 145 000 euros TTC, et l'autre consistant en la réfection des filtres à sable, pour un montant de 108 723,58 euros TTC ; qu'en l'état de l'instruction, il y a lieu de retenir, pour déterminer la provision que l'Etat et la SNC Eparco Assainissement seront condamnés à payer à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU, le montant le moins élevé, soit 108 723,58 euros TTC ; qu'ainsi, la SNC Eparco Assainissement sera condamnée à payer à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU la somme de 54 361,79 euros TTC et l'Etat la somme de 18 298,16 euros TTC, à titre de provisions ;
Considérant que les sommes de 54 361,79 euros et 18 298,16 euros TTC précitées porteront intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2008, date d'enregistrement de la demande de la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU devant le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans ;
Considérant que la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU, qui n'est pas dépourvue des moyens d'assurer le recouvrement de ses créances, n'est, en tout état de cause, pas recevable à demander que les condamnations prononcées ci-dessus soient assorties d'une astreinte ;
En ce qui concerne les frais d'expertise :
Considérant, enfin, que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge de la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU un tiers des frais d'expertise qu'elle a avancés et de condamner l'Etat et la SNC Eparco Assainissement à payer chacun un autre tiers desdits frais ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU, qui n'est pas, pour l'essentiel, la partie perdante dans la présente instance, le paiement à la SNC Eparco Assainissement de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat et de la SNC Eparco Assainissement le paiement à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU de la somme de 1 000 euros chacun au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 08-3239 du juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans en date du 10 novembre 2008 est annulée.
Article 2 : La SNC Eparco Assainissement et l'Etat sont condamnés à payer à titre de provisions à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU les sommes respectives de 54 361,79 et 18 298,16 euros TTC. Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2008.
Article 3 : Les frais d'expertise taxés et liquidés par le président du Tribunal administratif d'Orléans sont mis à la charge respective de la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU, de la SNC Eparco Assainissement et de l'Etat à hauteur d'un tiers de leur montant pour chacun d'eux.
Article 4 : La SNC Eparco Assainissement et l'Etat verseront chacun à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU est rejeté.
Article 6 : Les conclusions de la SNC Eparco Assainissement présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SAINT-SYMPHORIEN LE CHATEAU, à la SNC Eparco Assainissement et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Une copie sera adressée à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt d'Eure-et-Loir.
''
''
''
''
2
N° 08NT03201
1