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01/08/2008 | FRANCE | N°07NT01844

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 01 août 2008, 07NT01844


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2007, présentée pour M. Jean-Noël X, demeurant ..., par Me Menard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-2493 en date du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2004 du ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées prononçant sa mutation d'office ;

2°) à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente des suites qui seront données à la procédure pénale ;

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°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté contesté ;

4°) de condamner l'Etat à lui ve...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2007, présentée pour M. Jean-Noël X, demeurant ..., par Me Menard, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-2493 en date du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2004 du ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées prononçant sa mutation d'office ;

2°) à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente des suites qui seront données à la procédure pénale ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté contesté ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 050 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991, modifiée, relative au secret des correspondances émises par la voie des télécommunications ;

Vu le décret n° 84-131 du 24 février 1984, modifié, portant statut des praticiens hospitaliers ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2008 :

- le rapport de Mme Michel, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Villain, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite du signalement de trois incidents graves qui se sont produits, aux mois d'octobre et novembre 2002, à l'occasion de l'exercice de l'activité de régulation du service d'assistance médicale d'urgence (SAMU) du centre hospitalier de Laval, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Mayenne a diligenté une enquête administrative qui a conclu à la responsabilité du docteur X, anesthésiste-réanimateur régulateur au SAMU, dans la survenance de ces incidents ; que, par une lettre en date du 19 juin 2003, le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a informé l'intéressé de sa décision d'ouvrir une procédure disciplinaire à son encontre ; que, par un arrêté du même jour, la même autorité a décidé la suspension de M. X de ses fonctions pour une durée de six mois ; que, par un avis rendu le 12 décembre 2003, le conseil de discipline des praticiens hospitaliers s'est prononcé pour la mutation d'office de M. X ; que ce dernier interjette appel du jugement en date du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2004 du ministre chargé de la santé prononçant sa mutation d'office ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le juge administratif apprécie librement s'il y a lieu de surseoir à statuer en attendant la solution d'une instance pénale ; qu'ainsi, les premiers juges ont pu régulièrement statuer sans attendre l'aboutissement de la procédure pénale ouverte afin d'instruire la plainte déposée à l'encontre de M. X par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Mayenne ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité doit être écarté ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2004 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1421-1 du code de la santé publique : (...) les médecins inspecteurs de santé publique (...) contrôlent, dans le cadre de leurs compétences respectives, l'application des règles générales d'hygiène et des lois et règlements relatifs aux droits des personnes malades et des usagers du système de santé, (...) à la prévention des risques liés à certaines activités diagnostiques ou thérapeutiques, à la santé de la famille, de la mère et de l'enfant, à la lutte contre les maladies ou dépendances, aux professions de santé, aux produits de santé, ainsi qu'aux établissements de santé, laboratoires d'analyses de biologie médicale et autres services de santé. ; qu'aux termes de l'article L. 1421-3 du même code : Les agents mentionnés à l'article L. 1421-1 peuvent demander communication de tous documents nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, quel qu'en soit le support, et en prendre copie, prélever des échantillons, recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement ou toute justification nécessaire (...). Pour les opérations faisant appel à l'informatique, ils ont accès aux logiciels et aux données ; ils peuvent en demander la transcription par tout traitement approprié dans des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle. / Les agents ayant la qualité de médecin ont accès à toutes données médicales individuelles nécessaires à l'accomplissement de leurs missions dans le respect des dispositions de l'article 226-13 du code pénal. ; qu'aux termes de l'article 226-1 du code pénal : Est puni d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie d'autrui : 1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de l'enquête effectuée sur place le 17 décembre 2002 qui leur avait été confiée sur le comportement du docteur X dans l'exercice de ses fonctions, le médecin inspecteur de santé publique à la direction régionale des affaires sanitaires et sociales des Pays de la Loire et le médecin inspecteur de santé publique à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Mayenne ont écouté les enregistrements magnétiques correspondant aux trois incidents signalés par le docteur Y, responsable médical du pôle réanimation-déchocage du SAMU-SMUR du centre hospitalier de Laval ; que l'écoute de ces enregistrements a eu lieu dans la salle de régulation en présence notamment du docteur X ; que leur retranscription a été réalisée par le médecin inspecteur de santé publique à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Mayenne à partir d'une copie sur support magnétique transmise à sa demande par le docteur Y ; qu'eu égard au caractère professionnel des paroles enregistrées sur les bandes magnétiques en cause, leur audition par les médecins inspecteurs de santé publique ne constitue pas une écoute téléphonique au sens de l'article 226-1 du code pénal ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions précitées de l'article L. 1421-3 du code de la santé publique ne concernent pas les seuls échantillons soumis aux laboratoires ; que ces dispositions, dès lors qu'elles prévoient expressément que les agents ayant la qualité de médecin ont accès à toutes données médicales individuelles nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, n'imposaient pas la présence d'un membre du conseil de l'Ordre des médecins lors de l'écoute et de la retranscription des bandes magnétiques, nonobstant leur caractère de document couvert par le secret médical ; que, dans ces conditions, M. X n'est pas fondé à soutenir que les médecins inspecteurs de santé publique chargés de l'enquête en cause n'étaient pas habilités à écouter les passages des bandes magnétiques relatifs aux incidents portés à la connaissance de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Mayenne et à demander une copie desdits passages afin de procéder à leur retranscription par écrit dans le respect du secret médical ;

Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des télécommunications n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier la portée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que par une lettre du 19 juin 2003, le ministre chargé de la santé a informé M. X de sa décision d'ouvrir une procédure disciplinaire à son encontre et lui en a précisé les motifs ; que, dès lors que ceux-ci ont été communiqués en temps utile avant la séance du 12 décembre 2003 du conseil de discipline, le principe du contradictoire et le respect des droits de la défense n'ont pas été méconnus ;

Considérant, en quatrième lieu, que si le rapport de l'inspection générale des affaires sanitaires et sociales présenté devant le conseil de discipline mentionne que la responsabilité pénale ne peut être écartée a priori, la procédure disciplinaire est indépendante de la procédure pénale ; que la circonstance que ce même rapport fasse état de la sanction de réduction d'un an d'ancienneté infligée à M. X par un arrêté du 18 mai 1998, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité l'avis rendu par le conseil de discipline, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette mention, qui s'accompagne d'ailleurs de celle de l'annulation de la sanction en cause par un jugement du 3 mars 2000 du Tribunal administratif de Nantes, ait exercé une influence quelconque sur l'avis rendu ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 68 du décret du 24 février 1984 susvisé, alors en vigueur : Le conseil de discipline doit se prononcer dans le délai de quatre mois à compter du jour où il a été saisi, ce délai étant porté à six mois lorsqu'une enquête complémentaire est effectuée (...) ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions que le conseil de discipline doive rendre son avis, sous peine d'irrégularité, après l'expiration du délai de quatre mois ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 66 du décret du 24 février 1984 susvisé, alors en vigueur : Les sanctions disciplinaires applicables aux praticiens relevant du présent statut sont : 1. L'avertissement ; 2. Le blâme ; (...) 5. La mutation d'office ; 6. La révocation. L'avertissement et le blâme sont prononcés par le ministre chargé de la santé, après avis du préfet, du conseil d'administration et de la commission médicale d'établissement (...) / Les autres sanctions sont prononcées par décision motivée du ministre chargé de la santé après avis du conseil de discipline (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, lors des trois incidents graves survenus, aux mois d'octobre et novembre 2002, à l'occasion de l'exercice de l'activité de régulation du service d'assistance médicale d'urgence du centre hospitalier de Laval, M. X a méconnu les obligations qui lui incombaient tant à l'égard des patients et de leur famille qu'à celui des agents dudit service ; qu'un tel comportement, qui était susceptible de compromettre le bon fonctionnement de ce dernier, était de nature à justifier une sanction disciplinaire ; que la sanction de mutation d'office prononcée à l'encontre de M. X n'apparaît pas manifestement disproportionnée par rapport à la gravité des fautes qui lui sont reprochées ;

Considérant que, pour le surplus, M. X se borne à reproduire les moyens qu'il a invoqués devant le Tribunal administratif de Nantes ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, et tirés de ce que l'administration a été régulièrement informée des incidents ayant affecté le service de régulation du SAMU du centre hospitalier de Laval, que le président de la commission médicale d'établissement a pu régulièrement demander au ministre chargé de la santé l'ouverture d'une procédure disciplinaire à l'encontre du requérant et que le conseil de discipline n'était pas tenu de surseoir à statuer en raison de la procédure pénale en cours, d'écarter lesdits moyens ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de l'aboutissement de la procédure pénale ouverte afin d'instruire la plainte déposée à l'encontre de M. X, que celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Nöel X et au ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Une copie sera adressée au centre national de gestion des praticiens hospitaliers.

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N° 07NT01844

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 07NT01844
Date de la décision : 01/08/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. VILLAIN
Avocat(s) : MENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2008-08-01;07nt01844 ?
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