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23/07/2008 | FRANCE | N°05NT01827

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 23 juillet 2008, 05NT01827


Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2005, présentée pour la SOCIETE FRAMATEC, dont le siège est sis BP n° 1 à Dinoze (88000), représentée par son président, par Me Welzer, avocat au barreau d'Epinal ; la SOCIETE FRAMATEC demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-10 en date du 27 septembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Cherbourg à lui payer la somme de 207 376,87 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2002, au titre des travaux q

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Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2005, présentée pour la SOCIETE FRAMATEC, dont le siège est sis BP n° 1 à Dinoze (88000), représentée par son président, par Me Welzer, avocat au barreau d'Epinal ; la SOCIETE FRAMATEC demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-10 en date du 27 septembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Cherbourg à lui payer la somme de 207 376,87 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2002, au titre des travaux qu'elle a effectués dans le cadre de la réhabilitation des bâtiments de l'ancienne gare maritime de Cherbourg ;

2°) de condamner la communauté urbaine de Cherbourg à lui verser ladite somme, majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2002 ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner qu'il soit précédé avant-dire-droit à une expertise sur les lieux afin de déterminer la nature et l'importance des travaux qu'elle a effectués ainsi que d'en évaluer le prix et de condamner la communauté urbaine de Cherbourg à lui verser la somme de 150 000 euros à titre de provision à valoir sur les montants qu'elle réclame ;

4°) de condamner la communauté urbaine de Cherbourg à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 février 2008 :

- le rapport de M. Faessel, rapporteur ;

- les observations de Me Duval, avocat de la communauté urbaine de Cherbourg ;

- et les conclusions de M. Villain, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, dans le cadre des travaux de réhabilitation de l'ancienne gare maritime, la communauté urbaine de Cherbourg a, par actes d'engagement signés les 26 juillet 1999 et 23 avril 2001, confié à la société Toile et Structures l'exécution des lots n° 5 toiles tendues et n° 16 ventelles ; que par actes spéciaux annexés auxdits actes d'engagement, elle a agréé la SOCIETE FRAMATEC en qualité de sous-traitante de la société Toile et Structures, pour une partie des travaux correspondant à chacun de ces lots ; que la SOCIETE FRAMATEC interjette appel du jugement en date du 27 septembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Cherbourg à lui payer la somme de 207 376,87 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2002 au titre des travaux qu'elle estime avoir été contrainte d'effectuer en sus de ceux prévus par les contrats de sous-traitance ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975 susvisée relative à la sous-traitance : Le sous-traitant qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution (...) ; qu'aux termes de l'article 8 de cette même loi : L'entrepreneur principal dispose d'un délai de quinze jours, comptés à partir de la réception des pièces justificatives servant de base au paiement direct, pour les revêtir de son acceptation ou pour signifier au sous-traitant son refus motivé d'acceptation. / Passé ce délai, l'entrepreneur principal est réputé avoir accepté celles des pièces justificatives ou des parties de pièces justificatives qu'il n'a pas expressément acceptées ou refusées (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 186 ter du code des marchés publics dans sa rédaction alors en vigueur, rendu applicable aux marchés conclus par les collectivités territoriales et leurs établissements publics par l'article 356 du même code : Au vu des pièces justificatives fournies par le sous-traitant et revêtues de l'acceptation du titulaire du marché, l'ordonnateur mandate les sommes dues au sous-traitant et, le cas échéant, envoie à ce dernier l'autorisation définie au I de l'article 178 bis. / Dès réception de ces pièces, l'administration avise le sous-traitant de la date de réception de la demande de paiement envoyée par le titulaire et lui indique les sommes dont le paiement à son profit a été accepté par ce dernier. / Dans le cas où le titulaire d'un marché n'a ni opposé un refus motivé à la demande de paiement du sous-traitant dans le délai de quinze jours suivant sa réception, ni transmis celle-ci à l'administration, le sous-traitant envoie directement sa demande de paiement à l'administration par lettre recommandée avec avis de réception postal ou la lui remet contre récépissé dûment daté et inscrit sur un registre tenu à cet effet. / L'administration met aussitôt en demeure le titulaire, par lettre recommandée avec avis de réception postal, de lui faire la preuve, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre, qu'il a opposé un refus motivé à son sous-traitant. Dès réception de l'avis, elle informe le sous-traitant de la date de cette mise en demeure. / A l'expiration de ce délai, au cas où le titulaire ne serait pas en mesure d'apporter cette preuve, l'administration contractante dispose du délai prévu au I de l'article 178 pour mandater les sommes dues aux sous-traitants à due concurrence des sommes restant dues au titulaire ou du délai prévu au I de l'article 178 bis pour envoyer au sous-traitant l'autorisation d'émettre une lettre de change-relevé à due concurrence des sommes restant dues au titulaire ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, d'une part, que lorsque l'entrepreneur principal, titulaire du marché, n'a pas, dans le délai de quinze jours fixé par les dispositions précitées de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975, formulé d'opposition au paiement du sous-traitant par l'administration contractante, celle-ci ne peut légalement refuser d'y procéder au seul motif que le titulaire aurait, ultérieurement, refusé de donner son acceptation et, d'autre part, que la transmission au titulaire du marché, par l'administration contractante, de la demande de paiement direct que lui a adressée l'entreprise sous-traitante lorsque le titulaire du marché n'a pas répondu à celle-ci dans le délai de quinze jours susévoqué, n'a pas pour effet d'ouvrir un nouveau délai au cours duquel le titulaire du marché serait en droit de s'opposer audit paiement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par une lettre recommandée du 12 février 2002, distribuée le 14 février 2002, la SOCIETE FRAMATEC a soumis pour acceptation à la société Toile et Structures une demande de paiement direct pour des travaux supplémentaires qu'elle prétend avoir effectués ; que, sans réponse de cette dernière société, elle a adressé, le 20 mars 2002, une nouvelle lettre recommandée, remise à la société Toile et Structures le 22 mars de la même année, réitérant sa demande ; que celle-ci ayant à nouveau gardé le silence, la SOCIETE FRAMATEC a demandé à la communauté urbaine de Cherbourg de procéder au paiement des sommes réclamées, par une lettre recommandée du 23 septembre 2002 dont l'avis de réception postal porte la date du 26 septembre 2002 ;

Considérant que si, par une lettre du 16 septembre 2002, la société Toile et Structures a refusé d'accepter la facture d'un montant de 207 376,87 euros TTC que lui avait adressée la SOCIETE FRAMATEC, ce refus ne pouvait être regardé comme constituant l'opposition de l'entrepreneur principal au paiement direct de son sous-traitant prévue à l'article 8 précité de la loi du 31 décembre 1975 dès lors que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société Toile et Structures, qui n'avait pas répondu dans le délai de quinze jours compté à partir de la réception de la demande de paiement du 12 février 2002 de la SOCIETE FRAMATEC, devait être réputée avoir accepté cette demande ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la communauté urbaine de Cherbourg, qui était en possession d'une copie de la lettre du 16 septembre 2002 lorsqu'elle a été saisie de la demande de paiement du 23 septembre 2002 de la SOCIETE FRAMATEC, pouvait se fonder sur cette lettre pour refuser de procéder au paiement direct sollicité par cette dernière société ;

Considérant qu'à supposer même que les actes spéciaux par lesquels les conditions de paiement de la SOCIETE FRAMATEC ont été agréées par la communauté urbaine de Cherbourg aient rendu opposables à cette société les stipulations du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, ces stipulations ne pouvaient, en tout état de cause, en ce qui concerne la présentation des demandes de paiement direct, avoir légalement pour effet de déroger aux dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1975 et du code des marchés publics ; que, par suite, la communauté urbaine de Cherbourg n'est pas fondée à soutenir que la demande de paiement de la SOCIETE FRAMATEC était irrecevable au motif qu'elle n'aurait pas été présentée selon les formes prescrites par les stipulations de l'article 13-54 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Considérant que la communauté urbaine de Cherbourg ne saurait se prévaloir à l'encontre de la SOCIETE FRAMATEC de ce que les décomptes généraux relatifs aux marchés litigieux seraient à présent devenus définitifs, dès lors qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par les parties, que la demande de paiement direct lui est parvenue avant l'établissement desdits décomptes et le règlement à la société Toile et Structures des sommes dues à celle-ci au titre desdits marchés ;

Considérant, enfin, que le sous-traitant bénéficiant du paiement direct des prestations sous-traitées a également droit à ce paiement direct pour les travaux supplémentaires qu'il a exécutés et qui ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage ainsi que pour les dépenses résultant pour lui de sujétions imprévues qui ont bouleversé l'économie générale du marché, dans les mêmes conditions que pour les travaux dont la sous-traitance a été expressément mentionnée dans le marché ou dans l'acte spécial signé par l'entrepreneur principal et par le maître de l'ouvrage ; que, toutefois, l'état du dossier ne permet pas à la Cour de statuer en toute connaissance de cause sur la requête de la SOCIETE FRAMATEC ; qu'il y a lieu, par suite, avant de statuer sur les conclusions présentées par cette société, d'ordonner une expertise aux fins de déterminer, en premier lieu, la nature et l'importance des travaux effectués par la SOCIETE FRAMATEC en sus de ceux décrits par les contrats de sous-traitance ainsi que les conditions dans lesquelles elle a dû exécuter ceux-ci à l'occasion du déroulement du chantier, en second lieu, d'évaluer le montant desdits travaux et dépenses supplémentaires que la SOCIETE FRAMATEC était susceptible de faire valoir au titre du paiement direct ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, et en tout état de cause, il n'y a pas lieu d'accueillir la demande présentée par la SOCIETE FRAMATEC tendant à ce que la Cour condamne la communauté urbaine de Cherbourg à lui verser une provision à valoir sur le prix des travaux supplémentaires qu'elle soutient avoir effectués ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé n° 03-10 du 27 septembre 2005 du Tribunal administratif de Caen est annulé.

Article 2 : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la SOCIETE FRAMATEC tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Cherbourg au paiement de la somme qu'elle réclame, procédé à une expertise en vue de déterminer, en premier lieu, la nature et l'importance des travaux effectués par la SOCIETE FRAMATEC en sus de ceux décrits par les contrats de sous-traitance ainsi que les conditions dans lesquelles elle a dû exécuter ceux-ci à l'occasion du déroulement du chantier, en second lieu, d'évaluer le montant desdits travaux et dépenses supplémentaires que la SOCIETE FRAMATEC était susceptible de faire valoir au titre du paiement direct. Pour ce faire, l'expert prendra connaissance des pièces des marchés, se fera communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission, se rendra sur les lieux en présence des parties et de leurs conseils, ou de ceux-ci dûment appelés, et pourra entendre tous sachants. Il pourra, en tant que de besoin, se faire assister d'un sapiteur après y avoir été autorisé par le président de la Cour auprès duquel il devra justifier de sa demande.

Article 3 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 et R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la requête de la SOCIETE FRAMATEC tendant à ce que la communauté urbaine de Cherbourg soit condamnée à lui payer une provision à valoir sur le montant de la somme qu'elle réclame sont rejetées.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE FRAMATEC, à la communauté urbaine de Cherbourg et à la société Toile et Structures.

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N° 05NT01827

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01827
Date de la décision : 23/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: M. Xavier FAESSEL
Rapporteur public ?: M. VILLAIN
Avocat(s) : DUVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2008-07-23;05nt01827 ?
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