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16/11/2007 | FRANCE | N°07NT01057

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 16 novembre 2007, 07NT01057


Vu la requête, enregistrée le 27 avril 2007, présentée pour la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE, représentée par son président en exercice, par Me Dano, avocat au barreau de Brest ; la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 03-1091 et 04-1312 du 1er mars 2007 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Sodeg Ingénierie à lui payer la somme de 301 674,49 euros TTC en réparation des désordres affectant les installations d'alimenta

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Vu la requête, enregistrée le 27 avril 2007, présentée pour la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE, représentée par son président en exercice, par Me Dano, avocat au barreau de Brest ; la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 03-1091 et 04-1312 du 1er mars 2007 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Sodeg Ingénierie à lui payer la somme de 301 674,49 euros TTC en réparation des désordres affectant les installations d'alimentation électrique des pompes d'eau de mer alimentant les aquariums du complexe dénommé Océanopolis ;

2°) de condamner la société Sodeg Ingénierie à lui payer la somme de 301 674,49 euros TTC, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date du dépôt du rapport de l'expert, ces intérêts portant eux-mêmes intérêts à compter du 22 décembre 2004 ;

3°) de condamner la société Sodeg Ingénierie aux dépens et notamment à lui rembourser les frais et honoraires de l'expert désigné par le président du Tribunal administratif de Rennes ;

4°) de condamner la société Sodeg Ingénierie à lui payer la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2007 :

- le rapport de M. Faessel, rapporteur ;

- les observations de Me Dano, avocat de la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE ;

- les observations de Me Muller substituant Me Hallouet, avocat de la société Suburdaine de Canalisations et de Grands Travaux ;

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que dans le cadre d'un projet de réaménagement d'une partie des installations du complexe muséographique dénommé Oéanopolis, la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST, devenue BREST METROPOLE OCEANE, a confié aux sociétés Suburbaine de Canalisations et de Grands Travaux et Le Du Industrie, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Sodeg Ingénierie, la rénovation partielle, la protection et le repérage des câbles électriques alimentant les pompes prélevant en mer l'eau destinée aux aquariums ; que des désordres ont été constatés sur ces équipements ; que la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE interjette appel du jugement du 1er mars 2007 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Sodeg Ingénierie au paiement, sous déduction de la provision déjà versée, de la somme de 301 674,49 euros TTC en réparation desdits désordres ;

Considérant que si la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE avait, à titre principal, fondé sa demande sur les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, elle avait aussi, à titre subsidiaire et de manière suffisamment précise pour permettre au tribunal administratif de se prononcer sur le bien-fondé de ses prétentions, fait état de la responsabilité contractuelle des maîtres d'oeuvre ; que par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la demande présentée par la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE était imprécise et qu'elle devait dès lors être rejetée ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les conclusions présentées par la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE devant le Tribunal administratif de Rennes ;

Sur la responsabilité du maître d'oeuvre :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions de l'expert désigné par le président du Tribunal administratif de Rennes, que les désordres à l'origine du présent litige consistent principalement, en ce qui concerne les 100 premiers mètres de longueur de l'installation, en un enchevêtrement de canalisations, de câbles électriques, neufs ou anciens, l'ensemble étant non enfoui et flottant entre deux eaux et, en ce qui concerne les 250 mètres suivants, en l'émergence ponctuelle des câbles qui sont simplement posés sur le fond et enfin, pour l'ensemble du dispositif, en un défaut d'identification et de protection des câbles ; qu'il est également établi que ces désordres étaient apparents lors de la réception définitive de l'ouvrage, le 12 mars 2002 ; que par suite, la responsabilité des constructeurs ne pouvait pas être engagée sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que d'ailleurs, devant la Cour, la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE a expressément renoncé à se prévaloir de ce fondement ;

Considérant toutefois qu'il résulte également de l'instruction que le marché passé avec les entreprises chargées d'effectuer les travaux de réaménagement du complexe muséographique prévoyait expressément le remblaiement, après l'installation d'un grillage de protection, de la fouille dans laquelle devaient être disposés les câbles d'alimentation électrique des pompes des aquariums ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'absence de comblement de la fouille tout comme les défauts de repérage, de protection et d'immobilisation des câbles étaient apparents sur la totalité de la longueur de l'ouvrage lors de la réception des travaux, laquelle a été prononcée sans réserves le 12 mars 2002 par la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST ; que la société Sodeg Ingénierie qui devait assumer la responsabilité de maître d'oeuvre et notamment celle du bon déroulement des opérations préalables à la réception des travaux, doit dès lors être regardée comme ayant commis une faute en négligeant d'appeler l'attention du maître de l'ouvrage sur ces défectuosités ; que cette responsabilité contractuelle reste engagée alors même que la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, prononcé la réception des travaux et que la responsabilité contractuelle des autres constructeurs ne peut plus, pour cette raison, être mise en cause ;

Considérant que la circonstance, à la supposer établie, que les câbles d'alimentation électrique aient pu être accrochés par des navires de passage, est sans incidence sur la consistance et l'étendue des désordres dont il est demandé réparation, lesquels résultent exclusivement d'une inexécution partielle du marché ; que l'imprudence, alléguée par la société Sodeg Ingénierie, de la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST qui n'aurait pas demandé que soit établie une réglementation particulière de la navigation aux abords de l'ouvrage ne peut dès lors être de nature à atténuer la responsabilité du maître d'oeuvre ;

Considérant ainsi que la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE est fondée à demander que la société Sodeg Ingénierie soit condamnée à l'indemniser de la totalité du préjudice résultant des désordres constatés ;

Sur le préjudice :

Considérant, en premier lieu, que si la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE est en droit d'obtenir la réparation des désordres litigieux, elle ne saurait prétendre, à cette occasion, être indemnisée pour la réalisation d'un ouvrage différent de celui faisant l'objet du marché initial et d'un prix plus élevé que celui prévu par ce dernier ;

Considérant, en deuxième lieu, que le coût des travaux de réparation des désordres affectant l'installation en cause a été évalué par l'expert à la somme non contestée, compte tenu des travaux envisagés, de 79 766,50 euros HT ;

Considérant, en troisième lieu, que le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation à raison des désordres affectant l'ouvrage correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a perçue à raison de ses propres opérations ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du code général des impôts : Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ; que la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE n'établit pas qu'elle ne peut déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant les travaux de réfection de l'équipement réalisé ; que par suite, elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander que la condamnation de la société Sodeg Ingénierie soit majorée du montant de cette taxe ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la société Sodeg Ingénierie à verser à la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE, sous réserve de la déduction de la somme de 10 800 euros déjà payée à titre de provision, la somme totale de 79 766,50 euros HT ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant, d'une part, que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine et ce, jusqu'au paiement du principal ; que par suite, la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE a droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 79 766,50 euros à compter non, contrairement à ce qu'elle soutient, du 22 décembre 2003, date à laquelle l'expert nommé par le président du tribunal administratif a déposé son rapport, mais du 20 avril 2004, date de l'enregistrement de sa demande devant le Tribunal administratif de Rennes ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, pour l'application des dispositions précitées, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE a demandé par un mémoire du 7 septembre 2006 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date que, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que cette communauté urbaine n'a pas ensuite formulé de nouvelles demandes de capitalisation, à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre la moitié des frais de l'expertise ordonnée en référé, liquidés et taxés à la somme de 20 060,59 euros, à la charge de la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE et l'autre moitié à la charge de la société Sodeg Ingénierie ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du 1er mars 2007 du Tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST tendant à la condamnation de la société Sodeg Ingénierie au versement d'une indemnité.

Article 2 : La société Sodeg Ingénierie est condamnée à verser à la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE, sous réserve de la déduction de la provision déjà versée, la somme totale de 79 766,50 euros HT. Cette somme, sous la même réserve relative à la provision, portera intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2004. Les intérêts échus à la date du 7 septembre 2006 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Les frais de l'expertise ordonnée en référé sont mis à la charge de la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST à concurrence de 50 % de la somme de 20 060,59 euros et à la charge de la société Sodeg Ingénierie à concurrence de l'autre moitié de cette somme.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNAUTE URBAINE BREST METROPOLE OCEANE, à la société Sodeg Ingénierie, à la société Suburdaine de Canalisations et de Grands Travaux et à la société Le Du Industrie.

Une copie sera adressée à la SEMAEB et à la SOPAB.

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N° 07NT01057

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 07NT01057
Date de la décision : 16/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: M. Xavier FAESSEL
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : HALLOUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-11-16;07nt01057 ?
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