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06/03/2007 | FRANCE | N°06NT00057

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 06 mars 2007, 06NT00057


Vu la requête enregistrée le 11 janvier 2006, présentée pour la COMMUNE DE PORT-BAIL, représentée par son maire en exercice, par Me Auger, avocat au barreau de Caen ; la COMMUNE DE PORT-BAIL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1620 du 17 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de la société civile immobilière (SCI) Chopin-Leturc, la délibération du 29 juin 2004 par laquelle le conseil municipal de Port-Bail (Manche) a exercé le droit de préemption urbain de la commune sur le site du Domaine des Pins ;

) de rejeter la demande présentée par la SCI Chopin-Leturc devant le Tribunal ...

Vu la requête enregistrée le 11 janvier 2006, présentée pour la COMMUNE DE PORT-BAIL, représentée par son maire en exercice, par Me Auger, avocat au barreau de Caen ; la COMMUNE DE PORT-BAIL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1620 du 17 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de la société civile immobilière (SCI) Chopin-Leturc, la délibération du 29 juin 2004 par laquelle le conseil municipal de Port-Bail (Manche) a exercé le droit de préemption urbain de la commune sur le site du Domaine des Pins ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Chopin-Leturc devant le Tribunal administratif de Caen ;

3°) de condamner la SCI Chopin-Leturc et la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2007 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- les observations de Me Debuys, substituant Me Auger, avocat de la COMMUNE DE PORT-BAIL ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 17 novembre 2005, le Tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de la société civile immobilière (SCI) Chopin-Leturc, la délibération du 29 juin 2004 par laquelle le conseil municipal de Port-Bail (Manche) a exercé le droit de préemption urbain de la commune sur le site du Domaine des Pins, appartenant à la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye et que ladite société souhaitait acquérir ; que la COMMUNE DE PORT-BAIL interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la délibération litigieuse :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme : “La délibération par laquelle le conseil municipal (…) décide, en application de l'article L. 211-1, d'instituer ou de supprimer le droit de préemption urbain ou d'en modifier le champ d'application, est affichée en mairie pendant un mois. Mention en est insérée dans deux journaux diffusés dans le département. Les effets juridiques attachés à la délibération mentionnée au premier alinéa ont pour point de départ l'exécution de l'ensemble des formalités de publicité mentionnées audit alinéa. Pour l'application du présent aliéna, la date à prendre en considération pour l'affichage en mairie est celle du premier jour où il est effectué” ;

Considérant que pour annuler la délibération du 29 juin 2004 par laquelle le conseil municipal de Port-Bail a exercé le droit de préemption urbain de la commune, le tribunal administratif a estimé que cette délibération était dépourvue de base légale, dès lors qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la délibération du 25 mars 1997 instituant ledit droit de préemption urbain avait été affichée en mairie, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme ; qu'il ressort, cependant, de l'extrait du registre des délibérations du conseil municipal, dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, que la délibération du 25 mars 1997 a été affichée en mairie le 1er avril 1997 ; que mention de ladite délibération a, en outre, été insérée dans les journaux Ouest France et Presse de la Manche, ainsi que l'établissent deux factures des 13 mai et 15 mai 1997 ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la délibération du 25 mars 1997 n'avait pas produit d'effets juridiques de sorte que la délibération du 29 juin 2004 était dépourvue de base légale ;

Considérant, toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la SCI Chopin-Leturc et par la caisse des écoles de Saint-Germain-en-Laye devant le tribunal administratif ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 213-7 du code de l'urbanisme : “Le silence gardé par le titulaire du droit de préemption dans le délai de deux mois qui lui est imparti par l'article L. 213-2 vaut renonciation à l'exercice de ce droit de préemption. Ce délai court à compter de la date de l'avis de réception ou de la décharge de la déclaration faite en application de l'article R. 213-5” ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'alors que la déclaration d'intention d'aliéner, visée à l'article R. 213-5 du code de l'urbanisme, a été reçue par la COMMUNE DE PORT-BAIL le 9 mai 2004, la délibération contestée a été notifiée à la ville de Saint-Germain-en-Laye le 7 juillet 2004 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit avant l'expiration du délai de deux mois, dont disposait la commune, pour exercer le droit de préemption ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la délibération contestée n'aurait pas fait l'objet d'un affichage régulier est sans incidence sur sa légalité ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : “Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (…)” ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : “Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels” ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain, d'autre part, qu'elles doivent définir ce projet de manière précise dans la décision de préemption ;

Considérant que la ville de Saint-Germain-en-Laye a, en juillet 2003, fait savoir à la COMMUNE DE PORT-BAIL qu'elle n'entendait plus maintenir le centre de vacances dont elle disposait sur le site “Domaine des Pins”, lequel d'une superficie de plus de 5 hectares est situé en front de mer à proximité immédiate de la zone d'aménagement du port de plaisance ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commune justifie qu'elle disposait alors d'un projet d'aménagement précis, visant à transformer, après travaux, le domaine des Pins en un centre de thalasso ou balnéo-thérapie et qu'elle avait confié à une société privée, par délibération du 22 juin 2004, le soin d'établir une étude de faisabilité sur la réalisation de ce projet et la valorisation du site ; que, la délibération du 29 juin 2004 contestée par laquelle le conseil municipal de Port-Bail a exercé le droit de préemption urbain de la commune sur le “Domaine des Pins”, mentionne conformément au plan local d'urbanisme révisé, la nécessité de procéder, dans l'intérêt général, à l'aménagement de ce domaine pour favoriser l'économie liée aux activités de tourisme et de loisirs ; que cette délibération mentionne également que, compte-tenu de son emplacement en bordure de mer, l'immeuble en cause est particulièrement adapté à la création d'un centre de thalasso ou de balnéo-thérapie ; que, par suite, ladite délibération, qui définit de façon suffisamment précise, l'opération en vue de laquelle est exercé le droit de préemption urbain, satisfait aux exigences énoncées par les dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE PORT-BAIL est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du 29 juin 2004 par laquelle le conseil municipal de Port-Bail a exercé son droit de préemption urbain sur le site du Domaine des Pins ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la COMMUNE DE PORT-BAIL, qui n'est pas la partie perdante dans la présente, le versement de la somme que demandent la SCI Chopin-Leturc et la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la SCI Chopin-Leturc et la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye à verser à la COMMUNE DE PORT-BAIL une somme de 1 500 euros, chacune, au titre des frais de même nature exposés par cette dernière ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 17 novembre 2005 du Tribunal administratif de Caen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SCI Chopin-Leturc devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : La SCI Chopin-Leturc et la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye verseront, chacune, une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à la COMMUNE DE PORT-BAIL au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la SCI Chopin-Leturc et de la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE PORT-BAIL (Manche), à la société civile immobilière Chopin-Leturc, à la caisse des écoles de la ville de Saint-Germain-en-Laye et à la ville de Saint-Germain-en-Laye (Yvelines).

Une copie en sera, en outre, adressée au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 06NT00057

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NT00057
Date de la décision : 06/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : AUGER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-03-06;06nt00057 ?
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