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06/02/2007 | FRANCE | N°06NT00587

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 06 février 2007, 06NT00587


Vu la requête enregistrée le 16 mars 2006, présentée pour M. et Mme X demeurant ..., par Me Pittard, avocat au barreau de Nantes ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103434 du 17 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à ce que la commune de Dangeau (Eure-et-Loir) soit condamnée à leur verser la somme de 481 651,06 euros en réparation du préjudice résultant de fautes commises par le maire de cette commune dans l'exercice de ses pouvoirs de police ;

2°) de condamner la commune de Dangeau

à leur verser la somme de 481 651,06 euros en réparation de leur préjudice...

Vu la requête enregistrée le 16 mars 2006, présentée pour M. et Mme X demeurant ..., par Me Pittard, avocat au barreau de Nantes ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103434 du 17 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à ce que la commune de Dangeau (Eure-et-Loir) soit condamnée à leur verser la somme de 481 651,06 euros en réparation du préjudice résultant de fautes commises par le maire de cette commune dans l'exercice de ses pouvoirs de police ;

2°) de condamner la commune de Dangeau à leur verser la somme de 481 651,06 euros en réparation de leur préjudice ;

3°) de condamner ladite commune à leur verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code des communes ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2007 :

- le rapport de M. François, rapporteur ;

- les observations de Me Maudet, substituant Me Pittard, avocat de M. et Mme X ;

- les observations de Me Casadeï, avocat de la commune de Dangeau ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. et Mme X, qui exploitent à Dangeau (Eure-et-Loir) un restaurant de quarante-cinq places dans un bâtiment édifié à la fin du XVème siècle, interjettent appel du jugement du 17 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la condamnation de ladite commune à leur verser la somme de 481 651,06 euros, en réparation de la faute résultant de l'édiction par le maire, d'une part, d'un arrêté du 20 décembre 1995 prescrivant la mise en place, devant leur établissement, de barrières de sécurité dont l'enlèvement n'a été autorisé que le 1er août 1996, d'autre part, d'une décision du 3 octobre 1996 ordonnant la fermeture provisoire dudit restaurant, à laquelle il n'a été mis fin qu'à partir du 14 décembre 1996 ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 131-2 du code des communes alors en vigueur, dorénavant repris à l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : “La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1. Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices menaçant ruine, l'interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants (…)” ;

En ce qui concerne la pose de barrières de sécurité ordonnée par arrêté du 20 décembre 1995 du maire de Dangeau :

Considérant, en premier lieu, que la commission de sécurité de l'arrondissement de Châteaudun a relevé, dans son procès-verbal établi le 19 décembre 1995 à la suite de deux visites des lieux, que dans l'attente de l'examen de l'état du bâtiment par un architecte, il était nécessaire d'empêcher le passage des piétons aux abords du restaurant exploité par les époux X, eu égard au mauvais état apparent de la couverture et de la charpente et au risque potentiel important de chute de matériaux ou d'effondrement des cheminées ; que, dans ces circonstances où lui était signalée l'existence d'un risque pour la sécurité des passants, c'est à bon droit que le maire de Dangeau a fait usage de ses pouvoirs de police, en prescrivant, par son arrêté du 20 décembre 1995, l'installation de barrières de sécurité au droit du bâtiment concerné ;

Considérant, en second lieu, que si l'architecte missionné par M. et Mme X a relativisé, dans un rapport du 8 janvier 1996, le risque de chute de tuiles sur la voie publique, l'architecte délégué par la commune a, au contraire, estimé important un tel risque dans son rapport du 11 janvier 1996, ajoutant que les enduits et des éléments des cheminées risquaient également de tomber sur la voie publique, de même que certains éléments de corniche ; que, d'ailleurs, lors d'une réunion contradictoire organisée par le maire le 24 janvier 1996, les requérants se sont engagés à procéder dans un délai d'un mois à l'enlèvement des éléments les plus menaçants et à l'installation d'un dispositif de protection ; qu'à la suite de travaux réalisés par M. X lui-même, l'architecte de la commune et un ingénieur en structures ont conclu, le 10 mai 1996, à un risque important d'effondrement de la toiture, malgré l'avis contraire de l'architecte des requérants ; que le maire a mis les intéressés en demeure, le 27 juin 1996, de prendre toutes dispositions de nature à assurer une protection efficace des passants sur la voie publique ; qu'au vu des travaux de sécurité finalement réalisés, le maire a prescrit, le 1er août 1996, l'enlèvement des barrières ; que, dans ces conditions, il ne peut être reproché à l'autorité municipale de ne pas avoir ordonné plus tôt une telle mesure ; que, par suite, le maire n'a commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

En ce qui concerne la fermeture provisoire de l'établissement prononcée par décision municipale du 3 octobre 1996 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-52 du code de la construction et de l'habitation : “Sans préjudice de l'exercice par les autorités de police de leurs pouvoirs généraux, la fermeture des établissements exploités en infraction aux dispositions du présent chapitre peut être ordonnée par le maire (…) dans les conditions fixées aux articles R. 123-27 et R. 123-28. La décision est prise par arrêté après avis de la commission de sécurité compétente. L'arrêté fixe, le cas échéant, la nature des aménagements et travaux à réaliser ainsi que les délais d'exécution” ;

Considérant que par lettre du 27 novembre 1995, le sous-préfet de Châteaudun a demandé à M. et Mme X de prendre l'attache d'un architecte afin d'expertiser les désordres susceptibles d'affecter la stabilité et la solidité de leur établissement ; que la commission de sécurité sus-désignée à émis le 12 février 1996 un avis défavorable à l'exploitation dudit établissement, qu'elle a réitéré le 13 juin 1996 dans l'attente de l'expertise d'un bureau de contrôle technique que les intéressés s'étaient engagés à contacter ; que dans leur rapport précité du 10 mai 1996, l'architecte et l'ingénieur requis par la commune ont mentionné des structures de plancher sans appui, laissées en position d'équilibre totalement instable, et noté l'état de délabrement extrême des ouvrages de charpente et de couverture, menaçant en de nombreux points de s'effondrer ; qu'au vu de leur rapport et de l'avis de la commission, le maire a mis en demeure M. X, le 27 juin 1996, de produire avant le 1er octobre suivant une expertise garantissant la stabilité et la solidité du bâtiment, et lui a rappelé cette injonction le 23 septembre suivant ; que si les requérants ont alors pris contact avec un bureau d'études spécialisé, ils n'ont pas donné suite à cette démarche, contrairement à ce qu'ils soutiennent ; qu'à défaut de production du rapport demandé, le maire a ordonné, par décision du 3 octobre 1996, la fermeture provisoire de l'établissement ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, le maire de Dangeau, au vu des pièces précises dont il disposait, émanant tant de spécialistes que de l'administration, et eu égard à la carence de M. et Mme X à produire une expertise complémentaire destinée à mesurer tout risque d'effondrement de leur bâtiment, n'a pas commis de faute susceptible d'engager la responsabilité de la commune de Dangeau en exerçant ses pouvoirs de police pour prononcer la fermeture provisoire de leur restaurant ; qu'eu égard à la situation d'incertitude entretenue par le silence des requérants, cette mesure a pu être maintenue jusqu'au 14 décembre 1996, date de notification du rapport d'expertise concluant à l'absence de risque à l'intérieur du restaurant, déposé le 12 décembre 1996 devant le Tribunal administratif d'Orléans, en exécution d'une ordonnance du juge des référés dudit tribunal ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande d'indemnité ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Dangeau, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser aux époux X la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner M. et Mme X à verser à la commune de Dangeau une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : M. et Mme X verseront à la commune de Dangeau une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X et à la commune de Dangeau (Eure-et-Loir).

Une copie en sera, en outre, adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

N° 06NT00587

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NT00587
Date de la décision : 06/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : PITTARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-02-06;06nt00587 ?
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