La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/12/2006 | FRANCE | N°04NT00643

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 décembre 2006, 04NT00643


Vu la requête enregistrée le 1er juin 2004, présentée pour l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan”, représentée par son président en exercice, dont le siège est rue de la Chapelle à Baden (56870), par Me Le Cornec, avocat au barreau de Quimper ; l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9900476 du 25 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 décembre 1998 du maire de Baden (Morbihan) de ne pas s'

opposer aux travaux de création d'une cale et d'agrandissement d'un bassin os...

Vu la requête enregistrée le 1er juin 2004, présentée pour l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan”, représentée par son président en exercice, dont le siège est rue de la Chapelle à Baden (56870), par Me Le Cornec, avocat au barreau de Quimper ; l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9900476 du 25 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 décembre 1998 du maire de Baden (Morbihan) de ne pas s'opposer aux travaux de création d'une cale et d'agrandissement d'un bassin ostréicole déclarés par MM. Jean-Claude et Yvan X ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de condamner la commune de Baden et MM. X à lui verser, chacun, la somme de 1 608,84 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 ;

Vu le décret n° 85-542 du 23 avril 1985 ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2006 :

- le rapport de M. François, rapporteur ;

- les observations de Me Gourdin, substituant Me Martin, avocat de la commune de Baden ;

- les observations de Me Le Coq, substituant Me Page, avocat de MM. X et de la SNC “Anse de Toulvern” ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 25 mars 2004, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” tendant à l'annulation de la décision du 15 décembre 1998 par laquelle le maire de Baden ne s'est pas opposé aux travaux de création d'une cale et d'agrandissement d'un bassin ostréicole au lieudit “Pointe de Toulvern”, déclarés par MM. Jean-Claude et Yvan X ; que l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” interjette appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'alors même que le délai de cinq ans et un mois qui s'est écoulé entre l'enregistrement, le 25 février 1999, de la demande l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” au greffe du tribunal administratif et le prononcé du jugement attaqué, puisse être regardé comme ayant le caractère d'un délai anormalement long au regard de l'exigence posée par l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité le jugement intervenu à l'issue de l'instruction de ladite demande ;

Considérant, en deuxième lieu, que le jugement attaqué cite les règles du plan d'occupation des sols de la commune de Baden applicables à la zone NDs, ainsi que les dispositions du code de l'urbanisme qui en constituent le fondement ; qu'il a, ainsi, implicitement mais nécessairement, estimé que lesdites règles du plan d'occupation des sols étaient compatibles avec les dispositions réglementaires de ce code ; qu'il suit de là que le jugement n'est pas entaché d'omission à statuer sur le moyen tiré de la violation du plan d'occupation des sols ;

Considérant, en troisième lieu, que le jugement critiqué mentionne expressément que le titre d'occupation domaniale était joint au dossier déposé à l'appui de la déclaration de travaux et qu'il a répondu, pour l'écarter, au moyen tiré de la violation de l'article R. 146-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant, enfin, qu'en énonçant que le calcul de la surface de l'installation ostréicole effectué par les pétitionnaires n'est pas sérieusement contredit au regard des plans produits par l'association requérante à l'appui de ses assertions, le Tribunal a suffisamment motivé son jugement sur ce point ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient l'association requérante, le jugement attaqué n'est pas entaché des irrégularités qu'elle invoque ;

Sur la légalité de la décision du 15 décembre 1998 du maire de Baden :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme : “Sont exemptés du permis de construire sur l'ensemble du territoire : (…) m) Les constructions ou travaux non prévus aux a à l ci-dessus, n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et : - qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle ; - ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carrés (…)” ;

Considérant que la circonstance qu'une chape en béton recouvrirait le fond du bassin ostréicole, ne saurait entraîner la création d'une surface de plancher dans le cas d'un aménagement constitué, comme en l'espèce, de murets recouverts par la mer au gré des marées ; que, de même, la construction d'une cale d'accès audit bassin ne saurait entraîner la création d'une surface de plancher au sens des dispositions précitées de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que les travaux déclarés relevaient du régime du permis de construire doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 422-3 du code de l'urbanisme : “(…) La déclaration précise l'identité du déclarant, la situation et la superficie du terrain (…) la nature et la destination des travaux (…). Le dossier joint à la déclaration comprend un plan de situation du terrain, un plan de masse et une représentation de l'aspect extérieur de la construction, faisant apparaître les modifications projetées (…).” ; qu'il ressort des pièces du dossier que les renseignements et documents exigés par ces dispositions étaient joints à la déclaration de travaux ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance, tant de l'article précité, que de l'article R. 422-5 du même code en vertu duquel l'administration doit inviter le pétitionnaire à fournir les pièces manquantes, doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : “(…) III - En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage (…). Cette interdiction ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Leur réalisation est toutefois soumise à enquête publique suivant les modalités de la loi nº 83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement (…)” ; que selon le 35°) de l'annexe du décret du 23 avril 1985 susvisé, pris pour l'application de ladite loi du 12 juillet 1983, les aménagements nécessaires à l'exercice des activités de culture marine situés entièrement sur le domaine public maritime ne sont soumis à enquête que si leur emprise est supérieure à 2 000 m² ; qu'il ressort des pièces du dossier que le bassin et la cale en litige se situent entièrement sur le domaine public maritime ; que les consorts X produisent un certificat établi le 23 novembre 2006 par la direction départementale des affaires maritimes du Morbihan attestant que ces équipements n'occupent pas la totalité de l'emprise concédée, mais une superficie limitée à 1 907 m² ; que si l'association requérante produit sa propre note de calcul concluant à une surface supérieure à 2 000 m², elle n'établit pas la réalité des bases de calcul retenues pour aboutir à une telle surface ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut d'enquête publique doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme : “Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. (…) Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. (…).” ; que l'article R. 146-1 dudit code précise que les estrans peuvent relever des espaces ainsi préservés ; qu'il résulte des dispositions alors applicables de l'article R. 146-2 du même code, que : “En application du deuxième alinéa de l'article L. 146-6, peuvent être implantés dans les espaces et milieux mentionnés à l'article R. 146-1 (…) b) Les aménagements nécessaires à l'exercice des activités agricoles, de pêche et cultures marines ou lacustres, conchylicoles, (…) ne créant pas de surface hors oeuvre nette au sens de l'article R. 112-2 (…) à condition que la localisation et l'aspect de ces aménagements et locaux ne dénaturent pas le caractère des lieux et que la localisation dans ces espaces ou milieux soit rendue indispensable par des nécessités techniques” ;

Considérant que l'installation ostréicole en cause ne créant pas, ainsi qu'il est dit ci-dessus, de surface de plancher, est par là même dépourvue de surface hors oeuvre nette ; qu'elle ne saurait dénaturer le caractère des lieux, eu égard au caractère limité des travaux entrepris, justifiés par l'activité de l'exploitation ostréicole ; qu'elle est, ainsi, au nombre des aménagements légers pouvant légalement être implantés dans les espaces désignés à l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ; que, pour ces mêmes motifs, elle n'est pas contraire aux prescriptions de l'article NDs du règlement du plan d'occupation des sols de Baden, en vertu duquel : “La zone ND (…) comprend les secteurs : (…) NDs, délimitant, au titre de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, les espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques, notamment dans les parties naturelles des sites inscrits (…). Sont admis en secteur NDs (…) les aménagements (notamment hydrauliques) nécessaires à l'exercice des activités (…) de cultures marines ou lacustres, conchylicoles (…) ne créant pas de surface hors oeuvre nette au sens de l'article R. 122 ;2 (…) à condition que la localisation dans ces espaces ou milieux ne dénature pas le caractère des lieux et soit rendue indispensable par des nécessités techniques” ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient l'association requérante, les dispositions susmentionnées du code de l'urbanisme et du règlement du plan d'occupation des sols n'ont pas été méconnues ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 25 de la loi du 3 janvier 1986 alors applicable : “Les décisions d'utilisation du domaine public maritime tiennent compte de la vocation des zones concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques ; elles sont à ce titre coordonnées notamment avec celles concernant les terrains avoisinants ayant vocation publique. (…) tout changement substantiel d'utilisation de zones du domaine public maritime est préalablement soumis à enquête publique (…)” ;

Considérant, que les travaux dont s'agit, qui se situent dans les limites d'un chantier ostréicole dont il n'est pas contesté que l'exploitation remonte à 1945, et dans un secteur traditionnellement consacré à l'ostréiculture, ne sont pas constitutifs d'un changement substantiel d'utilisation de cette zone du domaine public maritime ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article 25 de la loi du 3 janvier 1986 doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 décembre 1998 par laquelle le maire de Baden ne s'est pas opposé aux travaux de création d'une cale et d'agrandissement d'un bassin ostréicole ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Baden et la SNC “Anse de Toulvern”, qui ne pas sont pas la partie perdante dans la présente instance, soient condamnées à verser à l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner ladite association à verser, d'une part, à la commune de Badent, d'autre part, à la SNC “Anse de Toulvern”, la somme de 1 000 euros au titre des frais de même nature exposés par ces dernières ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” est rejetée.

Article 2 : L'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan” versera à la commune de Baden la somme de 1 000 euros (mille euros) et à la SNC “Anse de Toulvern” la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative .

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association “Les amis de Locmiquel et du golfe du Morbihan”, à la commune de Baden (Morbihan) et à la société en nom collectif “Anse de Toulvern”.

Une copie en sera, en outre, transmise au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 04NT00643

2

1

3

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 04NT00643
Date de la décision : 28/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : LE CORNEC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-12-28;04nt00643 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award