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27/12/2006 | FRANCE | N°05NT01737

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 décembre 2006, 05NT01737


Vu la requête enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour la commune de La Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique), représentée par son maire en exercice, par Me Pittard, avocat au barreau de Nantes ; la commune de La Chapelle-sur-Erdre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-2769 du 28 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. X, la décision du 23 juin 2003 du maire exerçant le droit de préemption urbain de la commune sur la parcelle cadastrée à la section AN sous le n° 114 ;

2°) de rejeter la demande

présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de conda...

Vu la requête enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour la commune de La Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique), représentée par son maire en exercice, par Me Pittard, avocat au barreau de Nantes ; la commune de La Chapelle-sur-Erdre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-2769 du 28 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. X, la décision du 23 juin 2003 du maire exerçant le droit de préemption urbain de la commune sur la parcelle cadastrée à la section AN sous le n° 114 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2006 :

- le rapport de M. François, rapporteur ;

- les observations de Me Maudet, substituant Me Pittard, avocat de la commune de La Chapelle-sur-Erdre ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 28 juillet 2005, le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. X, acquéreur évincé, la décision du 23 juin 2003 par laquelle le maire de La Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique) a exercé le droit de préemption urbain de la commune sur une parcelle sise 5, rue François Clouet, cadastrée à la section AN sous le n° 114 ; que la commune de La Chapelle-sur-Erdre interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la décision du 23 juin 2003 :

Considérant que l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme dispose que “les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (…)” ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : “Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. (…)” ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain, d'autre part, qu'elles doivent définir ce projet de manière précise dans la décision de préemption ;

Considérant, en premier lieu, que la décision contestée, si elle indique que le bien préempté est compris dans un îlot séparant l'hôtel de ville de la mairie annexe, se réfère à une étude relative audit îlot réalisée douze ans auparavant, et se borne à mentionner, “que les hypothèses d'aménagement évoquées par cette étude comprenaient, entre autre, la réalisation d'un équipement public et la restructuration de l'îlot”, ainsi qu'à rappeler que la commune a déjà acquis plusieurs parcelles dans l'espace considéré ; que, toutefois, ces seules indications dépourvues de tout élément permettant d'identifier une opération de construction, d'aménagement ou d'urbanisation, ne sauraient constituer une définition claire et précise d'un projet ayant pu justifier l'exercice, par la décision contestée, du droit de préemption urbain de la commune ;

Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision de préemption critiquée, la commune disposait d'un projet d'aménagement précis, lequel ne saurait résulter, ni de la lettre adressée le 31 juin 2001 par le maire au président de la communauté urbaine, évoquant “les possibilités d'intégration urbaine de nouveaux locaux administratifs pour la mairie” dans l'îlot Clouet, ni davantage de quatre acquisitions foncières, rappelées dans les bilans annuels soumis au conseil municipal, réalisées dans ce secteur entre 1994 et 2002 ; qu'il suit de là que la décision contestée ne satisfait pas aux exigences énoncées par les dispositions précitées du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de La Chapelle-sur-Erdre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de préemption du 23 juin 2003 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : “Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution” ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : “Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 (…) d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet” ;

Considérant que sur le fondement de ces dispositions, M. X présente des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de La Chapelle-sur-Erdre de lui proposer l'acquisition du bien litigieux, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

Considérant que l'annulation par le juge de l'excès de pouvoir de l'acte par lequel le titulaire du droit de préemption décide d'exercer ce droit emporte pour conséquence que ce titulaire doit être regardé comme n'ayant jamais décidé de préempter ; qu'ainsi, cette annulation implique nécessairement, sauf atteinte excessive à l'intérêt général appréciée au regard de l'ensemble des intérêts en présence, que le titulaire du droit de préemption, s'il n'a pas entre-temps cédé le bien illégalement préempté, prenne toute mesure afin de mettre fin aux effets de la décision annulée ; qu'il lui appartient à cet égard, et avant toute autre mesure, de s'abstenir de revendre à un tiers le bien illégalement préempté ; qu'il doit, en outre, proposer à l'acquéreur évincé puis, le cas échéant, au propriétaire initial d'acquérir le bien, et ce, à un prix visant à rétablir autant que possible et sans enrichissement sans cause de l'une quelconque des parties les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par acte authentique du 14 janvier 2005, la commune de La Chapelle-sur-Erdre a acquis auprès de la société CEFIC communication, pour le prix de 42 700 euros, le bien objet de la décision de préemption contestée, lequel n'a pas été revendu depuis lors ; qu'au regard de l'ensemble des intérêts en présence, le rétablissement de la situation initiale ne porte pas une atteinte excessive à l'intérêt général ; qu'il suit de là qu'il y a lieu d'enjoindre à la commune de La Chapelle-sur-Erdre de proposer à M. X, acquéreur évincé, d'acquérir ce bien au prix de 42 700 euros, inférieur à celui de 45 734,71 euros mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner et sur la base duquel est intervenue la vente précitée, à telle fin d'établir, sans enrichissement sans cause de la commune, les conditions d'une transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle ; que la commune devra s'acquitter de cette proposition dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte de 200 euros par jour de retard ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la commune de La Chapelle-sur-Erdre la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la commune de La Chapelle-sur-Erdre à verser à M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par ce dernier ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de La Chapelle-sur-Erdre est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint à la commune de La Chapelle-sur-Erdre de proposer à M. X d'acquérir le bien objet de la décision de préemption annulée au prix de 42 700 euros (quarante deux mille sept cents euros). Cette proposition sera faite dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 200 euros (deux cents euros) par jour de retard.

Article 3 : La commune de La Chapelle-sur-Erdre versera à M. X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique) et à M. Arnaud X.

Une copie en sera, en outre, transmise au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 05NT01737

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01737
Date de la décision : 27/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : PITTARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-12-27;05nt01737 ?
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