Vu le recours enregistré le 15 juillet 2004, présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 0302128, 0303051, 0304098, 0304398 et 0400396 du 19 mai 2004 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il annule l'arrêté ministériel du 18 juillet 2003 portant suspension de M. , ingénieur des travaux publics de l'Etat, et les arrêtés ministériels du 5 décembre 2003 et du 20 janvier 2004 prononçant à l'encontre de l'intéressé la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de six mois ;
2°) de rejeter les demandes de M. tendant à l'annulation des arrêtés du 18 juillet 2003, du 5 décembre 2003 et du 20 janvier 2004 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 ;
Vu le décret n° 71-345 du 5 mai 1971 ;
Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
Vu le décret du 8 juillet 2002 portant délégation de signature ;
Vu le décret du 1er août 2003 portant délégation de signature ;
Vu l'arrêté ministériel du 18 décembre 2001 portant organisation des sous-directions de la direction du personnel, des services et de la modernisation en bureaux ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2006 :
- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;
- les observations de M. ;
- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par jugement du 19 mai 2004, le Tribunal administratif de Nantes a, d'une part, annulé l'arrêté du 18 juillet 2003 par lequel le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a suspendu M. , ingénieur des travaux publics de l'Etat, de ses fonctions pour une durée de quatre mois, et les arrêtés du 19 novembre 2003, du 5 décembre 2003 et du 20 janvier 2004 prononçant à l'encontre de l'intéressé, la sanction d'exclusion temporaire de fonctions, d'autre part, rejeté les conclusions de M. tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 26 mars 2003 lui refusant le bénéfice de la loi susvisée du 6 août 2002 portant amnistie, enfin, condamné l'Etat à verser à M. une indemnité de 500 euros en réparation des conséquences dommageables de l'illégalité fautive de la mesure de suspension prononcée à son encontre ; que le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer interjette appel de ce jugement en tant qu'il a annulé ses arrêtés du 18 juillet 2003, du 5 décembre 2003 et du 20 janvier 2004, tandis que M. demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation de la décision précitée du 26 mars 2003, ainsi que la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité totale de 30 298,24 euros en réparation de son entier préjudice, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
Sur l'appel incident de M. :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
Considérant que les conclusions indemnitaires susanalysées de l'appel incident de M. soulèvent un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer tendant à l'annulation du jugement attaqué, en tant que le tribunal a annulé les arrêtés ministériels du 18 juillet 2003, du 5 décembre 2003 et du 20 février 2004 ; qu'elles ne peuvent donc être présentées par la voie du recours incident ; qu'en outre, présentées après l'expiration du délai imparti à M. pour faire appel, elles ne sont pas davantage recevables à ce titre ; que les conclusions de M. tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de lui verser les indemnités réclamées sous astreinte, ne peuvent, par voie de conséquence, être également accueillies ;
En ce qui concerne la décision ministérielle du 26 mars 2003 refusant le bénéfice de la loi du 6 août 2002 portant amnistie :
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 6 août 2002 portant amnistie : “Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles (…). Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs (…)” ;
Considérant que le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a refusé d'accorder à M. le bénéfice de la loi d'amnistie pour les propos qu'il a tenus dans une lettre du 27 juillet 1998 adressée au président du conseil régional des Pays de la Loire ; qu'il ressort de cette lettre jointe au dossier, que M. y déplore, dans des termes alarmistes, les dysfonctionnements affectant, selon lui, la qualité du service apporté par la direction départementale de l'équipement à la région des Pays de la Loire, remet en cause les compétences des responsables de l'unité en charge des lycées, tout en utilisant de manière tendancieuse, les termes d'un rapport adressé en 1996, par le directeur départemental de l'équipement, au président de la région des Pays de la Loire ; que ces propos sans nuance tenus par M. étaient de nature à altérer l'image du service public de l'Etat, notamment auprès de la région, et constituent un manquement au devoir de réserve et de discrétion ; qu'eu égard au discrédit causé à son administration et au corps auquel il appartient, de tels propos constituent un manquement à l'honneur professionnel et sont de ce fait exclus du bénéfice de l'amnistie ; que c'est, par suite, à bon droit que le ministre a refusé d'accorder à l'intéressé le bénéfice de la loi d'amnistie à raison de ces faits ;
En ce qui concerne la demande d'inscription de faux :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 633-1 du code de justice administrative : “Dans le cas d'une demande en inscription de faux contre une pièce produite, la juridiction fixe le délai dans lequel la partie qui l'a produite sera tenue de déclarer si elle entend s'en servir. Si la partie déclare qu'elle n'entend pas se servir de la pièce, ou ne fait pas de déclaration, la pièce est rejetée. Si la partie déclare qu'elle entend se servir de la pièce, la juridiction peut soit surseoir à statuer sur l'instance principale jusqu'après le jugement du faux rendu par le tribunal compétent, soit statuer au fond, si elle reconnaît que la décision ne dépend pas de la pièce arguée de faux.”;
Considérant que la demande en inscription de faux présentée par M. porte sur un relevé des conversations téléphoniques effectué sur son poste professionnel le 17 novembre 2000 ; qu'il est constant, toutefois, que les sanctions infligées à M. n'ont été en aucune manière motivées par l'usage fait par l'intéressé de son téléphone professionnel ; qu'il suit de là, en tout état de cause, que la demande d'inscription de faux qui, dès lors qu'elle se rapporte à des faits qui n'ont pas motivé les sanctions litigieuses, vient au soutien d'un moyen inopérant, est dépourvue d'objet ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de l'appel incident présentées par M. doivent être rejetées ;
Sur le recours du ministre :
Considérant qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, portant droits et obligations des fonctionnaires : “Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination” ; qu'aux termes de l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : “Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination qui l'exerce après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline et dans les conditions prévues à l'article 19 du titre 1er du statut général (…) La délégation du pouvoir de nomination emporte celle du pouvoir disciplinaire” ; qu'en vertu de l'article 6 du décret du 5 mai 1971 susvisé, alors applicable, les ingénieurs des travaux publics de l'Etat sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'équipement ; que ce ministre est, dès lors, compétent pour exercer le pouvoir disciplinaire à l'égard des ingénieurs des travaux publics de l'Etat ;
Sur la légalité de l'arrêté ministériel du 18 juillet 2003 portant suspension de fonctions :
Considérant que l'article 2 du décret du 8 juillet 2002 portant délégation de signature a autorisé, notamment, M. RUYSSCHAERT, ingénieur en chef des ponts et chaussées, en cas d'absence ou d'empêchement de M. WEISS, directeur du personnel, des services et de la modernisation, à signer, au nom du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, tous actes, arrêtés ou décisions, à l'exclusion des décrets ; que cette délégation a été, toutefois, consentie dans la limite des attributions confiées au délégataire ; qu'en vertu de l'arrêté ministériel du 18 décembre 2001 portant organisation des sous-directions de la direction du personnel, des services et de la modernisation, la sous-direction des personnels techniques, d'entretien et d'exploitation, que dirige M. RUYSSCHAERT, a notamment pour mission de préparer “les mesures individuelles de gestion non déconcentrée”, tandis que la sous-direction de la réglementation du personnel, du conseil juridique et du contrôle est en charge, notamment, de l'instruction des affaires disciplinaires et des propositions de sanctions ; qu'il en résulte que la délégation de signature consentie à M. RUYSSCHAERT, dans la limite de ses attributions, ne l'autorisait pas à signer, au nom du ministre, les décisions à caractère disciplinaire ; qu'il suit de là que la l'arrêté ministériel du 18 juillet 2003 suspendant M. de ses fonctions est entaché d'incompétence ;
Sur la légalité de l'arrêté ministériel du 5 décembre 2003 portant exclusion temporaire de fonctions :
Considérant que l'article 2 du décret du 1er août 2003 portant délégation de signature a autorisé, notamment, M. RUYSSCHAERT, ingénieur en chef des ponts et chaussées, en cas d'absence ou d'empêchement de M. PARENT, directeur du personnel, des services et de la modernisation à signer, au nom du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, tous actes, arrêtés ou décisions, à l'exclusion des décrets ; que, comme il est dit ci-dessus, cette délégation de signature, rédigée en des termes identiques à ceux du décret du 8 juillet 2002 précité, n'autorisait pas M. RUYSSCHAERT à signer les décisions à caractère disciplinaire ; qu'il suit de là que l'arrêté ministériel du 5 décembre 2003 excluant temporairement M. de ses fonctions est entaché d'incompétence ;
Sur la légalité de l'arrêté ministériel du 20 janvier 2004 portant exclusion temporaire de fonctions :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 octobre 1984 susvisé, relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : “L'organisme siégeant en conseil de discipline (…) est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire” ; qu'il ressort des pièces du dossier que le rapport de saisine de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline à l'égard des ingénieurs des travaux publics de l'Etat a été établi le 11 septembre 2003 par M. RUYSSCHAERT, ingénieur en chef des ponts et chaussées ; que comme il vient d'être dit, la délégation de signature consentie à M. RUYSSCHAERT, ingénieur en chef des ponts et chaussées, par décret du 1er août 2003 ne l'autorisait pas à signer les décisions à caractère disciplinaire ; qu'ainsi, le rapport de saisine du conseil de discipline ne peut être regardé comme ayant été établi par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ; qu'il suit de là, que l'arrêté du 20 janvier 2004 excluant temporairement M. de ses fonctions a été pris au terme d'une procédure irrégulière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé ses arrêtés du 18 juillet 2003, du 5 décembre 2003 et du 20 janvier 2004 pris à l'encontre de M. ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à M. la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer et l'appel incident de M. sont rejetés.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et à M. Alain .
N° 04NT00881
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