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31/10/2006 | FRANCE | N°05NT00750

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 31 octobre 2006, 05NT00750


Vu la requête enregistrée le 26 mai 2005, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) du Diamant, dont le siège est Kergrippe à Sene (56860), pour Mme Martine X et Mme Sylvie Y, demeurant ..., par Me Bouin, avocat au barreau de Vannes ; la SARL du Diamant et Mmes X et Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0201542 du 31 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à leur verser la somme de 767 144,18 euros en réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait

de l'illégalité de l'arrêté du 14 mars 1994 du préfet du Morbihan portan...

Vu la requête enregistrée le 26 mai 2005, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) du Diamant, dont le siège est Kergrippe à Sene (56860), pour Mme Martine X et Mme Sylvie Y, demeurant ..., par Me Bouin, avocat au barreau de Vannes ; la SARL du Diamant et Mmes X et Y demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0201542 du 31 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à leur verser la somme de 767 144,18 euros en réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait de l'illégalité de l'arrêté du 14 mars 1994 du préfet du Morbihan portant réglementation de la police générale des débits de boissons ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 767 144,18 euros en réparation dudit préjudice ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2006 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- les observations de Me Perraud, substituant Me Bouin, avocat de la SARL du Diamant, de Mme X et de Mme Y ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 22 mai 2001, le Tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de la société à responsabilité limitée (SARL) du Diamant et de Mmes X et Y, exploitantes de l'établissement “Le Ballyshannon” à Kergrippe en Sene, l'arrêté préfectoral du 14 mars 1994 portant réglementation générale des débits de boisson dans le département du Morbihan ; que la SARL du Diamant et Mmes X et Y interjettent appel du jugement du 31 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer le préjudice qu'elles estiment avoir subi du fait de l'illégalité fautive ayant entaché cet arrêté ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Sur le bien-fondé des conclusions indemnitaires :

Considérant que par jugement du 22 mai 2001 devenu définitif, le Tribunal administratif de Rennes a annulé, pour excès de pouvoir, l'arrêté 14 mars 1994 du préfet du Morbihan portant réglementation de la police générale des débits de boisson, au motif qu'en imposant à un établissement tel que celui exploité par les requérantes, des horaires d'ouverture inadaptés, le préfet avait porté atteinte au principe de la liberté du commerce et de l'industrie ; que cette illégalité est constitutive d'une faute qui engage la responsabilité de l'Etat envers la SARL du Diamant et Mmes X et Y ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient aux requérantes d'apporter la preuve de la réalité du préjudice dont elles demandent réparation et de l'existence d'un lien direct de causalité entre ce préjudice et l'illégalité fautive commise par l'administration ; que, d'une part, il résulte de l'instruction que la fermeture de l'établissement “Ballyshannon” est intervenue en 2000, soit plus de six ans après l'entrée en vigueur de l'arrêté du 14 mars 1994 et en raison, notamment, de la conjoncture défavorable affectant l'activité des établissements de type “pub irlandais”, tel celui exploité par les intéressées ; qu'ainsi, le préjudice lié à la perte de valeur du fonds de commerce de l'établissement exploité par les requérantes ne saurait être imputé à la réglementation issue de l'arrêté du 14 mars 1994 ; que, d'autre part, si les requérantes invoquent une perte de marge brute de 306 214,58 euros, elles font reposer cette évaluation sur un postulat selon lequel le chiffre d'affaires de l'entreprise aurait dû s'accroître de 10 % en 1994, de 5 % en 1995 et de 2 % pour chacun des exercices suivants ; que, toutefois, de telles pertes de marge brute, ne sont étayés par aucun élément probant ; que les requérantes ne sauraient donc prétendre à la réparation qu'elles demandent au titre de leurs pertes d'exploitation ; mais que, pour autant, la réglementation litigieuse n'ayant pas été sans conséquence sur les conditions de fonctionnement de l'établissement et les répercussions qu'elles ont eu sur le niveau d'activité de celui-ci, il sera fait une juste appréciation de ces pertes en les fixant à la somme de 27 345 euros correspondant à la proposition d'indemnisation faite par l'administration et qui ne saurait être augmentée pour tenir compte d'une réduction non significative de l'activité, au demeurant résiduelle, de vente de tabac ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL du Diamant et Mmes X et Y sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à leur réparer les conséquences dommageables de l'illégalité fautive entachant l'arrêté du 14 mars 1994 du préfet du Morbihan ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à la SARL du Diamant et à Mmes X et Y une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 31 mars 2005 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à la SARL du Diamant et à Mmes X et Y une somme de 27 345 euros (vingt sept mille trois cent quarante cinq euros).

Article 3 : L'Etat versera à la SARL du Diamant et à Mmes X et Y une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL du Diamant et de Mmes X et Y est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée du Diamant, à Mme Martine X, à Mme Sylvie Y, au préfet du Morbihan et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

N° 05NT00750

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT00750
Date de la décision : 31/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : BOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-10-31;05nt00750 ?
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