La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/10/2006 | FRANCE | N°05NT01748

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 10 octobre 2006, 05NT01748


Vu la requête enregistrée le 7 novembre 2005, présentée pour la société anonyme Plateforme, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège est “Zone du Moros” à Concarneau (29900), par Me Bois, avocat au barreau de Rennes ; la société Plateforme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1229 du 31 août 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2004 par lequel le maire de Concarneau (Finistère) a exercé le droit de préemption de la commune sur un immeu

ble sis 11, rue d'Archimède ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décisi...

Vu la requête enregistrée le 7 novembre 2005, présentée pour la société anonyme Plateforme, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège est “Zone du Moros” à Concarneau (29900), par Me Bois, avocat au barreau de Rennes ; la société Plateforme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1229 du 31 août 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2004 par lequel le maire de Concarneau (Finistère) a exercé le droit de préemption de la commune sur un immeuble sis 11, rue d'Archimède ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre à la commune de Concarneau de s'abstenir de revendre l'immeuble situé 11, rue d'Archimède ;

4°) d'enjoindre à la commune de Concarneau de lui proposer d'acquérir l'immeuble situé 11, rue d'Archimède aux prix et conditions figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner du 16 décembre 2003, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte, passé ce délai, de 1 000 euros par jour de retard ;

5°) de condamner la commune de Concarneau à lui verser, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au titre de la procédure de première instance et une somme de 2 000 euros au titre de la procédure d'appel ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 septembre 2006 :

- le rapport de M. Lalauze, rapporteur ;

- les observations de Me Le Derf-Daniel, substituant Me Bois, avocat de la société Plateforme ;

- les observations de Me Cazo, substituant Me Larzul, avocat de la commune de Concarneau ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société anonyme Plateforme interjette appel du jugement du 31 août 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2004 par lequel le maire de Concarneau (Finistère) a exercé le droit de préemption de la commune sur un immeuble sis 11, rue d'Archimède ;

Sur la légalité de la décision de préemption contestée :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article R. 213-21 du code de l'urbanisme : “Le titulaire du droit de préemption doit recueillir l'avis du service des domaines sur le prix de l'immeuble dont il envisage de faire l'acquisition, dès lors que le prix ou l'estimation figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner ou que le prix que le titulaire envisage de proposer excède le montant fixé par l'arrêté du ministre des finances prévu à l'article 3 du décret du 5 juin 1940 modifié” ; qu'aux termes du 3ème aliéna du même article : “L'avis du service des domaines doit être formulé dans un délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande d'avis. Passé ce délai, il peut être procédé librement à l'acquisition” ; qu'il ressort de ces dispositions que la consultation du service des domaines, dans les conditions qu'elles prévoient, constitue, lorsqu'elle est requise, une formalité substantielle dont la méconnaissance entache d'illégalité la décision de préemption ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 23 janvier 2004 de l'arrêté contesté du maire de Concarneau décidant d'exercer, pour un prix de 106 714 euros, supérieur au seuil prévu à l'article R. 213-21 précité du code de l'urbanisme, le droit de préemption de la commune sur un immeuble situé 11, rue d'Archimède, appartenant à la société “Etablissements Le Pelleter” et sur lequel la société Plateforme bénéficiait d'une promesse de vente qui avait donné lieu à une déclaration d'intention d'aliéner du 16 décembre 2003, l'avis du service des domaines sollicité le 16 janvier 2004 n'avait pas été émis ; qu'il ne l'a été que par lettre du 5 février 2004, postérieure à l'arrêté contesté ; qu'ainsi, faute d'avoir disposé de cet avis avant de prendre la décision de préemption à la date du 23 janvier 2004 où le délai d'un mois à partir de la réception de la demande communale par le service des domaines n'était pas écoulé, et quand bien même le prix d'acquisition du bien en cause par la commune serait conforme à celui figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner, le maire de Concarneau a entaché son arrêté d'une irrégularité substantielle ; qu'il suit de là que l'arrêté du 23 janvier 2004 contesté décidant d'exercer le droit de préemption de la commune doit être annulé pour ce motif ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : “Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (…)” ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : “Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels” ;

Considérant que si l'arrêté du 23 janvier 2004 contesté mentionne l'objet de la préemption en relevant que “cette acquisition est faite dans le cadre d'une politique locale de l'habitat, dans l'intérêt général, afin de répondre aux besoins de logements tels que définis à l'article R. 300-1 du code de l'urbanisme. Elle s'inscrit dans un programme de réhabilitation et de restauration de l'habitat ancien au centre-ville afin d'y développer du logement social, en lien avec des Offices Publics d'Aménagement”, il ne donne aucune indication sur ce programme, ni sur une opération d'aménagement en vue de laquelle la préemption aurait été prononcée ; que la délibération du 7 novembre 2002 du conseil municipal de Concarneau, mentionnant que “depuis plusieurs années, de nombreux efforts ont été effectués pour revitaliser le centre-ville (…) afin de permettre à de nombreuses familles de trouver à s'y loger” et celle du 13 novembre 2003, indiquant que “la ville (…) et l'OPAC de Quimper Cornouailles ont engagé depuis 1997 des actions concertées visant à réhabiliter l'habitat ancien en centre-ville afin d'y développer des logements sociaux” ne permettent pas davantage de justifier, dans le quartier concerné, de l'existence, à la date de la décision contestée, d'un projet d'action ou d'opération de réhabilitation de l'habitat ancien suffisamment précis et certain ; que, dès lors, l'arrêté contesté encourt également l'annulation pour ce second motif ;

Considérant, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun des autres moyens invoqués par la société Plateforme contre l'arrêté contesté, n'est susceptible d'en fonder l'annulation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Plateforme est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2004 par lequel le maire de Concarneau a exercé le droit de préemption de la commune sur un immeuble sis 11, rue d'Archimède ;

Sur les conclusions présentées par la société Plateforme sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, pour la Cour, en réponse aux conclusions présentées par la société Plateforme sur le fondement des dispositions desdits articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, de faire injonction à la commune de Concarneau, à qui il appartient de s'abstenir de revendre à un tiers le bien illégalement préempté, de proposer à la société Plateforme l'acquisition de ce bien au prix mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte de 200 euros par jour de retard ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la commune de Concarneau à verser à la société Plateforme une somme de 1 500 euros et une somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, respectivement, dans le cadre de la procédure de première instance, de même que lors de la procédure d'appel ; que, d'autre part, ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la société Plateforme, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la commune de Concarneau la somme que cette dernière demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 31 août 2005 du Tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du 23 janvier 2004 du maire de Concarneau sont annulés.

Article 2 : Il est fait injonction à la commune de Concarneau de proposer à la société Plateforme l'acquisition de l'immeuble sis 11, rue d'Archimède à Concarneau, au prix mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 200 euros (deux cents euros) par jour de retard.

Article 3 : La commune de Concarneau versera à la société Plateforme une somme totale de 3 000 euros (trois mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Plateforme est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Plateforme, à la commune de Concarneau (Finistère) et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 05NT01748

2

1

3

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01748
Date de la décision : 10/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Robert LALAUZE
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : BOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-10-10;05nt01748 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award