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26/09/2006 | FRANCE | N°05NT01474

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 septembre 2006, 05NT01474


Vu la requête enregistrée le 22 août 2005, présentée pour la société Union de la publicité extérieure, représentée par son président en exercice, dont le siège est 40, boulevard de Malesherbes à Paris (75008), par Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; la société Union de la publicité extérieure demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-4109 du 14 juin 2005 du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'en réponse à sa demande, il a limité l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2001 du préfet d'Eure-et-Loir en ce qu'il appro

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Vu la requête enregistrée le 22 août 2005, présentée pour la société Union de la publicité extérieure, représentée par son président en exercice, dont le siège est 40, boulevard de Malesherbes à Paris (75008), par Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; la société Union de la publicité extérieure demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-4109 du 14 juin 2005 du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'en réponse à sa demande, il a limité l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2001 du préfet d'Eure-et-Loir en ce qu'il approuve le 3ème alinéa de l'article 2 de la section 3 du chapitre 2 du règlement local de publicité pour les communes de Dreux et de Vernouillet ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de la route ;

Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 modifiée relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes ;

Vu les décrets n°s 80-923 et 80-924 du 21 novembre 1980 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 août 2006 :

- le rapport de M. Lalauze, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par ordonnance du 4 mars 2004, prise sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président du Tribunal administratif d'Orléans a rejeté, comme entachée d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance, la demande de la société Union de publicité extérieure (UPE) tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2001 du préfet d'Eure-et-Loir, approuvant le règlement local de publicité des communes de Dreux et Vernouillet ; que par son arrêt du 28 juin 2004, la Cour, estimant que ladite demande n'était pas entachée du motif d'irrecevabilité relevé, fondé sur sa tardiveté, a annulé l'ordonnance du 4 mars 2004 et renvoyé la société UPE devant le Tribunal administratif d'Orléans pour qu'il soit statué sur sa demande de première instance ; que la société UPE interjette appel du jugement du 14 juin 2005 du Tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 27 juin 2001 précité ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, d'une part, que la société UPE soutient que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité comme ayant été rendu par une formation de jugement qui n'était pas impartiale, dès lors que la présidence en était assurée par le président du tribunal qui avait déjà eu à connaître du litige dans le cadre de son ordonnance du 4 mars 2004 annulée par l'arrêt de renvoi du juge d'appel ;

Considérant qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires fixant les conditions dans lesquelles il doit être statué après l'annulation d'une décision de justice, ni le devoir d'impartialité qui s'impose à toute juridiction, qui est rappelé par l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni aucune autre règle générale de procédure, ne s'oppose à ce qu'un juge dépendant d'une formation de jugement dont une décision a été annulée, délibère à nouveau sur l'affaire en la même qualité ; que la circonstance que le jugement attaqué du 14 juin 2005 ait été rendu par une formation collégiale du Tribunal administratif d'Orléans présidée par le président de ce tribunal, qui avait pris, par application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative dont les dispositions définissent les affaires dont la nature ne justifie pas l'intervention d'une formation collégiale, l'ordonnance précitée du 4 mars 2004, n'était nullement de nature à constituer une atteinte au principe d'impartialité dès lors que, dans l'un et l'autre cas, ces formations collégiale et à juge unique sont les émanations de la même juridiction de première instance appelée à statuer, après renvoi, sur le même litige ; qu'il suit de là que le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité pour ce motif ;

Considérant, d'autre part, qu'en utilisant dans le jugement attaqué, les expressions “comme il a été dit plus haut” et “pour les motifs sus-indiqués”, le tribunal administratif a entendu se référer aux dispositions de portée générale contenues dans les premier et deuxième considérants, et relatives, tant à l'absence d'interdiction générale et absolue induite par le cumul des règles d'implantation des dispositifs publicitaires, qu'à la possibilité, pour un règlement local de publicité, de soumettre certains de ces dispositifs à des règles plus contraignantes que celles édictées par la réglementation nationale ; qu'il n'a pas, ainsi, entaché son jugement d'une insuffisance de motivation ;

Sur la légalité de la décision contestée :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi susvisée du 29 décembre 1979, devenu l'article L. 581-14 du code de l'environnement : “I - La délimitation des zones de publicité autorisée, des zones de publicité restreinte ou des zones de publicité élargie, ainsi que les prescriptions qui s'y appliquent, sont établies à la demande du conseil municipal. Le projet de réglementation spéciale est préparé par un groupe de travail dont la composition est fixée par arrêté préfectoral. Il est présidé par le maire qui, en cette qualité, dispose d'une voix prépondérante. Il comprend, en nombre égal, des membres du conseil municipal et éventuellement un représentant de l'assemblée délibérante de l'organisme intercommunal compétent en matière d'urbanisme, d'une part, et d'autre part, des représentants des services de l'Etat. Les chambres de commerce et d'industrie, les chambres de métiers, les chambres d'agriculture, les associations locales d'usagers visées à l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, ainsi que les représentants des professions directement intéressées, désignés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sont, s'ils le demandent, associés, avec voix consultative, à ce groupe de travail” ; que la société UPE, qui n'établit, ni même d'ailleurs n'allègue, que la composition du groupe de travail chargé de préparer le projet de règlement local de publicité des communes de Dreux et de Vernouillet, telle que modifiée par arrêté du 18 décembre 2000 du préfet de l'Eure, ne serait pas conforme aux dispositions précitées de l'article L. 581-14 du code de l'environnement, ne peut utilement soutenir que la procédure d'élaboration dudit projet serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière au seul motif que ce groupe de travail se serait borné à reprendre, en l'état, le projet de règlement qu'il avait élaboré dans sa composition initialement déterminée par arrêté préfectoral du 22 juin 1999 ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que pour les panneaux portatifs scellés au sol ou installés directement sur le sol, le 7ème alinéa de l'article 1-2 de la section 2 du chapitre 3 du règlement local de publicité dispose : “sur les unités foncières ayant une largeur de façade d'au moins 20 mètres, (…) un seul dispositif est alors admis (…) implanté dans une bande de terrain de 10 mètres maximum de profondeur à compter de l'alignement et à une distance par rapport aux limites séparatives du terrain au minimum égale à 8 mètres” ; que ces dispositions, si elles restreignent la possibilité d'apposer des dispositifs publicitaires dans le but d'assurer la sécurité des usagers de la voie publique, ne sauraient entraîner, comme le soutient la société UPE, une “interdiction absolue, mais déguisée, de tout affichage publicitaire” sur le territoire des communes de Dreux et de Vernouillet ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la loi susvisée du 29 décembre 1979, devenu l'article L. 581-7 du code de l'environnement : “en dehors des lieux qualifiés agglomération par les règlements relatifs à la circulation routière, toute publicité est interdite, sauf dans les zones dénommées zones de publicité autorisée” ; qu'aux termes de l'article R 110-2 du code de la route : “(...) Le terme “agglomération” désigne un espace sur lequel sont groupés des immeubles bâtis rapprochés et dont l'entrée et la sortie sont signalées par des panneaux placés à cet effet le long de la route qui le traverse ou qui le borde” ; qu'en mentionnant que la zone de publicité autorisée n° 1 concerne, sur le territoire des communes de Dreux et de Vernouillet, “les abords des axes de circulation principaux situés hors agglomération et menant vers les entrées de ville”, les auteurs du règlement local de publicité n'ont pas fait une inexacte application des dispositions combinées des articles précités ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 29 décembre 1979, devenu l'article L. 581-11 du code de l'environnement : “I - l'acte instituant une zone de publicité restreinte y soumet la publicité à des prescriptions plus restrictives que celles du régime fixé en application de l'article L. 581-9 ; II - Il peut en outre : 1° déterminer dans quelles conditions et sur quels emplacements la publicité est seulement admise ; 2° interdire la publicité ou des catégories de publicité définies en fonction des procédés et dispositifs utilisés (…)” ; que contrairement à ce que soutient la requérante, le cumul des règles d'implantation des dispositifs publicitaires édictées dans les trois zones de publicité restreinte de Dreux et Vernouillet n'a, ni pour objet, ni pour effet, de conduire à une interdiction générale et absolue de toute publicité commerciale dans ces zones alors, d'ailleurs, qu'il n'est pas contesté que de nouvelles sociétés ont accédé au marché local depuis l'entrée en vigueur du règlement local de publicité litigieux ; que si la société UPE soutient que la méconnaissance du principe de liberté du commerce et de l'industrie est caractérisée, elle ne l'établit pas ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation entachant ledit règlement doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions du 9ème alinéa de l'article 1-2 de la section 2 du chapitre 3 du règlement local de publicité, en admettant, dans les zones de publicité restreinte, un dispositif publicitaire supplémentaire par tranche de 80 mètres linéaires de façade pour les unités foncières ayant une largeur de façade supérieure à 20 mètres ont, implicitement mais nécessairement, pour effet d'instaurer une règle de densité publicitaire ; qu'une telle règle, dont l'application conduit à instaurer un mécanisme d'autorisation préalable illégal en zone de publicité restreinte, est également de nature à introduire une discrimination illégale entre sociétés d'affichage, qui peuvent se voir opposer un refus d'implantation de nouveaux dispositifs publicitaires, en dehors de toute justification liée à la protection du cadre de vie, au seul motif qu'aucun emplacement n'est libre au moment où elles forment leur demande ; que, par suite, le moyen tiré de l'illégalité de la règle d'inter-distance entre dispositifs publicitaires dans les zones de publicité restreinte posée par le règlement contesté doit être accueilli ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du 10ème alinéa de l'article 1-2 de la section 2 du chapitre 3 du règlement local de publicité : “les dispositifs sur panneaux portatifs scellés au sol ou installés directement sur le sol, ne peuvent s'élever à plus de 6 mètres au-dessus du niveau du sol. La hauteur maximum du dispositif se calcule par rapport au niveau du sol de la voie de circulation d'où est visible le dispositif, et non pas la hauteur du sol où est installé le dispositif (…)” ; qu'une telle règle, qui fait dépendre le calcul de la hauteur maximum d'un panneau publicitaire de sa hauteur par rapport à la voie publique et non au terrain d'assiette dudit panneau, contrevient aux dispositions de l'article 10 du décret susvisé du 21 novembre 1980 aux termes desquelles “les dispositifs publicitaires non lumineux scellés au sol ou installés directement sur le sol ne peuvent, ni s'élever à plus de 6 mètres au-dessus au niveau du sol, ni avoir une surface supérieure à 16 mètres carrés” ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société UPE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2001 du préfet d'Eure-et-Loir en ce qu'il approuve les 9ème et 10ème alinéas de l'article 1-2 de la section 2 du chapitre 3 du règlement local de publicité pour les communes de Dreux et de Vernouillet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à la société UPE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la société UPE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à l'Etat la somme que le ministre de l'écologie et du développement durable demande au titre des frais de même nature exposés par ses services ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 14 juin 2005 du Tribunal administratif d'Orléans est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société UPE tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2001 du préfet d'Eure-et-Loir en ce qu'il approuve les 9ème et 10ème alinéas de l'article 1-2 de la section 2 du chapitre 3 du règlement local de publicité pour les communes de Dreux et de Vernouillet.

Article 2 : L'arrêté du 27 juin 2001 du préfet d'Eure-et-Loir est annulé en ce qu'il approuve les 9ème et 10ème alinéas de l'article 1-2 de la section 2 du chapitre 3 du règlement local de publicité pour les communes de Dreux et de Vernouillet.

Article 3 : L'Etat versera à la société UPE une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société UPE est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Union de la publicité extérieure (UPE), à la commune de Dreux (Eure-et-Loir), à la commune de Vernouillet (Eure-et-Loir) et au ministre de l'écologie et du développement durable.

N° 05NT01474

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT01474
Date de la décision : 26/09/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Robert LALAUZE
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-09-26;05nt01474 ?
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