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29/06/2006 | FRANCE | N°05NT00675

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 29 juin 2006, 05NT00675


Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2005, présentée pour Mme Marie-Thérèse X, demeurant ..., par Me Monany ; Mme Marie-Thérèse X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-2614 du 1er mars 2005 du Tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Cerdon-du-Loiret et l'Etat soient solidairement condamnés à lui verser les sommes de 2 058,06 euros et de 11 500 euros en réparation, respectivement, des préjudices matériels et du préjudice moral qu'elle a subis du fait de l'inondation de sa maison ;

2°) de cond

amner solidairement la commune de Cerdon-du-Loiret et l'Etat à lui verser lesdit...

Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2005, présentée pour Mme Marie-Thérèse X, demeurant ..., par Me Monany ; Mme Marie-Thérèse X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-2614 du 1er mars 2005 du Tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Cerdon-du-Loiret et l'Etat soient solidairement condamnés à lui verser les sommes de 2 058,06 euros et de 11 500 euros en réparation, respectivement, des préjudices matériels et du préjudice moral qu'elle a subis du fait de l'inondation de sa maison ;

2°) de condamner solidairement la commune de Cerdon-du-Loiret et l'Etat à lui verser lesdites sommes, ainsi qu'à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2006 :

- le rapport de M. Margueron, président ;

- les observations de Me Michaux, substituant Me Monany, avocat de Mme X ;

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de Cerdon-du-Loiret a fait construire un réseau d'évacuation des eaux pluviales sous les trottoirs de la route de Coullons, la direction départementale de l'équipement (DDE) du Loiret étant maître d'oeuvre de l'opération ; que les travaux de ce réseau ont fait l'objet d'une réception prononcée sans réserve avec effet au 20 avril 1994 ; que, postérieurement à l'achèvement de l'ouvrage, en 1996 et 1997 Mme X, qui réside au numéro 82 de cette route, a vu sa maison envahie à plusieurs reprises par des eaux pluviales, qui provenaient, en particulier, à l'occasion de fortes précipitations, d'un bassin versant agricole dominant ; qu'elle demande la condamnation solidaire de la commune de Cerdon-du-Loiret et de l'Etat à l'indemniser des conséquences dommageables de ces inondations successives ;

Considérant, en premier lieu, que Mme X, qui soutient que les dommages qu'elle a subis ont pour origine un vice de conception du réseau d'évacuation des eaux pluviales, recherche la responsabilité de l'Etat à raison d'une faute commise par la DDE du Loiret, en qualité de maître d'oeuvre, dans l'exercice de ses obligations de conseil et d'information vis-à-vis de la commune de Cerdon-du-Loiret, maître de l'ouvrage ; que, toutefois, s'agissant d'un ouvrage achevé et reçu sans réserve, l'existence d'une telle faute ne peut être invoquée que par le maître d'ouvrage, dans le cadre d'une action en responsabilité engagée à l'encontre du maître d'oeuvre ; que, par suite, les conclusions de la demande présentées devant le Tribunal administratif d'Orléans par Mme X étaient irrecevables en tant qu'elles étaient dirigées contre l'Etat ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte également de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif d'Orléans, que les inondations qui ont affecté la maison de Mme X ont trouvé leur origine dans les capacités insuffisantes d'évacuation des eaux pluviales, en cas de très fortes précipitations, du réseau que la commune de Cerdon-du-Loiret a fait construire le long de la route de Coullons ; que la requérante, qui avait, dans les circonstances de l'espèce, la qualité de tiers par rapport à l'ouvrage public en cause, a subi dans ces mêmes circonstances un dommage de nature à engager la responsabilité de la commune à son égard ;

Considérant, enfin, que Mme X, qui ne démontre pas qu'elle aurait de nouveau été victime en 1999 d'une nouvelle inondation de sa maison, ne justifie pas plus qu'en première instance du préjudice matériel dont elle réclame réparation et qui consisterait en la différence entre le montant des dommages subis et celui de l'indemnité versée à ce titre par son assureur ; qu'en revanche, Mme X, qui fait valoir, à juste titre, que ces inondations répétées ont provoqué un surmenage physique et psychique pour elle comme pour son mari, qui était gravement malade et est décédé depuis lors, est fondée à se prévaloir de troubles certains dans ses conditions d'existence ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'importance de ces troubles en condamnant la commune de Cerdon-du-Loiret à lui verser de ce chef une somme de 6 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a entièrement rejeté sa demande ;

Sur les conclusions d'appel en garantie de la commune de Cerdon-du-Loiret :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, malgré les premiers calculs qui envisageaient le renforcement d'un exutoire existant, le projet de réseau d'évacuation des eaux pluviales élaboré par la DDE, qui avait une mission de maîtrise d'oeuvre complète, n'a pas pris en compte l'incidence du ruissellement en provenance du bassin versant agricole dominant, en particulier, en cas de changement de la nature des cultures pratiquées sur ces terres ; qu'il en est résulté, comme il a été dit, des capacités insuffisantes d'évacuation des eaux pluviales en cas de très fortes précipitations ; que, dans ces conditions, ce vice de conception n'étant pas décelable par le maître d'ouvrage aussi bien lors de l'adoption du projet que lors de la réception des travaux, la commune de Cerdon-du-Loiret est fondée à demander que l'Etat la garantisse de la totalité des condamnations prononcées à son encontre au profit de Mme X ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à l'égard de Mme X dans la présente instance, soit condamné à payer à celle-ci la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'elles font également obstacle à ce que Mme X soit condamnée à verser à la commune de Cerdon-du-Loiret la somme que celle-ci réclame ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de condamner la commune de Cerdon-du-Loiret à verser à Mme X une somme de 1 500 euros et de condamner l'Etat à verser à la commune de Cerdon-du-Loiret la même somme ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 3 du jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 1er mars 2005 sont annulés.

Article 2 : La commune de Cerdon-du-Loiret est condamnée à verser à Mme X une indemnité de 6 000 euros (six mille euros).

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

Article 4 : L'Etat est condamné à garantir la commune de Cerdon-du-Loiret des condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci par les articles 2 et 4 du présent arrêt.

Article 5 : La commune de Cerdon-du-Loiret versera à Mme X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : L'Etat versera à la commune de Cerdon-du-Loiret une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Les conclusions de la commune de Cerdon-du-Loiret tendant à ce que Mme X soit condamnée à lui verser une somme en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Thérèse X, à la commune de Cerdon-du-Loiret et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

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N° 05NT00675

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT00675
Date de la décision : 29/06/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CADENAT
Rapporteur ?: M. Yves MARGUERON
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : CASADEI-JUNG

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-06-29;05nt00675 ?
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