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08/06/2006 | FRANCE | N°04NT00955

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre b, 08 juin 2006, 04NT00955


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juillet 2004, présentée pour M. Gilbert X, demeurant ..., par Me Le Roux-Cattelot, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 00-1355 et 00-1437 en date du 29 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté d'une part sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 à 1996, d'autre part sa demande tendant à la décharge de l'obligation qui lui a été notifiée

par commandement en date du 11 avril 2000 de payer la somme de 37 243 F (5...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juillet 2004, présentée pour M. Gilbert X, demeurant ..., par Me Le Roux-Cattelot, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 00-1355 et 00-1437 en date du 29 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté d'une part sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994 à 1996, d'autre part sa demande tendant à la décharge de l'obligation qui lui a été notifiée par commandement en date du 11 avril 2000 de payer la somme de 37 243 F (5 677,66 euros) correspondant à des impositions à l'impôt sur le revenu qui lui sont réclamées au titre des années 1995 et 1996 ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

3°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2006 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- les observations de Me Bernot, avocat de M. X ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre le commandement de payer :

Considérant qu'aux termes de l'article R.281-1 du livre des procédures fiscales : “Les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L.281 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne solidaire. Elles font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes les justifications utiles, en premier lieu, au chef de service du département ou de la région dans lesquels est effectuée la poursuite” ; qu'aux termes de l'article R.281-4 du même livre : “Le chef de service se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande, dont il doit accuser réception. Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le juge compétent tel qu'il est défini à l'article L.281. Il dispose pour cela de deux mois à partir : a. Soit de la notification de la décision du chef de service ; b. Soit de l'expiration du délai de deux mois accordé au chef de service pour prendre sa décision. La procédure ne peut, à peine d'irrecevabilité, être engagée avant ces dates. Elle doit être dirigée contre le comptable chargé du recouvrement” ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si M. X a adressé, le 17 avril 2000, un courrier au Trésor public de Lorient (Morbihan), il s'est borné dans cette lettre à faire part de son intention de contester le commandement de payer et à solliciter des informations sur l'autorité auprès de laquelle il devait adresser sa réclamation ; que cette lettre ne peut ainsi être regardée comme une demande tendant à la contestation du commandement ; que n'étant pas saisie d'une réclamation, la trésorerie de Lorient n'était pas tenue de transmettre le courrier de M. X au trésorier-payeur général ; qu'il suit de là que la demande de M. X d'opposition au recouvrement directement adressée devant le tribunal sans réclamation préalable était, par application des dispositions précitées, irrecevable ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer notifiée par commandement en date du 11 avril 2000 ;

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions contestées :

En ce qui concerne l'année 1994 :

Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : “1 ; Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes les occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus” ; qu'aux termes de l'article 93 du même code : “I- Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession” ;

Considérant que par le redressement en litige, l'administration a fixé à la somme de 215 698 F les bénéfices non commerciaux réalisés par M. X au cours de l'année 1994, au titre de son activité occulte de formateur sous couvert du Syndicat national des centres et conseillers matrimoniaux (SNCCM), association dont il était le trésorier ;

Considérant, en premier lieu, que l'imposition en litige a été établie, au titre de l'année 1994, selon la procédure de redressement contradictoire et que M. X a refusé les redressements ; qu'ainsi la preuve de son bien-fondé incombe à l'administration ; que le ministre soutient toutefois que M. X était en situation d'évaluation d'office de son bénéfice non commercial, faute d'avoir déclaré son activité auprès d'un centre de formalités des entreprises ; qu'il résulte cependant de l'article 371 AA de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année en litige, que parmi les titulaires de bénéfices non commerciaux, seuls sont tenus de se faire connaître d'un centre de formalités des entreprises les membres des professions libérales ; que M. X n'ayant pas cette qualité, il n'était donc pas soumis à une telle obligation ; qu'en conséquence, il relevait de la procédure contradictoire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment des procès-verbaux de police établis dans le cadre des poursuites pénales engagées à l'encontre de M. X, que l'intéressé a exercé durant l'année 1994 des actions de formation sous couvert du SNCCM, et qu'il a reconnu lors de son audition avoir prélevé des sommes d'argent sur les comptes bancaires du SNCCM ; que M. X conteste le montant imposable établi par l'administration, en faisant valoir que ses bénéfices non commerciaux de l'année 1994 doivent être limités à 77 928,70 F, après déduction des frais justifiés figurant sur les comptes bancaires qu'il produit, frais qu'il a réglés lui-même en espèces ou frais de secrétariat qu'il a pris en charge ; qu'il résulte toutefois des constatations faites par la Cour d'appel de Rennes dans son arrêt du 30 avril 2002, qui a condamné l'intéressé pour abus de confiance, que M. X a retiré à son profit la somme de 304 799,42 F ; que l'autorité absolue de la chose jugée s'attache aux constatations du juge pénal quant à la matérialité de ces faits et leur imputabilité au requérant, constatations qui constituent le support nécessaire du dispositif de la décision ; que même en déduisant de cette somme, comme le demande M. X, les frais de secrétariat, ainsi que le montant des pensions alimentaires versées par son ex-épouse, la somme en résultant reste supérieure à celle qui a été retenue par l'administration ; que si M. X soutient qu'il convient de déduire de cette somme, indépendamment des frais de secrétariat, 82 720,33 F correspondant à des frais liés aux formations dispensées, ainsi que 8 734,39 F correspondant aux frais qu'il aurait réglés en espèces, il ne fournit aucun justificatif permettant de démontrer qu'il a lui-même fait l'avance de ces frais ; qu'enfin, si M. X soutient que l'administration a pu vérifier la réalité des dépenses qu'il a prises en charge et qui lui ont été remboursées dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'Ordre national des conseillers en relations humaines (ONCRH), lequel n'a fait l'objet d'aucun redressement, ce moyen est en tout état de cause sans portée utile dès lors que les redressements portent sur des prélèvements opérés sur les comptes du SNCCM et sur ceux de l'ONCRH ; que, dans ces conditions, l'administration apporte la preuve du bien-fondé du redressement ;

En ce qui concerne les années 1995 et 1996 :

Considérant que l'administration a taxé d'office, sur le fondement des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales, des sommes inscrites sur ses comptes bancaires, et regardées comme d'origine indéterminée, dont le total a été établi à 70 717 F (10 780,74 euros) pour 1995 et à 102 070 F (15 560,47 euros) ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.16 du livre des procédures fiscales : “En vue de l'établissement de l'impôt, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...)” ; qu'aux termes de l'article L.69 du même livre : “(…) Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes (…) de justifications prévues à l'article L.16” ; que par courriers des 2 et 3 octobre 1997, l'administration a demandé à M. X des éclaircissements et justifications sur des crédits figurant sur ses comptes bancaires ; qu'en réponse l'intéressé s'est borné à répondre que ces sommes correspondaient à des dons de ses parents, explication admise par le vérificateur, et à des remboursements de frais de l'ONCRH et de l'AADCM, sans apporter aucune justification sue ce dernier point, de sorte que l'administration a pu le mettre en demeure d'avoir à compléter ses réponses ; qu'en réponse aux mises en demeure du 19 décembre 1997, M. X s'est borné à réitérer ses explications sans apporter aucune pièce, et à proposer un entretien devant se tenir le 13 février 1998 ; qu'il n'a donc fourni aucune justification probante dans le délai de 30 jours imparti par les mises en demeure ; qu'il n'est pas établi en tout état de cause que l'administration n'aurait pas tenu compte des éléments qu'il a produits lors d'entretiens du 17 décembre 1997 et du 13 février 1998 ; qu'ainsi l'administration n'a pas méconnu les articles L.16 et L.69 précités du livre des procédures fiscales en taxant d'office M. X à raison de revenus d'origine indéterminée au titre des années 1995 et 1996 ; que M. X ne peut utilement se prévaloir des dispositions contenues dans la documentation administrative de base n° 5 B 8221 paragraphes 3 et 4 qui étant relatives à la procédure d'imposition, ne comportent pas d'interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il est loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L.69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que les sommes taxées d'office, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ; qu'il est constant que ces sommes proviennent de l'ONCRH, association créée en octobre 1994 par M. X qui y occupait les fonctions de secrétaire et de président, et de l'Association d'aide au développement du conseil matrimonial (AADCM), créée en juillet 1994, associations par l'intermédiaire desquelles M. X a poursuivi son activité de formation et accessoirement, de vente de logiciels, exercée précédemment sous couvert du SNCCM ; que ces sommes étaient dans ces conditions, comme pour l'année 1994, imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et non en tant que revenus d'origine indéterminée ; qu'il appartient toutefois à M. X, qui a été régulièrement taxé d'office, d'apporter la preuve de l'exagération de l'imposition qu'il conteste, en apportant le cas échéant des éléments probants permettant d'obtenir une réduction de l'imposition litigieuse ;

Considérant que l'administration a en défense évalué le bénéfice non commercial réalisé par M. X, par l'intermédiaire de l'ONCRH et de l'AADCM, à 104 596 F pour l'année 1995 et à 146 964 F pour l'année 1996 ; que M. X fait valoir que seules les sommes de 3 007,10 F pour 1995 et de 2 246,95 F pour 1996 sont taxables et que les sommes imposées par l'administration constituent des remboursements de frais qu'il a engagés pour le compte tant de l'ONCRH que de l'AADCM ; que s'il produit à l'appui de son argumentation des extraits de compte et de très nombreuses factures, il n'apporte toutefois pas la preuve qu'il a pris en charge par ses fonds propres, les frais en cause ; que compte tenu de la confusion entretenue par M. X entre son patrimoine personnel et les fonds des associations sous le couvert desquelles il a travaillé, et eu égard à l'absence de comptabilité fiable, les documents qu'il a produits apparaissent en grande partie inexploitables ; que par ailleurs l'administration a déjà tenu compte de ce que certaines des sommes en litige provenaient de dons des parents de M. X, et de pensions alimentaires versées par son ex-épouse, et ne les a pas imposées ; que dans ces conditions, M. X n'apporte pas la preuve de l'exagération du supplément d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 1995 et 1996 ;

Considérant que, par ailleurs, les erreurs ayant entaché le déroulement de la procédure pénale concernant M. X, à les supposer établies, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition et sur le bien-fondé des suppléments d'impôt en litige ;

Considérant enfin que si M. X invoque sa situation financière très difficile, il n'appartient pas au juge administratif d'accorder une remise gracieuse ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gilbert X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 04NT00955

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre b
Numéro d'arrêt : 04NT00955
Date de la décision : 08/06/2006
Sens de l'arrêt : A saisir ultérieurement
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MAGNIER
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : LE ROUX-CATTELOT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-06-08;04nt00955 ?
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