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20/04/2006 | FRANCE | N°04NT01331

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre b, 20 avril 2006, 04NT01331


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 novembre 2004, présentée pour M. et Mme Maurice X, demeurant ..., par Me de Lorgeril, avocat au barreau de Saint-Nazaire ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000954 en date du 18 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1997 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser

une somme de 15 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrat...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 novembre 2004, présentée pour M. et Mme Maurice X, demeurant ..., par Me de Lorgeril, avocat au barreau de Saint-Nazaire ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000954 en date du 18 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1997 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 2006 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- les observations de Me Griffon, substituant Me de Lorgeril, avocat de M. et Mme X ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que contrairement à ce que soutiennent les requérants, les premiers juges ont répondu à leur moyen tiré du non-respect de l'intention du législateur ; qu'en estimant que la société était indirectement détenue par une autre, le tribunal administratif a nécessairement répondu au moyen tiré de ce que la société devait pouvoir prouver l'absence de détention indirecte par une autre société ;

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : “I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 (…) qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création (…) Les bénéfices ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération (…) II. Le capital des sociétés nouvelles ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés. Pour l'application du premier alinéa, le capital d'une société nouvelle est détenu indirectement par une autre société lorsque l'une au moins des conditions suivantes est remplie : un associé exerce en droit ou en fait la fonction de gérant ou de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une autre société ; un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise (…) III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au I.” ;

Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées du II de l'article 44 sexies définissent de manière précise et sans ambiguïté les hypothèses de détention indirecte d'une société par une autre, sans qu'il soit nécessaire de se référer aux travaux parlementaires pour les interpréter ; que M. et Mme X ne peuvent dès lors utilement invoquer une intention qu'aurait eue le législateur pour soutenir que le bénéfice du régime d'exonération prévu par l'article 44 sexies ne serait refusé qu'aux entreprises qui sont privées de toute autonomie réelle ; que sur ce point l'instruction n° 4 A-5-89 du 25 avril 1989 n'ajoute rien à la loi fiscale ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société Kriss Laure, qui relève du régime fiscal des sociétés de personnes et qui exerce l'activité de distribution de produits diététiques, a été créée le 8 décembre 1995 par M. et Mme X qui en détiennent chacun la moitié du capital ; qu'il est constant qu'à la date à laquelle cette société a débuté son activité, M. X détenait la totalité des parts de l'EURL Brice, entreprise créée en 1992 et qu'il en était également le gérant ; qu'il suit de là que la SARL Kriss Laure devait être regardée comme indirectement détenue dès sa création à plus de 50 % par une autre entreprise, au sens du II de l'article 44 sexies précité ; que si les requérants, qui ne remettent pas en cause ces constatations, font valoir que l'EURL Brice et la SARL Kriss Laure ont deux activités totalement différentes, que l'EURL Brice a un caractère exclusivement patrimonial et n'exerce en fait aucune activité et ne réalise aucun chiffre d'affaires, que les deux entreprises n'ont aucun lien de dépendance ou de complémentarité et que Kriss Laure est une véritable entreprise nouvelle, qui crée et commercialise des produits alimentaires diététiques, ces circonstances sont sans influence sur l'appréciation à porter au regard de la notion de détention indirecte, au sens de l'article 44 sexies précité ; qu'ainsi, à défaut de remplir l'ensemble des conditions posées à l'article 44 sexies du code général des impôts, la SARL Kriss Laure ne pouvait bénéficier de l'exonération de taxe professionnelle prévue par ce texte ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. et Mme X soutiennent que le législateur a modifié, par l'article 92 de la loi de finances pour 2000, les dispositions du II de l'article 44 sexies, afin de réserver la notion de détention indirecte aux cas dans lesquels la société nouvelle est détenue par une autre société dont l'activité est similaire ou complémentaire, le moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant dès lors que ces nouvelles dispositions, entrées en vigueur à une date postérieure à l'année au titre de laquelle l'imposition en litige a été établie, sont inapplicables en l'espèce ;

Considérant, en quatrième lieu, que les requérants se prévalent sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de la tolérance prévue dans l'instruction n° 4 A-5-89 du 25 avril 1989 qui admet que les dispositions relatives à la détention indirecte ne s'appliquent pas aux personnes qui détiennent des droits dans des sociétés dont l'objet exclusif est la gestion immobilière ; qu'il ressort toutefois de l'instruction que l'EURL Brice a pour activité la réalisation d'investissements et la participation à la création de résidences de tourisme ou d'hôtels dans les DOM-TOM ; qu'une telle activité diffère de la gestion immobilière ; que la société ne conteste pas que les résultats de l'EURL Brice sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'ainsi l'EURL Brice ne peut être regardée comme ayant pour objet exclusif la gestion immobilière ; que la société Kriss Laure ne satisfait donc pas aux conditions d'application de la doctrine précitée ;

Considérant, en cinquième lieu, que les requérants invoquent également l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration dans une instruction n° 4 A-3-84 du 16 mars 1984 ; que cette instruction, qui porte sur l'interprétation de dispositions législatives concernant les entreprises créées à partir du 1er janvier et jusqu'au 31 décembre 1984, ne peut, en tout état de cause, être invoquée au bénéfice de la SARL Kriss Laure qui a été créée postérieurement à cette période ;

Considérant, en sixième lieu, que la position prise par les services chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale sur l'activité de l'EURL Brice ne constitue pas, en tout état de cause, une prise de position formelle de l'administration fiscale dont M. et Mme X pourraient se prévaloir sur le fondement de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

En ce qui concerne les frais exposés devant le tribunal administratif :

Considérant que si les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit en rejetant les conclusions présentées au titre des frais exposés et non compris dans les dépens par M. et Mme X, qui ont obtenu le dégrèvement d'office par l'administration, du supplément d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre de l'année 1998 après l'introduction de leur demande, il y a lieu néanmoins, dans les circonstances de l'espèce, et en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à M. et Mme X, une somme de 1 500 euros, au titre des frais exposés par eux en première instance et non compris dans les dépens ;

En ce qui concerne les frais exposés devant la Cour :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, soit condamné à payer à M. et Mme X la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux en appel et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'Etat versera à M. et Mme X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des frais exposés en première instance et non compris dans les dépens.

Article 2 : Le jugement n° 0000954 en date du 18 juin 2004 du Tribunal administratif de Nantes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Maurice X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 04NT01331

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre b
Numéro d'arrêt : 04NT01331
Date de la décision : 20/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. GRANGE
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : DE LORGERIL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-04-20;04nt01331 ?
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