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17/02/2006 | FRANCE | N°05NT00909

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 17 février 2006, 05NT00909


Vu, I, sous le n° 05NT00909, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2005, présentée pour M. André X, demeurant ..., représenté par la SCP d'Aboville, Greteau, avocat au barreau de Rennes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1866 en date du 22 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné solidairement avec la société Socotec à payer à la société Albingia, subrogée dans les droits de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Côtes d'Armor, la somme de 589 775,75 euros, majorée des intérêts à comp

ter du 17 juin 1999, en réparation des dommages affectant les installations d...

Vu, I, sous le n° 05NT00909, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2005, présentée pour M. André X, demeurant ..., représenté par la SCP d'Aboville, Greteau, avocat au barreau de Rennes ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1866 en date du 22 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné solidairement avec la société Socotec à payer à la société Albingia, subrogée dans les droits de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Côtes d'Armor, la somme de 589 775,75 euros, majorée des intérêts à compter du 17 juin 1999, en réparation des dommages affectant les installations de la criée de Saint-Quay-Portrieux ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Albingia ;

3°) subsidiairement, de condamner les sociétés Socotec, GCBB et Budet à le garantir de la totalité des condamnations prononcées à son encontre, la part de responsabilité laissée à la charge de la société Fond Ouest, dans le cadre de la demande présentée à son encontre par la société Socotec, ne pouvant, en toute hypothèse, être inférieure à 90 % ;

4°) de condamner la société Albingia à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu, II, sous le n° 05NT00933, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 20 juin 2005, présentée pour la société FOND OUEST, sise à Longueville (14230), représentée par son gérant, par Me Couetoux du Tertre, avocat au barreau de Rennes ; la société Fond Ouest demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1866 en date du 22 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à garantir la société Socotec, elle-même condamnée à payer à la société Albingia, subrogée dans les droits de la chambre de commerce et d'industrie des Côtes d'Armor, la somme de 589 775,75 euros, majorée des intérêts à compter du 17 juin 1999, en réparation des dommages affectant les installations de la criée de Saint-Quay-Portrieux ;

2°) à titre principal, de surseoir à statuer sur la demande de la société Albingia jusqu'à ce que les juridictions de l'ordre judiciaire aient définitivement statué sur les obligations de celle-ci à l'égard de la CCI des Côtes d'Armor ; subsidiairement, de rejeter les demandes des sociétés Socotec et Albingia tendant à ce qu'elle soit condamnée à réparer partiellement les désordres dont s'agit ; encore plus subsidiairement, de condamner M. X et la société Socotec à la garantir intégralement des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;

3°) de condamner M. X et tout autre succombant à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu, III, sous le n° 05NT01019, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 7 juillet 2005, présentée pour la société ALBINGIA, sise 109/111 rue Victor Hugo à Levallois Perret (92532), représentée par son président, par Me Naba, avocat au barreau de Paris ; la société ALBINGIA demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 99-1866 en date du 22 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné M. X, architecte, solidairement avec la société Socotec à lui payer, en sa qualité de personne subrogée dans les droits de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Côtes d'Armor, la somme de 589 775,75 euros, majorée des intérêts à compter du 17 juin 1999, en réparation des dommages affectant les installations de la criée de Saint-Quay-Portrieux ;

2°) de surseoir à statuer sur ses demandes, dans l'attente de l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes devant statuer sur ses obligations à l'égard de la CCI des Côtes d'Armor ;

3°) de reconnaître que la responsabilité des sociétés GCBB, Budet et Fond Ouest est engagée à son égard ;

4°) de condamner M. X et les sociétés Socotec, GCBB, Budet, Fond Ouest à lui payer les sommes de 28 912,11 euros et 571 584,72 euros, majorées des intérêts à compter du 17 juin 1999, en réparation des désordres affectant les ouvrages dont s'agit ;

5°) d'ordonner la capitalisation des intérêts ;

6°) de condamner M. X, et les sociétés Socotec, GCBB et Budet à lui payer la somme de 7 622 euros au titre des frais exposés devant le tribunal administratif et non compris dans les dépens ;

7°) de condamner in solidum M. X et les sociétés Socotec, GCBB, Budet et Fond Ouest à lui payer la somme de 8 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi du 28 pluviôse, an VIII ;

Vu le code civil ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2006 :

- le rapport de M. Faessel, rapporteur ;

- les observations de Me Greteau, avocat de M. X ;

- les observations de Me Mourmanne substituant Me Naba, avocat de la société ALBINGIA ;

- les observations de Me Flynn substituant Me Salaün, avocat des sociétés GCBB et Budet ;

- les observations de Me Boivin substituant Me Couetoux du Tertre, avocat de la société FOND OUEST ;

- les observations de Me Cordier substituant Me Souet, avocat de la société Socotec ;

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes nos 05NT00933, 05NT00909 et 05NT01019 présentées pour M. X, la société FOND OUEST et la société ALBINGIA sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que par un marché en date du 30 novembre 1989, la chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Côtes d'Armor a confié à M. X, architecte, une mission de conception et de direction des travaux de construction de deux bâtiments à usage de bureaux et d'un bâtiment à usage de criée, sur le port de Saint-Quay-Portrieux ; que la société Socotec a été chargée du contrôle de la solidité des ouvrages ; que les travaux de gros-oeuvre ont été attribués, par un marché en date du 9 septembre 1990, au groupement d'entreprises GCBB et Budet ; que la réception des travaux a été prononcée sans réserves le 15 octobre 1991 ; que le revêtement bétonné du sol de la criée a présenté diverses fissures et déformations dès l'année 1993 ; que ces désordres se sont par la suite aggravés ; que par une ordonnance de référé en date du 29 janvier 1998 et un jugement en date du 26 juillet 2001, le Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc a condamné la société ALBINGIA, assureur de la CCI des Côtes d'Armor, à indemniser cette dernière au titre des dommages affectant lesdits ouvrages ; que par le jugement attaqué en date du 22 avril 2005, le Tribunal administratif de Rennes a, en premier lieu, condamné solidairement M. X et la société Socotec à payer à la société d'assurances ALBINGIA, subrogée dans les droits de la CCI des Côtes d'Armor, la somme de 589 775,75 euros, majorée des intérêts à compter du 17 juin 1999, en réparation des dommages affectant la criée de Saint-Quay-Portrieux, en deuxième lieu, condamné la société Socotec à garantir M. X à hauteur de 30 % des condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci, en troisième lieu, condamné solidairement M. X et la société FOND OUEST, cette dernière étant intervenue en qualité de sous-traitant de M. X pour effectuer une étude du sol, à garantir, à parts égales, la société Socotec à hauteur de 70 % des condamnations prononcées à son encontre, en quatrième lieu, rejeté le surplus des conclusions de la demande de la société ALBINGIA et des appels en garantie de M. X et des sociétés Socotec, FOND OUEST, GCBB et Budet ;

Sur la recevabilité des conclusions de la société ALBINGIA, présentées devant le tribunal administratif :

Considérant qu'aux termes de l'article L.121-12 du code des assurances : ''L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur (…)'' ; qu'il résulte de l'instruction que la société ALBINGIA a versé à la CCI des Côtes d'Armor la somme totale de 590 775,74 euros en réparation des désordres affectant les ouvrages litigieux ; que dès lors, et nonobstant la circonstance que les condamnations prononcées par le Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc n'étaient pas devenues définitives et que d'autres actions étaient engagées par la CCI des Côtes d'Armor à l'encontre de son assureur devant la juridiction judiciaire, la société ALBINGIA était, par application des dispositions susrappelées du code des assurances, recevable à demander au Tribunal administratif de Rennes la condamnation des constructeurs de la criée de Saint-Quay-Portrieux en se prévalant de sa subrogation dans les droits et actions de la CCI ;

Sur les conclusions à fins de sursis à statuer :

Considérant que le juge administratif dirige seul l'instruction ; qu'il résulte de l'instruction que la demande présentée pour la société ALBINGIA devant le tribunal administratif était en état d'être jugée ; que dès lors, les premiers juges n'avaient pas l'obligation, avant de se prononcer eux-mêmes sur le litige qui leur était soumis, d'attendre la solution donnée par la juridiction judiciaire au litige opposant la CCI des Côtes d'Armor à son assureur, la société ALBINGIA ; qu'ils n'étaient d'ailleurs même pas légalement tenus de répondre auxdites conclusions à fins de sursis à statuer ; que pour les mêmes raisons, il n'y a pas lieu pour la Cour de surseoir à statuer sur les présentes requêtes jusqu'à ce que la juridiction judiciaire ait tranché définitivement l'ensemble des litiges opposant la société ALBINGIA à son assuré ;

Sur la responsabilité des constructeurs :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les ouvrages litigieux ont fait l'objet d'une réception sans réserves le 15 octobre 1991 ; qu'il n'est pas contesté que les désordres qui les affectent n'étaient alors pas apparents ; que ces désordres rendent lesdits ouvrages impropres à leur destination ; qu'enfin, le délai de garantie décennale n'était pas expiré le 17 juin 1999, date à laquelle a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Rennes la demande présentée par la société ALBINGIA ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions du rapport de l'expert désigné par ordonnance du 30 septembre 1997 du président du Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, que le terrain sur lequel ont été édifiés les ouvrages litigieux était constitué, sur une épaisseur de plus de 10 mètres, de matériaux non homogènes récemment remblayés et insusceptibles d'offrir une résistance satisfaisante sans création préalable de fondations profondes ; qu'une telle circonstance était connue de M. X lorsque celui-ci, conformément à la mission qui était la sienne aux termes du marché passé avec la CCI des Côtes d'Armor, a procédé à la définition des caractéristiques du projet et choisi de renoncer à toute fondation profonde pour le dallage de la criée ; que dès le début des travaux, les sociétés GCBB et Budet ont, au vu de l'avis d'un technicien spécialisé qu'elles avaient sollicité de leur seule initiative, émis des réserves quant aux qualités mécaniques du sol et communiqué ledit avis à M. X ; que la société FOND OUEST, consultée par M. X, a estimé que la création de fondations profondes n'était pas nécessaire ; que les sociétés GCBB et Budet n'ont repris et achevé les travaux qu'à la suite de la confirmation de cette appréciation par la société Socotec ; qu'ainsi, les désordres qui sont apparus trouvant leur origine dans un vice de conception consistant à n'avoir pas prévu de fondations profondes en dépit de l'instabilité manifeste du terrain, ils ne peuvent être imputés qu'à M. X et aux sociétés FOND OUEST et Socotec, mais non aux sociétés GCBB et Budet, lesquelles n'ont accepté de mener à terme les travaux qu'après avoir formulé des réserves expresses, et suite à l'avis formel des sociétés Socotec et FOND OUEST ; que, toutefois, cette dernière société n'ayant aucun lien contractuel avec le maître d'ouvrage, celui-ci ne pouvait lui demander réparation desdits désordres au titre de la garantie décennale ; que dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que seule la responsabilité de M. X et de la société Socotec était engagée sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil et que les sociétés GCBB et Budet devaient être mises hors de cause ;

Sur le préjudice de la société ALBINGIA :

Considérant que la société ALBINGIA, qui ne soutient pas avoir payé à la CCI des Côtes d'Armor au titre des désordres affectant la criée de Saint-Quay-Portrieux une somme supérieure à celle que lui a accordée le tribunal administratif par le jugement attaqué, n'est dès lors, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que, dans le cadre de la subrogation dont elle se prévaut, les premiers juges auraient fait une évaluation insuffisante de son préjudice ;

Sur les appels en garantie :

Considérant que la société FOND OUEST et M. X étaient liés par un contrat de droit privé ; que par suite, le litige les opposant ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ;

Considérant que les désordres dont s'agit ont essentiellement leur origine dans le vice de conception de l'ouvrage, lequel est imputable à M. X, assisté de la société FOND OUEST, et, à un moindre titre, dans l'appréciation erronée portée par la société Socotec sur les qualités mécaniques du sol d'assiette de l'ouvrage ; que par suite, les premiers juges ont pu, à bon droit, d'une part, condamner solidairement M. X et la société FOND OUEST dont la responsabilité n'a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, pas à être départagée par la juridiction administrative, à garantir la société Socotec à hauteur de 70 % du montant de réparation accordé à la société ALBINGIA et, d'autre part, condamner la société Socotec à garantir M. X à hauteur de 30 % du même montant ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative par le tribunal administratif :

Considérant qu'en condamnant solidairement M. X et la société Socotec à payer à la société ALBINGIA la somme de 1 000 euros en remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ALBINGIA, M. X et la société FOND OUEST ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement susvisé du 22 avril 2005 du Tribunal administratif de Rennes ;

Sur l'appel provoqué de la société Socotec :

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné la société Socotec, d'une part, à indemniser, solidairement avec M. X, la société ALBINGIA et, d'autre part, à garantir M. X à concurrence de 30 % des condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci ; que les conclusions de la société Socotec, qui ont été provoquées par l'appel de M. X et présentées après l'expiration du délai d'appel en vue d'obtenir la garantie des sociétés GCBB et Budet ainsi qu'une réduction de l'étendue de la garantie due à M. X, ne seraient recevables qu'au cas où M. X, appelant principal, obtiendrait lui-même une réduction de l'indemnité définitivement mise à sa charge ; que, le présent arrêt rejetant l'appel de M. X, les conclusions de la société Socotec ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. X, de la société ALBINGIA, de la société Socotec, de la société FOND OUEST, de la société GCBB et de la société Budet tendant à l'application desdites dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. X, de la société FOND OUEST et de la société ALBINGIA, ainsi que l'appel provoqué de la société Socotec, sont rejetés.

Article 2 : Les conclusions des sociétés GCBB et Budet tendant à la condamnation de M. X et de la société ALBINGIA au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. André X, à la société FOND OUEST, à la société ALBINGIA, à la société Socotec, à la société GCBB, à la société Budet et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

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Nos 05NT00909…

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 05NT00909
Date de la décision : 17/02/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: M. Xavier FAESSEL
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : COUETOUX DU TERTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-02-17;05nt00909 ?
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