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14/02/2006 | FRANCE | N°05NT00072

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2eme chambre, 14 février 2006, 05NT00072


Vu I) la requête enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2005, sous le n° 05NT00072, présentée pour la commune de Guichen, représentée par son maire en exercice, par Me Martin, avocat au barreau de Rennes ; la commune de Guichen demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 001290 du 2 décembre 2004 du Tribunal administratif de Rennes en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. et Mme la somme de 37 500 euros en réparation de la moitié des conséquences dommageables de l'illégalité fautive entachant l'arrêté du 13 janvier 1987 par lequel le maire de Guichen (

Ille-et-Vilaine) a accordé à ces derniers un permis de construire une mais...

Vu I) la requête enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2005, sous le n° 05NT00072, présentée pour la commune de Guichen, représentée par son maire en exercice, par Me Martin, avocat au barreau de Rennes ; la commune de Guichen demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 001290 du 2 décembre 2004 du Tribunal administratif de Rennes en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. et Mme la somme de 37 500 euros en réparation de la moitié des conséquences dommageables de l'illégalité fautive entachant l'arrêté du 13 janvier 1987 par lequel le maire de Guichen (Ille-et-Vilaine) a accordé à ces derniers un permis de construire une maison d'habitation ;

2°) de rejeter la demande d'indemnité présentée par M. et Mme devant le Tribunal administratif de Rennes ;

3°) subsidiairement, de retenir la faute de M. et Mme comme cause exonérant totalement la commune de toute responsabilité et de condamner l'Etat à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de condamner M. et Mme à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu II) la requête enregistrée au greffe de la Cour le 31 janvier 2005, sous le n° 05NT00177, présentée pour M. et Mme , demeurant ..., par Me Coudray, avocat au barreau de Rennes ; M. et Mme demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 001290 du 2 décembre 2004 du Tribunal administratif de Rennes en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions indemnitaires tendant à la réparation de la moitié des conséquences dommageables de l'illégalité de l'arrêté du 13 janvier 1987 par lequel le maire de Guichen (Ille-et-Vilaine) leur a accordé un permis de construire une maison d'habitation ;

2°) de condamner la commune de Guichen à leur verser la somme de 147 000 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis ;

3°) de condamner la commune de Guichen à leur verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2006 :

- le rapport de Mme Buffet, rapporteur ;

- les observations de Me Donias, substituant Me Martin, avocat de la commune de Guichen ;

- les observations de Me Guillon, substituant Me Coudray, avocat de M. et Mme ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête n° 05NT00072 de la commune de Guichen (Ille-et-Vilaine) et la requête n° 05NT00177 de M. et Mme sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que par arrêté du 13 janvier 1987, le maire de Guichen a délivré à M. et Mme un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain situé ..., au lieudit “Pont-Réan”, où il est cadastré à la section AB sous le numéro 192 ; que le 29 décembre 1999, le rez-de-chaussée et le garage de la maison de M. et Mme ont été inondés à la suite de la crue de la Vilaine qui a atteint la cote de 18,05 mètres ; que par jugement du 2 décembre 2004, le Tribunal administratif de Rennes a, d'une part, condamné la commune de Guichen à verser à M. et Mme la somme de 37 500 euros en réparation de la moitié des conséquences dommageables de l'illégalité du permis de construire du 13 janvier 1987, d'autre part, condamné l'Etat à garantir ladite commune de 25 % de la condamnation prononcée à son encontre ; que la commune de Guichen interjette appel de ce jugement dont elle demande l'annulation ; que, pour leur part, M. et Mme demandent la réformation de ce même jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions indemnitaires ;

Sur la responsabilité de la commune de Guichen :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la révision du plan d'occupation des sols de la commune de Guichen : “(…) II - Les documents graphiques font apparaître, s'il y a lieu : “1° Toute partie de zone où les nécessités du fonctionnement des services publics, de l'hygiène, de la protection contre les nuisances et de la préservation des ressources naturelles ou l'existence de risques naturels tels que : inondations, érosion, affaissements, éboulements, avalanches, justifient que soient interdites ou soumises à des conditions spéciales les constructions et installations de toute nature, permanentes ou non, les plantations, dépôts, affouillements, forages et exhaussements des sols” ; qu'aux termes de l'article R. 111-3 dudit code, alors applicable : “La construction sur des terrains exposés à un risque tel que : inondation, érosion, affaissement, éboulement, avalanche, peut, si elle est autorisée, être subordonnée à des conditions spéciales. Ces terrains sont délimités par arrêté préfectoral pris après consultation des services intéressés et enquête dans les formes prévues par le décret n° 59-701 du 6 juin 1959 relatif à la procédure d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et avis du conseil municipal.” ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le terrain dont M. et Mme sont propriétaires et pour lequel ils ont obtenu, par arrêté du 13 janvier 1987 du maire de Guichen, l'autorisation de construire leur maison d'habitation, compte tenu de sa situation à une distance de seulement 100 mètres environ de la Vilaine le plaçant dans le champ d'expansion des crues de cette rivière, se trouve exposé à un fort risque d'inondation ;

Considérant qu'il est constant que les documents graphiques annexés au plan d'occupation des sols de la commune de Guichen, approuvé le 4 mars 1985, ne font pas apparaître l'existence d'un tel risque dans la zone où se situe le terrain en cause ; qu'ainsi, ledit plan d'occupation des sols, sur la base duquel le permis de construire du 13 janvier 1987 a été délivré à M. et Mme , est entaché d'illégalité au regard des dispositions de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme ; qu'il est, également, constant que la cote des plus hautes eaux connues de la Vilaine, relevée en 1881 à l'écluse de Pont-Réan, s'est établie à 18,58 mètres ; que, dans ces conditions, la prescription du permis de construire du 13 janvier 1987 selon laquelle “la construction (…) devra être implantée à la cote 17,75 mètres”, n'était pas suffisante pour prévenir le risque d'inondation de la construction autorisée ; qu'il suit de l'ensemble de ce qui précède que le permis de construire du 13 janvier 1987 du maire de Guichen est entaché d'illégalité ; que cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Guichen à l'égard de M. et Mme ;

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme , qui n'ignoraient pas le caractère inondable de leur terrain, ont fait édifier leur maison à une cote de 17,63 mètres, inférieure à celle de 17,75 mètres prescrite par le permis de construire du 13 janvier 1987 ; qu'ainsi, les dommages dont M. et Mme demandent réparation résultent, non de l'illégalité fautive de ce permis, mais de la seule faute commise par les intéressés en faisant construire leur maison à la cote susmentionnée de 17,63 mètres ; qu'une telle faute est de nature à exonérer totalement la commune de Guichen de sa responsabilité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que la commune de Guichen est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à verser à M. et Mme la somme de 37 500 euros en réparation de la moitié des conséquences dommageables de l'illégalité fautive entachant le permis de construire du 13 janvier 1987, d'autre part, que les conclusions de M. et Mme tendant à ce que la commune de Guichen soit condamnée à leur réparer la totalité de ces mêmes conséquences dommageables doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de la commune de Guichen tendant à obtenir la garantie de l'Etat :

Considérant, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les conclusions de M. et Mme tendant à ce que la commune de Guichen soit condamnée à leur réparer les conséquences dommageables de l'illégalité fautive entachant le permis de construire du 13 janvier 1987 doivent être rejetées ; que, par suite, les conclusions de la commune de Guichen tendant à être garantie par l'Etat des éventuelles condamnations prononcées contre elle sont dépourvues d'objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application de ces dispositions, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner, tant la commune de Guichen que M. et Mme au versement des sommes qu'ils se réclament, mutuellement, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 2 décembre 2004 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Guichen est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de la requête de M. et Mme sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Guichen (Ille-et-Vilaine), à M. et Mme et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N°s 05NT00072 et 05NT00177

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 05NT00072
Date de la décision : 14/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : COUDRAY ; COUDRAY ; COUDRAY ; COUDRAY ; COUDRAY ; COUDRAY ; COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-02-14;05nt00072 ?
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