Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 6 mai 2004, présentée pour M. Joseph Y, demeurant au lieudit ... et M. Bernard Z, demeurant au lieudit ... par Me Gourvennec, avocat au barreau de Brest ; MM. Y et Z demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 03-3602 du 11 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'exécution du jugement du 25 avril 2002 de ce tribunal annulant la décision implicite de refus du préfet du Finistère d'exercer ses pouvoirs de police et de conservation du domaine public maritime relativement à un ouvrage de protection contre la mer réalisé par M. , au lieudit “Pors-Eneoc” sur l'Ile de Batz ;
2°) d'enjoindre au préfet du Finistère de prendre les mesures nécessaires à l'exécution du jugement précité, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative ;
3°) de condamner le préfet du Finistère à une astreinte de 200 euros par jour de retard, en cas d'inexécution de l'arrêt de la Cour à intervenir, sur le fondement de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du domaine de l'Etat ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2005 :
- le rapport de M. Sire, rapporteur ;
- les observations de Me Ramaut, substituant Me Gourvennec, avocat de MM. Y et Z et de Mme A ;
- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par une décision du 10 septembre 1981 du directeur départemental de l'équipement du Finistère, M. a été autorisé à poursuivre, sur sa parcelle cadastrée à la section AN sous le n° 284, sise au lieudit “Pors-Eneoc” sur l'Ile de Batz (Finistère), “la construction de (son) ouvrage de défense dans les limites latérales de (sa) propriété en utilisant uniquement des matériaux rocheux” ; qu'après avoir estimé que ledit ouvrage dépassait les limites latérales de la propriété de M. définies par l'autorisation précitée, le Tribunal administratif de Rennes a, par jugement du 25 avril 2002 devenu définitif, annulé la décision implicite de refus née du silence gardé par le préfet du Finistère, sur la demande du 4 avril 2000 de M. Y et de M. Z, respectivement, propriétaires des parcelles cadastrées à la section AN sous les n°s 286 et 668, jouxtant latéralement celle de M. , d'exercer ses pouvoirs de police et de conservation du domaine public maritime ; que M. Y et M. Z soutenant que, nonobstant des travaux réalisés en 2002 par M. en exécution du jugement précité, un empiètement latéral de rochers subsiste au droit de leurs propriétés, interjettent appel du jugement du 11 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'exécution de son jugement précité du 25 avril 2002 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : “En cas d'inexécution d'un jugement (...), la partie intéressée peut demander au tribunal administratif (...) qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution (...) Si le jugement (...) dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte.” ; que l'exécution du jugement du 25 avril 2002 comportait nécessairement, pour le préfet du Finistère, l'obligation de prendre envers M. les dispositions nécessaires pour qu'il soit mis fin aux enrochements débordant les limites latérales de sa propriété ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort de l'instruction et notamment, d'un constat d'huissier du 29 mars 2004 et d'un procès-verbal de délimitation et de bornage dressé le 15 octobre 2004 par un géomètre-expert, que les requérants produisent en appel, ainsi que d'un relevé topographique du 28 avril 2005 établi à la demande du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, que l'ouvrage litigieux de protection contre la mer de M. déborde latéralement sur la parcelle cadastrée AN n° 668, propriété des consorts Z ; que la double circonstance que Mme A, venant aux droits de Mme Z, ait, d'une part, indiqué dans une attestation du 16 mars 2002, signée conjointement avec M. , qu'elle souhaitait le maintien des ouvrages réalisés “en raison de la protection que cet enrochement apporte à sa propriété”, d'autre part, obtenu le 27 septembre 2000 une autorisation temporaire d'occupation du domaine public maritime pour la protection par enrochement de sa propriété, dans la limite, au demeurant, d'une superficie de 5 m², est sans incidence sur la matérialité du débord latéral présenté par l'enrochement réalisé par M. ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort de l'instruction et notamment, du plan topographique précité du 28 avril 2005 que, contrairement à ce que soutient M. Y, les limites que ce document mentionne entre la propriété du requérant et celle de M. sont conformes aux limites établies par le jugement du 14 octobre 1998 du Tribunal d'instance de Morlaix, cité dans un jugement du 16 décembre 2003 du même tribunal relatif à une action en bornage ; qu'il résulte de ce même plan faisant apparaître l'emprise de l'enrochement existant, que celui-ci ne déborde pas la limite latérale de la propriété de M. Y, mais qu'il se situe en-deçà de cette limite ; que ce plan topographique ne saurait être contredit par le constat d'huissier du 29 mars 2004 précité, lequel ne concerne que la propriété des consorts Z ;
Considérant que le préfet du Finistère n'ayant pas pris les mesures qu'impliquait l'exécution du jugement du 25 avril 2002 à l'égard de M. , en ce qui concerne l'empiètement de l'enrochement litigieux au droit de la parcelle AN n° 668, appartenant aux consorts Z, il y a lieu de lui enjoindre d'ordonner à l'intéressé d'enlever les blocs de rocher qui débordent la limite latérale de sa propriété, au droit de celle des consorts Z, dans un délai de 6 mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que M. Z est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions en injonction concernant l'enrochement litigieux débordant sur la propriété des consorts Z, d'autre part, que les conclusions présentées aux mêmes fins par M. Y relativement à sa propriété, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à M. Y et à M. Z la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il est enjoint au préfet du Finistère d'ordonner à M. d'enlever les blocs de rocher qui débordent la limite latérale de sa propriété au droit de celle des consorts Z dans un délai de 6 mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros (cinquante euros) par jour de retard.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il ne prononce pas l'injonction mentionnée à l'article 1er.
Article 3 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par M. Y et les conclusions des requérants tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Joseph Y, à M. Bernard Z, à Mme Anne-Marie A, à M. Jean et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N° 04NT00532
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N° «Numéro»
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