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10/11/2005 | FRANCE | N°04NT00287

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 10 novembre 2005, 04NT00287


Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2004, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Casadei ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 02-908 du 19 décembre 2003 du Tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a limité à 30 000 euros la somme que la communauté d'agglomération Tours Plus a été condamnée à leur payer en réparation des dommages résultant de l'inondation de leur cave ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération Tours Plus à leur payer une somme de 84 564,18 euros en réparation de ces dommages, avec intér

êts et capitalisation ;

3°) de condamner la communauté d'agglomération Tours Plus à ...

Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2004, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Casadei ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 02-908 du 19 décembre 2003 du Tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a limité à 30 000 euros la somme que la communauté d'agglomération Tours Plus a été condamnée à leur payer en réparation des dommages résultant de l'inondation de leur cave ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération Tours Plus à leur payer une somme de 84 564,18 euros en réparation de ces dommages, avec intérêts et capitalisation ;

3°) de condamner la communauté d'agglomération Tours Plus à leur verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2005 :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur ;

- les observations de Me Casadei, avocat de M. et Mme X ;

- les observations de Me Cazcarra, avocat de la communauté d'agglomération Tours Plus ;

- les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, par jugement du 19 décembre 2003, le Tribunal administratif d'Orléans a condamné la communauté d'agglomération Tours Plus à payer la somme de 30 000 euros à M. et Mme X en réparation des dommages résultant de l'inondation de leur cave par des eaux usées en provenance d'une conduite d'égout dont elle avait la charge ; que cet établissement soutient que le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne répond pas au moyen opposé en défense tiré de ce que le réseau d'évacuation était suffisamment dimensionné et qu'aucun défaut d'entretien normal ne pouvait être retenu ; que, cependant, pour prononcer la condamnation litigieuse, le Tribunal a considéré que sa responsabilité était engagée sans faute à l'égard de M. et Mme X, tiers par rapport à l'ouvrage public dont elle avait la gestion, dans la mesure où le dommage trouvait directement sa cause dans un refoulement d'eaux usées en provenance du réseau d'assainissement ; que les premiers juges n'avaient donc pas à répondre au moyen tiré de la conception et de l'entretien conformes de l'ouvrage, inopérant en l'espèce ; que, par suite, le jugement du Tribunal administratif d'Orléans n'est entaché d'aucune omission à statuer et n'est pas irrégulier ;

Sur les conclusions indemnitaires ;

En ce qui concerne la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'inondation de la cave de l'habitation de M. et Mme X, constatée le 1er septembre 2000 à leur retour de vacances, provient d'une surpression créée dans la conduite d'égout desservant la rue Saint-Michel à Saint-Avertin (Indre-et-Loire) où ils résident, qui a provoqué la rupture du raccordement entre la partie publique du branchement au réseau, constituée d'un tuyau en PVC de 125 mm de diamètre, et la partie privative de leur branchement, de nature métallique et de 50 mm de diamètre ; qu'il ressort, notamment, du rapport de l'expertise ordonnée par le président du Tribunal administratif d'Orléans qu'en dépit de la différence de matériau et de diamètre entre ces deux conduites, le joint réalisé entre les deux était suffisamment résistant pour répondre aux exigences techniques prévues par l'article 44 du règlement sanitaire départemental, relatif au cas d'une surpression découlant de l'élévation exceptionnelle du niveau des eaux d'égout jusqu'à celui de la voie publique desservie ; qu'aucune fuite n'avait été constatée entre le 17 juillet 2000, date à laquelle il avait été pratiqué l'hydrocurage du branchement privatif pendant 1 heure 30, et le 11 août 2000, jour du départ en vacances de la famille X ; que le règlement sanitaire départemental n'imposait la pose d'un dispositif empêchant tout refoulement que dans le cas où un appareil d'utilisation est installé à un niveau tel que son orifice d'évacuation se trouve situé au-dessous de ce niveau critique ; que tel n'était pas le cas en l'espèce, la surpression du réseau ayant provoqué la rupture du branchement au raccordement avec sa partie privative et non sur la partie privative en amont d'un appareil d'utilisation ; que, dans ces conditions, le dommage dont M. et Mme X ont été victimes trouve sa cause directe dans le fonctionnement du réseau d'assainissement dont la communauté d'agglomération Tours Plus a la charge et qu'il ne peut leur être imputé aucune faute ayant contribué à sa réalisation ;

En ce qui concerne le préjudice :

Considérant que des eaux usées se sont déversées dans la cave de M. et Mme X sur une hauteur de 60 à 80 centimètres ; que la décontamination de la pièce nécessite des travaux de reprise d'un montant de 26 633 euros toutes taxes comprises ; que si les intéressés font valoir dans leur dernier mémoire que les frais de nettoyage par une entreprise se sont au final élevés à 5 631,23 euros et non pas à 2 987,39 euros comme l'avait estimé l'expert, il résulte du rapport remis par ce dernier, qui a eu en mains la facture du 30 septembre 2000 de l'entreprise Y qu'ils produisent, que le prix demandé ne se justifiait pas, dès lors qu'il était fait état de deux cent treize heures de travail, ce qui était exagéré compte tenu du travail réalisé et du résultat obtenu ; que M. et Mme X ont dû eux-mêmes procéder à l'achat de produits nettoyants et désinfectants en grande quantité ; que les frais correspondants ont été évalués au cours des opérations d'expertise à la somme de 705,84 euros par l'expert, qui s'est fié aux emballages qui avaient été conservés ;

Considérant que M. et Mme X ont fourni à l'expert la liste des objets divers qui se trouvaient dans la cave inondée en indiquant leur valeur ; qu'au vu de ces objets, qui avaient été conservés pour permettre l'évaluation du préjudice subi, l'expert a évalué ce dernier à la somme de 10 320,80 euros, non contestée au cours des opérations d'expertise ; qu'en outre, neuf cent neuf bouteilles et vingt-neuf magnums étaient entreposés dans cette pièce et ont été, soit noyés dans les effluents, soit dégradés dans leur présentation ; qu'il résulte du rapport du sapiteur de l'expert qu'en tout état de cause, la valeur marchande de toutes ces bouteilles n'atteint plus que 10 % de celle d'origine, en raison de la perte de leur étiquette et de la nécessité d'un nettoyage ; que le préjudice subi à ce titre s'élève à la somme de 26 608,45 euros ; qu'en l'absence en revanche de toute justification, M. et Mme X ne sont pas fondés à obtenir le remboursement des frais de location d'une autre cave ;

Considérant que les frais d'huissier acquittés le 2 septembre 2000 par M. et Mme X pour un montant de 98,88 F, soit 15,07 euros, ont été utiles à la solution du litige et composent, comme les frais d'analyse d'eaux et de boues, qui visaient à vérifier le niveau de contamination de leur habitation et qui s'élèvent à la somme de 328,34 euros, un élément du préjudice dont ils peuvent obtenir réparation ;

Considérant que l'immeuble concerné par le sinistre est un vaste pavillon et que les requérants y habitent avec leurs quatre enfants ; qu'ils ont été gravement incommodés par les odeurs persistantes et que les locaux ont été rendus partiellement insalubres par le développement de germes ; qu'il ne résulte pas toutefois de l'instruction que la maison ait été rendue inhabitable ; que M. et Mme X limitent en appel leurs conclusions tendant à l'indemnisation de la perte de jouissance de leur habitation à la période comprise entre le 1er septembre 2000 et le 10 octobre 2001, date de dépôt du rapport d'expertise ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant de cette perte de jouissance et des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, notamment, le temps passé au nettoyage par Mme X, en allouant aux intéressés une somme de 8 000 euros ;

Considérant dès lors que le montant du dommage subi par M. et Mme X doit être fixé à la somme de 77 598,89 euros ; qu'il résulte cependant de l'instruction qu'ils ont perçu de la mutuelle d'assurances du corps de santé français la somme de 7 622,45 euros au titre de la garantie souscrite auprès d'elle pour les dommages de la nature de ceux dont ils demandent réparation à la communauté d'agglomération Tours Plus ; que, comme le soutient l'établissement public intimé, cette somme doit être déduite de la somme susmentionnée de 77 598,89 euros ; qu'ainsi, le montant de la réparation mise à sa charge s'élève à la somme de 69 976,44 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X sont seulement fondés à soutenir que la somme de 30 000 euros que, par le jugement attaqué du Tribunal administratif d'Orléans, la communauté d'agglomération Tours Plus a été condamnée à leur payer doit être portée à 69 976,44 euros ; que le recours incident de la communauté d'agglomération Tours Plus doit être rejeté ;

En ce qui concerne les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que M. et Mme X ont droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 69 976,44 euros à compter du 12 avril 2002, date d'enregistrement de leur demande au Tribunal administratif d'Orléans ; qu'il sera fait droit à leur demande de capitalisation des intérêts, présentée dans un mémoire enregistré par ce tribunal le 19 novembre 2003, date à laquelle était due une année entière d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. et Mme X, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, soient condamnés à payer à la communauté d'agglomération Tours Plus la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la communauté d'agglomération Tours Plus à payer à M. et Mme X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par ceux-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 30 000 euros (trente mille euros) que, par le jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 19 décembre 2003, la communauté d'agglomération Tours Plus a été condamnée à payer à M. et Mme X est portée à 69 976,44 euros (soixante-neuf mille neuf cent soixante-seize euros et quarante-quatre centimes). Cette somme portera intérêts à compter du 12 avril 2002. Les intérêts échus au 19 novembre 2003 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 19 décembre 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X et le recours incident de la communauté d'agglomération Tours Plus sont rejetés.

Article 4 : La communauté d'agglomération Tours Plus versera à M. et Mme X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, à la communauté d'agglomération Tours Plus et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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N° 04NT00287

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 04NT00287
Date de la décision : 10/11/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : CASADEI-JUNG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-11-10;04nt00287 ?
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