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28/06/2004 | FRANCE | N°01NT01862

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 28 juin 2004, 01NT01862


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 septembre 2001, présentée pour le centre hospitalier spécialisé de Pontorson, dont le siège est 50170 Pontorson, représenté par son directeur, à ce dûment habilité, par délibération du conseil d'administration en date du 17 octobre 2001, par Me SALAÜN, avocat au barreau de Nantes ;

Le centre hospitalier spécialisé de Pontorson demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-0078 du 26 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen l'a condamné à verser, d'une part, à M. Laurent X une in

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 septembre 2001, présentée pour le centre hospitalier spécialisé de Pontorson, dont le siège est 50170 Pontorson, représenté par son directeur, à ce dûment habilité, par délibération du conseil d'administration en date du 17 octobre 2001, par Me SALAÜN, avocat au barreau de Nantes ;

Le centre hospitalier spécialisé de Pontorson demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 01-0078 du 26 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen l'a condamné à verser, d'une part, à M. Laurent X une indemnité de 300 000 F en réparation des conséquences domma-geables de son séjour dans cet établissement du 4 au 9 avril 1995, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie (C.P.A.M.) de la Manche une somme de 359 830,42 F, majorée des intérêts au taux légal à compter du 17 mai 2001 ;

2°) de limiter la réparation du préjudice subi par M. X et la C.P.A.M. de la Manche à la fraction correspondant à la perte de chance de ralentir le syndrome malin dont M. X a été victime ;

C

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant des indemnités allouées à M. X et à la C.P.A.M. de la Manche ;

...........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2004 :

- le rapport de M. GUALENI, premier conseiller,

- les observations de Me DORA, substituant Me SALAÜN, avocat du centre hospitalier spécialisé de Pontorson,

- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du droit à réparation de M. X :

Considérant que M. X, après deux hospitalisations au centre hospitalier spécialisé de Pontorson, respectivement, du 27 décembre 1994 au 25 janvier 1995 et du 29 janvier au février 1995, en raison de crises d'angoisse, a été admis une nouvelle fois dans cet établissement le 5 avril 1995 pour les mêmes symptômes avec, en outre, des hallucinations psycho-sensorielles ; qu'en raison des troubles du comportement de M. X, celui-ci a été placé en chambre d'isolement à partir du 6 avril au matin jusqu'au 9 avril ; qu'à cette date, compte tenu de l'altération de son état général et de la suspicion d'un coma fébrile, il a été transféré, dans un premier temps, vers le centre hospitalier d'Avranches en service de réanimation, puis, à compter du 12 avril, vers le centre hospitalier de Saint-Malo ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée en première instance, que M. X présentait alors un syndrome malin des neuroleptiques compliqué de rhabdomyolyse particuliè-rement prononcée au niveau du membre inférieur droit et d'une insuffisance rénale ; qu'il résulte encore de l'instruction que M. X est décrit, tant par le médecin qui a sollicité son hospitalisation que par le praticien qui l'a examiné lors de son admission, comme figé et tremblant ; que, compte tenu de cet état, et alors que des symptômes extra-pyramidaux ont déjà été relevés chez ce patient, il a été prescrit l'arrêt de psychotropes pour pallier le risque d'apparition de syndrome malin des neuroleptiques ; que, dans ces conditions, l'injection d'un neuroleptique très puissant, le 5 avril 1995, doit être regardée comme une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier et directement à l'origine du syndrome apparu chez M. X et dont les conséquences ont été aggravées par le défaut de surveillance étroite que justifiait son état au cours de son maintien, pour une durée excessive, en chambre d'isolement ; qu'ainsi, le centre hospitalier spécialisé de Pontorson n'est pas fondé à soutenir que M. X a seulement été privé d'une chance d'éviter les complications associées au syndrome dont il a été victime ; que, par suite, et en tout état de cause, M. X a droit à la réparation intégrale des conséquences domma-geables de la faute commise par le centre hospitalier spécialisé de Pontorson ;

Sur le préjudice de M. X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en allouant une indemnité de 300 000 F (45 734,71 euros) à M. X, âgé de trente ans lorsque est apparu le syndrome dont s'agit, en réparation des dommages corporels subis, les premiers juges ont, compte tenu de la consolidation de son état au 31 décembre 1997, d'une incapacité permanente partielle de 25 % se traduisant par une gêne dans les différents mouvements, des difficultés de déplacement et à la position debout prolongée le rendant, notamment, inapte à ses anciennes fonctions de cuisinier, des souffrances physiques endurées, évaluées par l'expert à 4 sur une échelle de 7 et d'un préjudice esthétique évalué à 2 sur la même échelle, fait une exacte appréciation des divers troubles dans les conditions d'existence de la victime dont l'état a, par ailleurs, justifié la pause d'un neurostimulateur médullaire à but antalgique qui doit être remplacé tous les quatre ans ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le Tribunal administratif de Caen a fait une évaluation insuffisante de ses préjudices ; que le centre hospitalier spécialisé de Pontorson n'est pas davantage fondé, par la voie du recours incident, à soutenir que le Tribunal a fait une évaluation excessive de ce préjudice ;

Sur les droits de la caisse :

Considérant que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier spécialisé de Pontorson, compte tenu du faible laps de temps écoulé entre la date de reprise de son travail par M. X au mois de novembre 1995 et la survenance de la chute dont il a été victime sur son lieu de travail le 8 mars 1996, alors que la station debout était pénible pour l'intéressé, la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche établit l'existence d'un lien de causalité entre les frais de l'hospitalisation de son assuré du 8 au 13 mars 1996, pris en charge pour un montant de 15 050 F, et les séquelles dont celui-ci reste atteint du fait de la faute commise par le centre hospitalier ; que, dès lors, ce dernier, n'est pas fondé à soutenir que la somme de 359 830,17 F qu'il a été condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche au titre des débours exposés au profit de M. X doit être ramenée à la somme de 52 561,40 euros (344 780,17 F) ;

Sur les conclusions de Mme X :

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a fait droit partiellement aux conclusions présentées par M. X et la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche et a rejeté les conclusions présentées par Mme X tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs tendant à la réparation des troubles dans les conditions d'existence qu'ils subissent en raison de l'état de santé de leur mari et père ; que le centre hospitalier spécialisé de Pontorson par la requête susvisée ne défère à la Cour que la partie du jugement qui statue sur les demandes de M. X et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche ; que les conclusions du recours incident de Mme X tendant à l'annulation du même jugement en tant qu'il rejette ses demandes présentées tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants soulèvent un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel principal ; que lesdites conclusions, enregistrées au greffe de la Cour le 21 novembre 2001, soit après l'expiration du délai imparti pour faire appel contre le jugement attaqué, dont Mme X a reçu notification le 27 juillet 2001, ne sauraient davantage être recevables en tant qu'appel principal ;

Sur les intérêts :

Considérant que M. X a droit aux intérêts légaux sur la somme de 52 561,40 euros (344 780,17 F), à compter de la date de réception de sa demande préalable par le centre hospitalier spécialisé de Pontorson ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le centre hospitalier spécialisé de Pontorson à payer à M. X et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche les sommes, respectivement, de 1 000 euros et de 914,69 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier spécialisé de Pontorson et le recours incident présenté par Mme X tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants sont rejetés.

Article 2 : L'indemnité de 300 000 F (trois cent mille francs) que le centre hospitalier spécialisé de Pontorson a été condamné à payer à M. Laurent X par le jugement du 26 juillet 2001 du Tribunal administratif de Caen, au cas ou celui-ci n'aurait pas encore été exécuté, portera intérêts à compter de la date de la réception de sa demande préalable par le centre hospitalier spécialisé de Pontorson.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours incident de M. Laurent X est rejeté.

Article 4 : Le centre hospitalier spécialisé de Pontorson versera à M. Laurent X et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche les sommes, respectivement, de 1 000 euros (mille euros) et de 914,69 euros (neuf cent quatorze euros et soixante-neuf centimes) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier spécialisé de Pontorson, à M. et Mme X, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche et au ministre de la santé et de la protection sociale.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 01NT01862
Date de la décision : 28/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Christian GUALENI
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : SALAÜN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-06-28;01nt01862 ?
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