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09/04/2004 | FRANCE | N°01NT02276

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 09 avril 2004, 01NT02276


Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 2001, sous le n° 01NT02276, présentée pour M. Philippe X, demeurant ..., par Me BOULLOCHE, avocat au barreau de Paris ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 98-3900 en date du 24 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné l'hôpital de Lesneven à payer au Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN la somme de 560 013,03 F et l'a condamné, solidairement avec la société SOBRETEC, à garantir l'hôpital à concurrence de la moitié des condamnations prononcées

contre celui-ci ;

2°) de rejeter la demande du Groupement COLESCO-MARIN ains...

Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 2001, sous le n° 01NT02276, présentée pour M. Philippe X, demeurant ..., par Me BOULLOCHE, avocat au barreau de Paris ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 98-3900 en date du 24 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné l'hôpital de Lesneven à payer au Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN la somme de 560 013,03 F et l'a condamné, solidairement avec la société SOBRETEC, à garantir l'hôpital à concurrence de la moitié des condamnations prononcées contre celui-ci ;

2°) de rejeter la demande du Groupement COLESCO-MARIN ainsi que l'appel en garantie présenté contre lui par l'hôpital de Lesneven ;

3°) de condamner l'hôpital de Lesneven à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

...............................................................................................................

C

Vu, II, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 janvier 2002, sous le n° 02NT00022, présentée pour l'hôpital local de Lesneven, représenté par son président en exercice, à cette fin dûment habilité par une délibération du conseil d'administration en date du 20 décembre 2001, par Me GOSSELIN, avocat au barreau de Rennes ;

L'hôpital local de Lesneven demande à la Cour :

- à titre principal :

1°) de réformer le jugement n° 98-3900 du 24 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à payer au Groupement COLESCO-MARIN la somme de 560 013,03 F ;

2°) de rejeter la demande du Groupement ;

- à titre subsidiaire :

1°) de réformer le jugement en tant que ledit jugement a limité la condamnation de M. X et de la société SOBRETEC à le garantir à concurrence de la moitié seulement des condamnations prononcées contre lui ;

2°) de les condamner solidairement à le garantir à concurrence de la totalité des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui ;

3°) de condamner qui de droit à lui verser la somme de 131 191,40 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2004 :

- le rapport de Mme JACQUIER, premier conseiller,

- les observations de Me CHAUVEL, substituant Me GOSSELIN, avocat de l'hôpital local de Lesneven,

- les observations de Me KERJEAN, avocat du groupement d'entreprises COLESCO-MARIN,

- les observations de Me SALLIOU, substituant Me ANDRE, avocat de la société SOBRETEC,

- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. X et de l'hôpital local de Lesneven sont relatives au règlement du même marché et présentent à juger de questions semblables ; qu'il y a lieu, par suite, de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que par marché du 7 juin 1994, l'hôpital local de Lesneven a confié au Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN l'exécution des travaux du lot n° 2 gros oeuvre en vue de la construction d'un bâtiment d'hébergement de 80 lits pour personnes âgées, la maîtrise d'oeuvre étant assurée par M. X, architecte et le Bureau d'étude SOBRETEC ; que ces travaux devaient être exécutés pour le prix global et forfaitaire de 7 439 221,79 F TTC ; que, par deux avenants en date du 11 avril et du 25 septembre 1995, le prix du marché a été ramené à 7 312 752,68 F TTC ; qu'après avoir saisi le comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics de Nantes, le Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN a saisi le Tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à la condamnation de l'hôpital local de Lesneven à lui verser diverses indemnités au titre des travaux supplémentaires qu'il avait dû réaliser dans le cadre du marché ; que par le jugement attaqué du 24 octobre 2001, le Tribunal administratif de Rennes a fait droit partiellement à sa demande et condamné solidairement M. X et la société SOBRETEC à garantir l'hôpital local de Lesneven des condamnations prononcées contre lui ;

Sur les conclusions d'appel principal de l'hôpital local de Lesneven et d'appel incident du Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN :

Considérant que pour condamner l'hôpital local de Lesneven à payer au Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN certains travaux supplémentaires réalisés par ce dernier en vue de l'exécution des travaux du lot gros oeuvre dont il était attributaire, le Tribunal administratif de Rennes ne s'est pas fondé sur la théorie de l'imprévision, mais sur l'imprécision des documents contractuels concernant la définition du lot concerné ; que, dès lors, l'hôpital local de Lesneven n'est pas fondé à soutenir que le Tribunal aurait fait une application erronée de la théorie de l'imprévision ;

Considérant que si l'hôpital prétend que, par l'article 4 des deux avenants signés le 11 avril et le 25 septembre 1995 , le Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN aurait renoncé à toute réclamation se rapportant à des faits antérieurs à la date de signature desdits avenants, il ressort des termes de l'article 2 desdits avenants que ceux-ci avaient pour seul objet la suppression de certains des travaux devant être réalisés ; que si les entrepreneurs doivent être regardés comme ayant renoncé à toute contestation en ce qui concerne la rémunération de travaux supplémentaires ou de ceux résultant de sujétions imprévues, ce n'est qu'en ce qui concerne les parties de l'ouvrage qui faisaient l'objet de ces avenants ; que, par suite, l'hôpital local de Lesneven ne saurait donner une portée générale qu'elle n'a pas à la clause susmentionnée de ces avenants ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si le marché a été conclu pour un prix global et forfaitaire, le Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN a dû exécuter un certain nombre de travaux qui n'étaient pas prévus par les documents contractuels et notamment par le cahier des clauses techniques particulières et le devis quantitatif estimatif, qui, en l'absence de devis descriptif des travaux, décrivaient sommairement les travaux devant être réalisés ; que la circonstance, à la supposer établie, que la nécessité de réaliser lesdits travaux aurait pu être déduite d'une lecture attentive des plans du projet de bâtiment, ne saurait avoir pour conséquence de faire obstacle au droit à rémunération du Groupement dès lors que les travaux en question n'étaient pas expressément prévus par un devis descriptif précis ou par tout autre document contractuel et que certains ont, de surcroît, dû faire l'objet d'une réalisation différente de celle prévue par les documents contractuels, en raison de la contrariété existant entre les travaux prévus par les documents contractuels du lot peinture et ceux du lot gros oeuvre ; que le maître d'ouvrage auquel il incombe de définir avec précision les travaux devant être exécutés et qui n'a pas établi un description précise des spécifications techniques de l'ouvrage, conforme aux exigences d'un marché à prix global et forfaitaire, ne saurait soutenir que le Groupement était, en vertu de ses engagements contractuels et notamment de l'article 1.103 du CCTP prévoyant que l'entrepreneur, réputé avoir contrôlé les indications des documents du dossier d'appel d'offres et s'être assuré qu'elles sont exactes, suffisantes et concordantes, pour refuser de payer les travaux supplémentaires effectués par le Groupement dès lors que les travaux en question ont été réalisés soit, à la demande expresse des maîtres d'oeuvre, ainsi que cela résulte de l'examen des rapports de chantier, soit, ont été indispensables à l'exécution de l'ouvrage selon les règles de l'art ; que, pour les mêmes raisons, la circonstance que les travaux en question qui n'étaient pas prévus par les documents contractuels, n'ont fait l'objet d'aucun avenant, ne saurait faire obstacle au droit à rémunération du Groupement ; qu'ainsi l'hôpital local de Lesneven est tenu de payer le montant des travaux supplémentaires ainsi exécutés, même si, comme il l'allègue, l'imprécision des documents contractuels en qui concerne la définition des travaux est imputable aux maîtres d'oeuvre et même si les travaux ainsi réalisés résultent, au moins en partie, d'exigences du maître d'oeuvre qui n'ont pas fait l'objet d'avenants dès lors que les maîtres d'oeuvre étaient habilités, en vertu de la mission qui leur avait été confiée, à diriger les travaux ; qu'enfin, la circonstance que les maîtres d'oeuvre auraient été indemnisés par leur assureur, au titre de certains travaux supplémentaires, notamment de la réalisation du quai ouest, ne saurait faire obstacle à ce que les travaux réalisés par le Groupement lui soient payés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Groupement a droit à être rémunéré des travaux supplémentaires concernant la réalisation du quai ouest et du belvédère, de l'isolation des locaux techniques, du traitement des joints creux de façade, des canalisations hors dallage dans l'emprise du bâtiment, qui n'étaient pas prévus par les documents contractuels et ont été réalisés soit à la demande des maîtres d'oeuvre, soit, en l'absence d'ordre de service ou d'ordre verbal, parce qu'ils étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art ; qu'en ce qui concerne l'enduit des bétons de façade prévu par les documents contractuels mais dont la réalisation technique a dû être modifiée en raison de la modification des spécifications techniques du lot peinture, il y a lieu d'indemniser le Groupement à concurrence de la moitié seulement du montant de ces travaux qui, s'ils étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, auraient dû, en raison même de l'imprécision des documents contractuels sur les spécifications techniques de l'enduit devant être réalisé, faire l'objet de la part du Groupement de demandes de précisions sur celles-ci ;

Considérant, en revanche, que les travaux relatifs aux remblais, à l'isolation des surfaces de planchers, à la retombée des poutres dans les circulations du bâtiment, à la modification du portique nord, à la réalisation d'un muret d'escalier, à l'angle sud-est du bâtiment, à la souche de cheminée, étaient prévus par les documents contractuels ; qu'à supposer que la réalisation de ces travaux aurait été plus onéreuse que prévue, le caractère global et forfaitaire du marché ne saurait ouvrir au profit de l'entreprise un droit à indemnité dès lors qu'il incombait à l'entrepreneur de mesurer avant d'y souscrire, l'étendue des obligations qu'il assumait ; que la réalisation des bacs à fleurs, d'ailleurs visée par l'avenant n°1 et dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait fait l'objet d'un ordre d'exécution de la part des maîtres d'oeuvre et qu'elle aurait été indispensable à l'exécution de l'ouvrage selon les règles de l'art, ne peut être indemnisée ; que le Groupement ne saurait non plus obtenir une indemnité au titre du préjudice qu'il aurait subi du fait des erreurs de plans ou des retards d'exécution, dès lors qu'il n'en justifie ni l'existence ni l'étendue ; que si l'accès au vide sanitaire a fait l'objet d'une modification en cours d'exécution du marché, il n'est pas établi que celle-ci aurait entraîné des frais supplémentaires à la charge du Groupement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme que l'hôpital local de Lesneven a été condamné à payer au Groupement au titre des travaux supplémentaires par le jugement attaqué doit être réduite à 304 644,94 F (46442,82 euros) hors taxes ; que cette somme devra être augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée au taux applicable à la date d'exécution des travaux en cause ;

Sur les intérêts :

Considérant que le Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN a droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 46442,82 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée à compter de la date de réception de sa réclamation du 13 septembre 1996 par l'hôpital local de Lesneven ;

Sur l'appel principal de M. X en ce qui concerne sa condamnation à garantir l'hôpital local de Lesneven :

Considérant qu'il est constant que l'hôpital local de Lesneven a prononcé le 15 janvier 1996, la réception définitive des travaux confiés à M. X, sans formuler aucune réserve, alors qu'à cette date le litige concernant la rémunération des travaux supplémentaires était connu du maître d'ouvrage ; que si le maître de l'ouvrage estimait que M. X avait commis, dans l'accomplissement de la mission de maîtrise d'oeuvre qui lui avait été confiée, des fautes qui seraient à l'origine des difficultés rencontrées lors de l'exécution des travaux, il lui appartenait de réduire en conséquence, sous le contrôle du juge du contrat le liant à M. X, les honoraires de ce dernier ; qu'en revanche, il ne peut appeler ce maître d'oeuvre à le garantir du paiement de sommes relatives à l'exécution d'un contrat différent ; que, par suite M. X est fondé à se prévaloir de la réception définitive et sans réserves du marché le liant à l'hôpital local de Lesneven, qui a eu pour effet de mettre fin aux rapports contractuels qui étaient nés du marché ; que, dans ces conditions, M. X est fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il l'a condamné par son article 3, à garantir l'hôpital local de Lesneven ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de faire droit aux conclusions présentées au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens par M. X , l'hôpital local de Lesneven, le Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN, et la société SOBRETEC ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que l'hôpital local de Lesneven a été condamné à verser au Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN par le jugement du Tribunal administratif de Rennes du 24 octobre 2001 est réduite à quarante six mille quatre cent quarante deux euros quatre vingt deux centimes (46 442,82 euros). Cette somme sera augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts à compter de la date de réception de sa réclamation du 13 septembre 1996.

Article 2 : L'appel en garantie de l'hôpital local de Lesneven par M. X est rejeté.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X, de l'hôpital local de Lesneven et de l'appel incident du Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la société SOBRETEC tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à l'hôpital local de Lesneven, au Groupement d'entreprises COLESCO-MARIN, à la société SOBRETEC et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 01NT02276
Date de la décision : 09/04/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: Mme Christiane JACQUIER
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : BOULLOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-04-09;01nt02276 ?
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