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21/11/2003 | FRANCE | N°01NT01893

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 21 novembre 2003, 01NT01893


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 septembre 2001, présentée pour la société anonyme Groupe Emeraude, par son président directeur général en exercice, ayant son siège place de la Gare, 14800 Deauville, par Me EUDE, avocat au barreau de Lisieux ;

La S.A. Groupe Emeraude demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-1647 du 11 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 18 août 2000 par laquelle le conseil municipal d'Houlgate a approuvé le choix de la Socié

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 septembre 2001, présentée pour la société anonyme Groupe Emeraude, par son président directeur général en exercice, ayant son siège place de la Gare, 14800 Deauville, par Me EUDE, avocat au barreau de Lisieux ;

La S.A. Groupe Emeraude demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-1647 du 11 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 18 août 2000 par laquelle le conseil municipal d'Houlgate a approuvé le choix de la Société d'Exploitation du Casino d'Houlgate (S.E.C.H.) comme délégataire de l'exploitation du casino municipal, l'économie générale du contrat de délégation et du cahier des charges pour l'exploitation des jeux ;

2°) d'annuler ladite délibération ;

3°) de condamner la commune d'Houlgate à lui payer la somme de 60 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

C+ CNIJ n° 63-02

n° 39-02-02-01

Vu la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques ;

Vu le décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959 modifié, portant réglementation des jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques ;

Vu l'arrêté du 23 décembre 1959 modifié portant réglementation des jeux dans les casinos ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2003 :

- le rapport de Mme JACQUIER, premier conseiller,

- les observations de Me EUDE, avocat de la société anonyme Groupe Emeraude,

- les observations de Me GOHON, avocat de la commune d'Houlgate,

- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par délibération du 11 février 2000, le conseil municipal d'Houlgate a décidé d'adopter le principe du recours à la délégation de service public pour l'exploitation du casino municipal qui avait été jusqu'alors exploité par la Société d'Exploitation du Casino de Houlgate (S.E.C.H.) dans le cadre d'une concession de service public et délégué ses pouvoirs au maire pour mettre en oeuvre la procédure ; que la société d'exploitation du casino de Houlgate et la S.A. Groupe Emeraude ont toutes deux été admises à déposer des offres ; que par la délibération contestée du 18 août 2000, le conseil municipal a approuvé le choix de la S.E.C.H. comme délégataire de l'exploitation du casino municipal, ainsi que l'économie générale du contrat de délégation et du cahier des charges pour l'exploitation des jeux ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.1411-1 du code général des collectivités territoriales : Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat. La collectivité publique dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public. La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l'usager. Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l'autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la collectivité délégante est tenue d'assurer un traitement égal des candidats qu'elle a admis à présenter des offres en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ; que, lorsque la délégation de service public concerne l'exploitation d'un casino, ces règles doivent être combinées avec les exigences de la police spéciale des jeux et des conditions posées par la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques et les textes pris pour son application ; que l'application de ces règles relatives à la police spéciale des casinos ne doit pas avoir pour effet de conduire à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment en limitant l'accès à ce marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ; qu'il en va en particulier ainsi dans les secteurs où des entreprises sont candidates à des délégations de services publics ou à des marchés publics ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales et de celles de la loi du 15 juin 1907, du décret du 22 décembre 1959 et de l'arrêté interministériel du 23 décembre 1959, que les demandes d'autorisations de jeux ne peuvent être présentées qu'après que la commune ait choisi la personne à laquelle elle délègue le service public de l'exploitation du casino ; que la demande, accompagnée du contrat, doit ensuite faire l'objet d'une enquête administrative diligentée par le sous-préfet, puis d'un avis du préfet, avant d'être transmise au ministre de l'intérieur qui statuera après avis de la commission supérieure des jeux instituée par le décret du 6 novembre 1934 ; que les dispositions de l'article 3 du décret susmentionné du 22 décembre 1959 prévoient que le silence gardé pendant plus de quatre mois sur la demande vaut décision de rejet de celle-ci ; qu'il est constant que les autorisations ne sont pratiquement jamais accordées avant l'expiration de ce délai, courant à compter de la transmission du dossier complet de la demande au ministre de l'intérieur et, qu'en particulier pour les demandes d'exploitation d'appareils de jeux dits machines à sous, l'autorisation n'est accordée qu'à l'expiration d'un délai de l'ordre de dix-huit mois ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour attribuer le contrat litigieux à la Société d'Exploitation du Casino d'Houlgate (S.E.C.H.), la commune s'est fondée sur le fait que cette société resterait titulaire d'autorisations de jeux, notamment pour l'exploitation d'appareils de jeux dits machines à sous, après le 31 mars 2001, date de l'expiration du contrat par lequel la commune lui avait délégué le service public de l'exploitation du casino municipal, ou pouvait bénéficier très rapidement du renouvellement d'autorisations, alors que la société requérante avait fait savoir qu'elle ne pourrait pas obtenir, avant un délai de dix-huit mois, toutes les autorisations nécessaires mais qu'elle s'engageait à compenser les pertes financières qui pourraient en résulter pour la commune ; que celle-ci a néanmoins estimé que cette compensation financière risquait de n'être pas suffisante, eu égard au risque de désaffection définitif de la clientèle de son casino si les machines à sous n'y étaient pas exploitées ou y étaient exploitées en moins grand nombre durant une certaine période ; qu'elle a, ainsi, illégalement tenu compte d'un avantage qu'un des candidats tenait de sa situation de précédent délégataire du service public ; qu'ainsi, la S.A. Groupe Emeraude est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la délibération susanalysée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la commune d'Houlgate à verser à la S.A. Groupe Emeraude une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que la S.A. Groupe Emeraude qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à la commune et à la Société d'Exploitation du Casino d'Houlgate (S.E.C.H.) la somme que celles-ci demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Caen en date du 11 juillet 2001, ensemble la délibération du conseil municipal de la commune d'Houlgate en date du 18 août 2000 sont annulés.

Article 2 : La commune d'Houlgate versera à la S.A. Groupe Emeraude une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Groupe Emeraude, à la commune d'Houlgate, à la société d'exploitation du casino d'Houlgate et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 01NT01893
Date de la décision : 21/11/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: Mme Christiane JACQUIER
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : EUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-11-21;01nt01893 ?
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