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27/06/2003 | FRANCE | N°01NT01174

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 juin 2003, 01NT01174


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 4 juillet 2001, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me DE BODINAT, avocat au barreau d'Angers ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 98-2696 du 29 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de Brain-sur-l'Authion (Maine-et-Loire) à leur verser une indemnité de 187 982,21 F, avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 1998, qu'ils estiment insuffisante, en réparation des préjudices que leur a causé la délivrance, par arrêté du 29

janvier 1990, d'un permis de construire illégal ;

2°) de condamner la commune ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 4 juillet 2001, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me DE BODINAT, avocat au barreau d'Angers ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 98-2696 du 29 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de Brain-sur-l'Authion (Maine-et-Loire) à leur verser une indemnité de 187 982,21 F, avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 1998, qu'ils estiment insuffisante, en réparation des préjudices que leur a causé la délivrance, par arrêté du 29 janvier 1990, d'un permis de construire illégal ;

2°) de condamner la commune de Brain-sur-l'Authion à leur verser la somme totale complémentaire de 1 868 282,20 F ;

3°) de condamner la commune de Brain-sur-l'Authion à leur verser une somme de 30 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………………..

C CNIJ n° 60-02-05-01-01

n° 60-02-05-01-03

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2003 :

- le rapport de Mme WEBER-SEBAN, premier conseiller,

- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par arrêté du 29 janvier 1990, le maire de Brain-sur-l'Authion (Maine-et-Loire) a délivré à M. et Mme X un permis de construire un bâtiment à usage d'atelier d'ébénisterie ; que ce permis de construire a été annulé par un jugement du 26 septembre 1991 du Tribunal administratif de Nantes, confirmé par une décision du 15 mai 1995 du Conseil d'Etat ; que M. et Mme X interjettent appel du jugement du 29 mars 2001 du Tribunal administratif de Nantes en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à leur demande tendant à ce que la commune de Brain-sur-l'Authion soit condamnée à leur réparer les conséquences dommageables de la délivrance de ce permis de construire illégal ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Brain-sur-l'Authion demande la réformation de ce même jugement en tant, d'une part, qu'il l'a reconnue entièrement responsable des préjudices subis par les intéressés, d'autre part, qu'il l'a condamnée à payer les frais liés aux procédures judiciaires engagées à l'encontre de ces derniers ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Brain-sur-l'Authion :

Considérant qu'il résulte de leurs écritures de première instance que M. et Mme X doivent être regardés comme ayant présenté des demandes d'indemnisation des dépenses liées, d'une part, à la construction de l'atelier d'ébénisterie illégalement autorisé, d'autre part, à la reconstruction de ce bâtiment ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté les premières conclusions pour défaut de justification et a exclu l'indemnisation du second préjudice ; que, par suite, alors même que dans leur requête, M. et Mme X déclarent modifier leur demande de première instance, leurs conclusions relatives à l'indemnisation des coûts de construction du bâtiment à usage d'atelier illégalement autorisé ne sont pas nouvelles en appel ; qu'ainsi, la fin de non recevoir que la commune de Brain-sur-l'Authion oppose à ces conclusions doit être rejetée ;

Sur la responsabilité de la commune de Brain-sur-l'Authion :

Considérant qu'en accordant un permis de construire illégal, annulé par la juridiction administrative, le maire de Brain-sur-l'Authion a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune envers M. et Mme X, bénéficiaires de ce permis ; que si les conditions d'affichage, par les requérants, de ce permis de construire ont conduit à rendre recevable, alors que la construction était déjà achevée, le recours en annulation présenté par leurs voisins, M. et Mme Y, cette circonstance ne saurait constituer un comportement fautif de la part de M. et Mme X, de nature à exonérer ou seulement atténuer la responsabilité de la collectivité publique résultant de l'illégalité de ce permis de construire ;

Sur l'étendue du droit à réparation :

En ce qui concerne les préjudices matériel et pour troubles dans les conditions d'existence :

Considérant, en premier lieu, que M. X ne justifie nullement que l'annulation du permis de construire un bâtiment à usage d'atelier serait à l'origine de l'impossibilité où il se serait trouvé de continuer à exercer une activité professionnelle dans le secteur de la menuiserie-ébénisterie ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à demander l'indemnisation du manque à gagner résultant de la cessation définitive de son activité ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le Tribunal administratif de Nantes a fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence subis par M. et Mme X du fait des conséquences de la délivrance du permis de construire illégal en fixant à 50 000 F (7 622,45 euros) le montant de l'indemnité destinée à les réparer ; que les requérants, qui ne produisent devant la Cour aucun élément de nature à remettre en cause cette appréciation, ne sont pas fondés à demander le versement d'une indemnité plus élevée au titre du “préjudice moral lié aux troubles qu'ils ont ainsi subis dans leurs conditions d'existence” ;

En ce qui concerne les dépenses liées à la construction du bâtiment irrégulièrement autorisé et à sa démolition :

Considérant, en premier lieu, que M. et Mme X, qui se bornent à produire une attestation sommaire d'un architecte, fixant à 475 000 F (72 413,28 euros) le coût du bâtiment litigieux, sans joindre aucune facture, ne justifient pas du coût réel de construction qu'ils ont dû supporter au titre de l'atelier irrégulièrement autorisé ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la Cour d'appel d'Angers a par un arrêt du 5 novembre 1997, confirmé le jugement du 28 mai 1996 par lequel le Tribunal de grande instance d'Angers a condamné M. et Mme X à démolir l'atelier d'ébénisterie illégalement construit ; que si la Cour d'appel a, sur le fondement des règles de la responsabilité civile, fait droit à cette demande de démolition de l'atelier présentée par M. et Mme Y, en raison du préjudice personnel dont ces derniers se prévalaient au titre des nuisances liées au fonctionnement dudit atelier, la démolition ainsi ordonnée est, comme l'a d'ailleurs relevé la juridiction judiciaire, en relation directe avec la violation de la règle d'urbanisme que constitue l'édification illégale de l'atelier d'ébénisterie ; que, contrairement à ce que fait valoir la commune, le préjudice résultant du coût de la démolition ordonnée par cette décision judiciaire devenue définitive, présente un caractère certain alors même que les intéressés n'auraient pas encore, pour des raisons financières, procédé à cette démolition ; que, toutefois, M. et Mme X, qui se bornent à produire une attestation sommaire établie par un architecte, ne justifient pas du coût réel desdits travaux de démolition ; que leur demande d'indemnisation au titre de ce coût ne peut, dès lors, qu'être rejetée ;

En ce qui concerne les préjudices liés aux condamnations judiciaires dont M. et Mme X ont fait l'objet :

Considérant, en premier lieu, que les dommages et intérêts d'un montant de 40 000 F (6 097,96 euros) auxquels M. et Mme X ont été condamnés, par la Cour d'appel d'Angers, à verser à M. et Mme Y au titre des nuisances subies par ces derniers du fait du fonctionnement de l'atelier litigieux, ne présentent pas de lien direct avec la méconnaissance, par le permis de construire, de la règle d'urbanisme ; que, par suite, la commune de Brain-sur-l'Authion est fondée, par la voie de l'appel incident, à demander la réformation du jugement attaqué en tant que le tribunal l'a condamnée à payer cette même somme à M. et Mme X lesquels, par voie de conséquence, ne sauraient prétendre au versement d'intérêts au taux légal au titre de ladite somme ;

Considérant, en deuxième lieu, que les frais d'un montant de 10 000 F (1 524,49 euros) de la procédure propre à l'instance engagée par M. et Mme Y en vue d'obtenir, d'une part, la démolition de l'atelier, d'autre part, la condamnation à des dommages et intérêts, et mis à la charge de M. et Mme X par la Cour d'appel d'Angers, doivent être regardés comme présentant un lien direct avec la faute commise par la commune, en tant qu'ils concernent une instance visant à la démolition de l'immeuble ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice en résultant pour M. et Mme X en le fixant à la somme de 5 000 F (762,25 euros) dont le paiement doit être mis à la charge de la commune de Brain-sur-l'Authion ; que, de même, il sera fait une juste appréciation de la part devant être mis à la charge de la commune de Brain-sur-l'Authion, des frais d'avoué supportés par M. et Mme X dans le cadre de cette instance judiciaire en la fixant à la moitié du coût total de ces frais, soit à la somme de 3 686,14 F (561,95 euros) ;

Considérant, en troisième lieu, que l'astreinte que M. et Mme X ont été condamnés à payer par le juge judiciaire de l'exécution, pour n'avoir pas procédé à la démolition de l'atelier d'ébénisterie est imputable au seul retard des intéressés à exécuter une décision de justice ; que ces derniers ne sont pas fondés à se prévaloir de ce que leur carence, à la supposer justifiée par la dégradation de leur situation financière, serait la conséquence directe de l'illégalité du permis de construire litigieux dont il n'est pas établi, comme il est dit ci-dessus, qu'elle aurait entraîné la cessation définitive de son activité professionnelle d'ébéniste ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X sont seulement fondés à demander la réformation du jugement attaqué en tant que le Tribunal administratif de Nantes ne leur a pas accordé l'indemnisation des frais liés aux condamnations judiciaires, pour un montant de 3 686,14 F (561,95 euros) ; que, pour sa part, la commune de Brain-sur-l'Authion, est seulement fondée à demander, par la voie de l'appel incident, la réformation de ce même jugement, en tant qu'il l'a condamnée à payer une somme de 45 000 F (6 860,21 euros) au titre du préjudice lié aux condamnations judiciaires ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées, sur le fondement de ces dispositions, tant par M. et Mme X que par la commune de Brain-sur-l'Authion ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 28 657,70 euros (vingt huit mille six cent cinquante sept euros soixante dix centimes) que la commune de Brain-sur-l'Authion (Maine-et-Loire) a été condamnée à payer à M. et Mme X par le jugement attaqué du 29 mars 2001 du Tribunal administratif de Nantes est ramenée à celle de 22 359,45 euros (vingt deux mille trois cent cinquante neuf euros quarante cinq centimes).

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 29 mars 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X et des conclusions d'appel incident de la commune de Brain-sur-l'Authion, ainsi que les conclusions de cette dernière présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, à la commune de Brain-sur-l'Authion et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

- 5 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 01NT01174
Date de la décision : 27/06/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: Mme Catherine WEBER-SEBAN
Rapporteur public ?: M. LALAUZE
Avocat(s) : DE BODINAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-06-27;01nt01174 ?
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