Vu la requête et les mémoires, enregistrés au greffe de la Cour les 7 juin 2001, 31 juillet et 24 octobre 2002, présentés pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me STILLMUNKES, avocat au barreau d'Orléans ;
Les requérants demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 98-686 du 29 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a condamné le syndicat intercommunal à vocation multiple (S.I.V.O.M.) de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu à leur verser une somme de 32 250 F, qu'ils estiment insuffisante, en réparation des préjudices qu'ils ont subi du fait des dégâts occasionnés à leur propriété à la suite de la rupture d'une canalisation d'eau potable et de la résolution de la promesse de vente de ladite propriété ;
2°) de condamner, à titre principal, le S.I.V.O.M. de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu et, à titre subsidiaire, solidairement le S.I.V.O.M. et la commune de Loches aux entiers dépens et à leur verser :
C CNIJ n° 67-02-04-02-02
- une somme de 3 147 euros si mieux n'aime le S.I.V.O.M. effectuer la totalité des travaux préconisés par l'expert,
- une somme de 15 245 euros en réparation de la dépréciation de leur propriété,
- une somme de 5 030 euros correspondant au préjudice financier résultant d'un manque à gagner,
- une somme de 8 358 euros correspondant au reversement du montant d'un séquestre,
- une somme de 15 245 euros pour la perte d'avantages fiscaux,
- une somme de 450 euros par mois jusqu'à la date de la vente de leur propriété,
- une somme de 22 864 euros pour les troubles subis dans leurs conditions d'existence,
- et une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; lesdites sommes portant intérêts, lesquels devront être capitalisés ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2003 :
- le rapport de Mme THOLLIEZ, premier conseiller,
- les observations de Me BAUDRY, substituant la société civile professionnelle GROGNARD-LEPAGE, avocats du S.I.V.O.M. de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu et de la commune de Loches,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour condamner le syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu à verser, par jugement du 29 mars 2001, à M. et Mme X une somme de 32 250 F, le Tribunal administratif d'Orléans a estimé que la responsabilité du syndicat était engagée à leur égard du fait des dégâts occasionnés à leur propriété située ..., à la suite de l'éclatement d'une canalisation du réseau d'eau potable qu'il exploite mais également affirmé que l'impossibilité de donner suite à la vente projetée de leur immeuble était la conséquence nécessaire du sinistre ; que M. et Mme X demandent à la Cour de réformer ledit jugement en ce qu'il a procédé à une estimation insuffisante de ces deux chefs de préjudice ; le syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu par la voie de l'appel incident, demandant à être déchargé de toute condamnation ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par les premiers juges qu'à la suite de l'éclatement dans la nuit du 2 au 3 janvier 1997 d'une canalisation du réseau d'eau potable du syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu la libération d'un volume d'eau important a entraîné une poussée des terres qui a elle-même provoqué une déstabilisation des remparts surplombant un certain nombre de propriétés de la rue Balzac et causé des dégâts auxdites propriétés, et notamment à la propriété des époux X ; qu'eu égard à leur qualité de tiers par rapport à l'ouvrage public que constitue la canalisation, les époux X étaient fondés à rechercher la responsabilité du syndicat intercommunal à vocation multiple, sans que ce dernier puisse se prévaloir de l'abaissement de la température extérieure dans la nuit du 2 au 3 janvier 1997 et du gel qui en serait résulté, cet événement ne présentant pas un caractère de force majeure de nature à l'exonérer de sa responsabilité ;
Sur la réparation des préjudices subis :
Considérant, en premier lieu, qu'à la suite des désordres causés aux propriétés la commune de Loches a procédé aux travaux de remise en état de la propriété des requérants, et notamment de leur appentis situé en fonds de jardin ; qu'il résulte cependant du procès-verbal de constat d'huissier dressé le 25 septembre 2001 que divers travaux concernant l'appentis n'avaient toujours pas été réalisés, les murs présentant toujours des fissures et les gouttières n'étant pas ancrées dans les murs ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en allouant aux intéressés une indemnité de 4 000 euros ; qu'en revanche, les travaux destinés à mettre fin au péril et à remettre les lieux en état ayant été achevés pour l'essentiel en juillet 1998, à l'exception de ceux susmentionnés concernant le seul appentis, le préjudice tiré d'une prétendue dépréciation de la valeur vénale de la propriété ne peut qu'être écarté en raison de son caractère éventuel ;
Considérant, en second lieu, que si les intéressés soutiennent que l'impossibilité de réaliser la vente de leur immeuble du fait du sinistre a eu pour conséquence de les priver des intérêts financiers que leur aurait procuré le placement du produit de la vente pendant la période comprise entre janvier 1997 et février 1998, ce chef de préjudice ne peut qu'être écarté, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le produit de la vente était destiné non à être placé mais à permettre l'achat d'un fonds de commerce à Tarnos ;
Considérant, en troisième lieu, que du fait de l'échec de la promesse de vente de leur propriété, M. et Mme X étaient tenus de rembourser l'acompte de 8 538 euros qui leur avait été versé par Mlle Y ; que ce reversement étant sans lien direct avec le sinistre lui-même, les intéressés ne sont pas fondés à demander la condamnation du syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu à leur verser une indemnité de même montant ;
Considérant, en quatrième lieu, que si M. et Mme X allèguent que lorsque interviendra la vente de leur propriété, celle-ci ne sera plus leur résidence principale et qu'ainsi ils seront tenus d'acquitter une plus-value qui justifie l'allocation d'une indemnité de 15 245 euros, le préjudice invoqué ne présentant qu'un caractère éventuel, leurs prétentions ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le contrat de prêt destiné à permettre aux intéressés d'acquérir leur fonds de commerce à Tarnos découlait de la promesse d'acquisition dudit fonds conclue en juillet 1996 ; qu'ainsi, le préjudice résultant pour les intéressés du paiement des intérêts d'emprunt entre les 5 février 1998 et 24 juillet suivant n'a pas de lien direct avec le sinistre ; qu'il y a lieu, sur ce point, de faire droit à l'appel incident du syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu en ce qu'il a été à tort condamné à verser aux intéressés une somme de 12 250 F ;
Considérant, enfin, qu'en raison même du sinistre les époux X ont subi des troubles dans leurs conditions d'existence tenant notamment à l'inondation de leur maison d'habitation, aux désordres affectant leur appentis de jardin, à la présence d'étais sur leur propriété, à l'échec de la vente de celle-ci, le Tribunal administratif leur a alloué une somme de 20 000 F ; qu'eu égard à l'importance de ces troubles, il y a lieu de leur allouer une somme de 11 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X sont seulement fondés à demander à ce que la somme de 32 250 F (4 916,48 euros) allouée par le Tribunal administratif d'Orléans soit portée à 15 000 euros ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant que M. et Mme X ont droit aux intérêts de la somme de 15 000 euros à compter du 3 avril 1998, date d'enregistrement de leur demande devant le Tribunal administratif d'Orléans ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 10 avril 2000 ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu à verser à M. et Mme X une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 32 250 F (trente-deux mille deux cent cinquante francs) que le syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu a été condamné à payer à M. et Mme X est portée à 15 000 euros (quinze mille euros). Ladite somme portera intérêts à compter du 3 avril 1998. Les intérêts échus le 10 avril 2000 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 29 mars 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X et de l'appel incident du syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu est rejeté.
Article 4 : Le syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu versera à M. et Mme X une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, au syndicat intercommunal à vocation multiple de Loches, Beaulieu-lès-Loches, Perrusson, Ferrière-sur-Beaulieu, à la commune de Loches et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
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