Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros toutes taxes comprises au bénéfice de son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par un jugement n° 2304989 du 10 octobre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée sous le n° 24NC00844 le 4 avril 2024, M. A..., représenté par Me Perez, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 10 octobre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation et lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros toutes taxes comprises au bénéfice de son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- son état de santé justifie que lui soit délivré un titre de séjour en l'absence de traitement approprié dans son pays d'origine ;
- l'obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale ; elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale ;
- la décision fixant le pays de renvoi est fondée sur une obligation de quitter le territoire français illégale.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 septembre 2024, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Guidi, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant serbe, est entré en France selon ses dires en août 2016. Il a présenté une demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié qui a été rejetée par le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 29 janvier 2020. Le 26 novembre 2021, M. A... a sollicité son admission au séjour en raison de son état de santé. Par un arrêté du 7 novembre 2022 la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 10 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. / Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent article par le service médical de l'office ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre ".
3. Il ressort des mentions de l'avis du collège de médecins de l'Office du 1er avril 2022, que si l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Serbie, y bénéficier d'un traitement approprié. Si les certificats médicaux produits à l'instance établissent que M. A... souffre d'une pathologie cardiaque grave opérée, le seul certificat antérieur à la date de la décision attaquée du 24 septembre 2021 émanant d'un médecin cardiologue qui mentionne de manière peu circonstanciée que " il est difficile d'avoir les soins dont il a besoin dans son pays d'origine ", n'est pas suffisant pour remettre en cause l'appréciation portée par le collège de médecins de l'OFII sur l'existence d'un traitement approprié en Serbie sur laquelle la préfète s'est fondée. Par ailleurs, si le requérant se prévaut en particulier d'un rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) du 6 mars 2019 relatif au traitement d'une cardiomyopathie ischémique en Serbie, ce document fait état de considérations très générales sur le système de santé et de sécurité sociale dans ce pays, dont il ne ressort au demeurant pas qu'aucun traitement adapté aux pathologies de l'intéressé ne lui serait accessible. Dans ces circonstances, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
4. En premier lieu, les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour ayant été écartés, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de cette décision ne peut pas être accueilli.
5. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. A... soutient qu'il réside habituellement en France depuis août 2016. Toutefois, la durée de son séjour sur le territoire français est en grande partie liée à l'examen de sa demande d'asile rejetée et à son refus de déférer à une précédente mesure d'éloignement. Son épouse réside également de manière irrégulière en France et a également fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Serbie. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant serait dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie. Enfin, la circonstance qu'il réalise du bénévolat et qu'il ait suivi des cours de français n'est pas suffisante pour justifier de liens forts avec la société française. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la préfète, en adoptant la décision attaquée, n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. Les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination en litige devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de la mesure d'éloignement pris à l'encontre de M. A... ne peut pas être accueilli.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 10 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Guidi, présidente,
- M. Michel, premier conseiller,
- Mme Barrois, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 juillet 2025.
La présidente-rapporteure,
Signé : L. Guidi
L'assesseur le plus ancien
Dans l'ordre du tableau,
Signé : A. Michel
La greffière,
Signé : I. Legrand
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
I. Legrand
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