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10/07/2025 | FRANCE | N°24NC03080

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 5ème chambre, 10 juillet 2025, 24NC03080


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2024 par lequel le préfet du Doubs l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.



Par un jugement n° 2401528 du 12 novembre 2024, le tribunal administratif de

Besançon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2024 par lequel le préfet du Doubs l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2401528 du 12 novembre 2024, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2024, M. B... A..., représenté par Me Andujar, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 novembre 2024 ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens de l'instance.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas régulièrement motivée ;

- sa situation n'a pas été entièrement examinée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire n'est pas motivée ;

- elle méconnaît le 3° de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistrée le 18 février 2025, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Durup de Baleine a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né en 1994, est entré sur le territoire français, le 28 octobre 2019 selon ses déclarations. Par un arrêté du 29 juillet 2024, le préfet du Doubs lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Il relève appel du jugement du 12 novembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. L'arrêté contesté comporte l'indication des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui est, dès lors, régulièrement motivée, conformément aux dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

3. L'arrêté contesté comporte également l'indication des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision de ne pas accorder à M. A... un délai de départ volontaire. Il en résulte que cette décision est régulièrement motivée, conformément aux dispositions des articles L. 613-1 et L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; / 6° L'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois a méconnu les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail. / (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2. / (...) ". Aux termes de cet article L. 5221-2 : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / (...) / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ".

5. Il ressort, tout d'abord, des pièces du dossier que M. A..., qui, ainsi que le constate l'arrêté contesté, a déclaré être entré en France le 28 octobre 2019 sans être muni des documents et visas exigés à l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français. Il en ressort également que M. A..., qui, ainsi que le constate l'arrêté contesté, a fait l'objet de décisions du préfet de la Seine-Saint-Denis du 18 janvier 2022 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai ainsi qu'interdiction de retour sur le territoire français pendant un an mais s'est maintenu sur ce territoire en dépit de ces décisions et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour depuis son entrée en France, s'est maintenu sur ce territoire sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Il en résulte qu'il se trouve dans le cas prévu au 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut faire obligation à l'étranger de quitter le territoire français.

6. Il ressort, ensuite, des pièces du dossier qu'ainsi qu'il n'est pas contesté, le requérant a, sous une autre identité déclaré, été interpellé en 2022 en raison de faits de contrebande de cigarettes et, par un arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 18 janvier 2022, a fait l'objet de décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pendant un an, mais n'a pas justifié avoir respecté cette obligation et s'est, en fait, maintenu sur ce territoire. Il n'est pas davantage contesté qu'il s'est procuré et a fait usage, à tout le moins en 2023 et pendant une partie de l'année 2024, d'une carte d'identité italienne contrefaite, à l'effet de pouvoir travailler en France. Il a, le 29 juillet 2024, été interpellé et placé en garde à vue en raison de ces faits de détention et usage d'un faux document administratif. Il a, ainsi, détenu et fait usage d'un faux document administratif étranger. Le même jour, le ministère public près le tribunal judiciaire de Besançon l'a convoqué en vue d'une ordonnance pénale délictuelle pour avoir, entre le 7 juin 2023 et le 29 juillet 2024, fait usage d'une carte d'identité italienne, document administratif falsifié et ce, au préjudice de l'Etat français et détenu frauduleusement ce document délivré par une administration publique en vue de constater un droit, une identité ou une qualité ou d'accorder une autorisation, document que M. A... savait falsifié. Compte tenu de ces diverses circonstances, le préfet du Doubs a pu valablement et sans erreur d'appréciation considérer que le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public. M. A... ne résidant pas régulièrement en France depuis plus de trois mois, il se trouve ainsi également dans le cas prévu au 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut faire obligation à l'étranger de quitter le territoire français.

7. Il ressort, enfin, des pièces du dossier que M. A... a, en particulier au moyen de cette carte d'identité italienne contrefaite, exercé des activités professionnelles salariées en France, sans qu'ait été obtenue au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2 du code du travail. Il a ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 5221-5 de code. Dès lors et faute de résider régulièrement en France depuis plus de trois mois, il se trouve, en outre, dans le cas prévu au 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut obliger l'étranger à quitter le territoire français.

8. Il résulte de l'instruction que, pour prendre l'arrêté contesté, le préfet du Doubs a examiné, de manière complète etprécise, la situation particulière de M. A.... Par suite, le moyen tiré de l'absence d'un tel examen ne peut qu'être écarté.

9. Il ressort des pièces du dossier que, si le requérant allègue être arrivé en France au mois d'octobre 2019, il n'en justifie toutefois pas et cette entrée était irrégulière. Il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Il s'est soustrait à l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet le 18 janvier 2022. Le préfet du Doubs a pu légalement estimer que le comportement de M. A... représente une menace pour l'ordre public. M. A... s'est marié en France le 24 février 2024 avec une compatriote née en 1996, résidant régulièrement en France et titulaire en dernier lieu d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans délivré le 26 février 2024. Toutefois, ce mariage est très récent et, si l'épouse du requérant est enceinte à la date de l'arrêté contesté, ils n'ont pas à la même date d'enfant ensemble. L'épouse du requérant est de même nationalité que lui et il ne ressort pas du dossier qu'elle exercerait, ou aurait exercé avant même son état de grossesse, une activité professionnelle en France. Les époux ne pouvaient ignorer au moment de ce mariage le 24 février 2024 la situation de séjour irrégulier de l'époux ni que, dans une telle situation, ce mariage ne leur donnait aucune garantie d'être en droit de localiser leur vie conjugale et familiale en France, de préférence à l'Algérie. Dans ces conditions, il ne ressort pas du dossier que l'épouse du requérant ne pourrait l'accompagner dans le pays dont ils sont tous deux les ressortissants, la possibilité pour le requérant de, le cas échéant, se voir délivrer un titre de séjour relevant, en outre, des règles propres au regroupement familial, aucune procédure de regroupement familial n'ayant été néanmoins engagée. En outre, M. A... n'est pas sans attaches familiales en Algérie, où résident sa mère ainsi que ses frères et sœurs. Enfin, si le requérant rappelle qu'il a exercé des activités professionnelles en France, il n'était toutefois pas en droit de le faire, notamment pas en usant d'un document d'identité étranger contrefait. Dès lors, eu égard à la durée et aux conditions du séjour du requérant en France, à la nationalité de son épouse et aux effets d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, le préfet du Doubs a pu l'obliger à quitter le territoire français sans commettre d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une telle obligation sur la situation personnelle de M. A....

10. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 de ce code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) / 7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. ".

11. Il ressort des pièces du dossier que, comme il a déjà été dit, le préfet du Doubs a pu légalement considérer que le comportement de M. A... constitue une menace pour l'ordre public. Dès lors, ce préfet a pu valablement et sur le fondement du 1° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser de lui accorder un délai de départ volontaire.

12. Il ressort également des pièces du dossier que M. A... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, décidée à son encontre par le préfet de la Seine-Saint-Denis le 18 janvier 2022 et a fait usage d'un document d'identité italien contrefait. En outre, si, lors de son audition par les services de police le 29 juillet 2024, M. A... a déclaré avoir un passeport, il n'en a, toutefois pas justifié et n'a, ainsi, pu présenter de documents d'identité ou de voyage en cours de validité. Sa situation relève ainsi des cas prévus aux 1°, 5° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lesquels le risque, prévu au 3° de l'article L. 612-2 de ce code, que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français, peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière. Si M. A... se prévaut des circonstances qu'il s'est marié le 24 février 2024 à Lyon avec une ressortissante algérienne née en 1996, titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans qui lui a été délivré le 26 février 2024 par le préfet du Rhône, de ce que son épouse est enceinte à la date de l'arrêté contesté et qu'il justifie d'une résidence stable avec son épouse à Saint-Priest, ces faits ne suffisent pas, eu égard à l'ensemble du comportement de M. A..., à établir qu'il présenterait des garanties de ne pas se soustraire à l'exécution d'une mesure d'éloignement. Par suite, c'est par une exacte application du premier alinéa de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet du Doubs a estimé que M. A... ne justifiait d'aucune circonstance particulière, permettant de considérer que le risque de soustraction à la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas établi.

13. Il résulte ainsi de ce qui a été dit aux points 11 et 12 ci-dessus que le préfet du Doubs ne s'est pas livré à une inexacte application des 1° et 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire.

14. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) ". L'article L. 613-2 de ce code dispose : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées. ".

15. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. L'autorité compétente doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

16. Il ressort de l'arrêté contesté qu'il comporte l'indication des considérations de droit et de fait fondant, tant en son principe qu'en sa durée, la décision de son auteur de faire interdiction à M. A... de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Cette motivation, qui permet au requérant à sa seule lecture de comprendre les motifs de cette interdiction, atteste de la prise en compte de l'ensemble des critères prévus par l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il en résulte que la décision portant interdiction de retour est régulièrement motivée.

17. Il résulte de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, il appartient au préfet d'assortir cette décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, à moins que des circonstances humanitaires n'y fassent obstacle. En outre, pour fixer la durée de cette interdiction de retour, il appartient à l'autorité compétente de tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'énumèrent les dispositions de l'article L. 612-10 de ce code, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.

18. L a durée, non établie, de la présence de M. A... sur le territoire français n'est pas importante. Son mariage au mois de février 2024 avec une compatriote établie en France est très récent. Il ne justifie pas de liens personnels, en particulier privés et familiaux, importants et anciens en France, l'ensemble des autres membres de sa famille n'y résidant pas. Il a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il n'a pas respecté. Le préfet du Doubs a pu légalement estimer que la présence de M. A... sur ce territoire représente une menace pour l'ordre public. Si le requérant fait état de difficultés personnelles qu'il pourrait rencontrer en Algérie, il n'apporte sur ce point aucune précision. En outre, son épouse, de même nationalité que lui, peut l'y accompagner. Dans ces conditions, ne ressortent pas du dossier des circonstances humanitaires qui auraient proscrit que soit décidée une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Il en résulte que les moyens tirés de ce que ce préfet a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en prononçant à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an doivent être écartés.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Durup de Baleine, président,

- M. Barlerin, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2025.

Le président-rapporteur,

Signé : A. Durup de BaleineL'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

Signé : A. Barlerin

Le greffier,

Signé : A. Betti

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Betti

2

N° 24NC03080


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC03080
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DURUP DE BALEINE
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP DE BALEINE
Rapporteur public ?: Mme BOURGUET
Avocat(s) : ANDUJAR CAMACHO

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-10;24nc03080 ?
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