Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
M. E... C... et Mme A... B... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 20 juin 2024 par lesquels la préfète du Bas-Rhin leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement d'office et leur a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
Par un jugement n°s 2404829, 2404830 du 5 septembre 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédures devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2024 sous le n° 24NC02641, M. D..., représenté par Me Berry, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 septembre 2024 ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas régulièrement motivée ;
- sa situation individuelle n'a pas été examinée ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi, illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, méconnaît les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est privée de base légale ;
- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- subsidiairement, il y a lieu de suspendre la mesure d'éloignement dans l'attente de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2024, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- la demande de suspension de la mesure d'éloignement est sans objet.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2024.
II. Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2024 sous le n° 24NC02642, Mme A... B... épouse C..., représentée par Me Berry, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 septembre 2024 ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas régulièrement motivée ;
- sa situation individuelle n'a pas été examinée ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi, illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, méconnaît les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est privée de base légale ;
- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- subsidiairement, il y a lieu de suspendre la mesure d'éloignement dans l'attente de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2024, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- la demande de suspension de la mesure d'éloignement est sans objet.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2024.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Durup de Baleine a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Après être entrés sur le territoire français le 7 janvier 2024, M. E... C..., ressortissant géorgien né en 1958 et Mme A... B..., ressortissante géorgienne née en 1962, son épouse, ont présenté des demandes d'asile, que le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejetées par des décisions du 23 mai 2024. Par des arrêtés du 20 juin 2024, la préfète du Bas-Rhin leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, laquelle obligation fixe à pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'issue de ce délai, et leur a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an. Par des requêtes qu'il y a lieu de joindre, ils relèvent appel du jugement du 5 septembre 2024 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur les conclusions tendant à la suspension de l'exécution des obligations de quitter le territoire français :
2. Il ressort des pièces des dossiers que, par des ordonnances du 24 septembre 2024, notifiées le 13 novembre 2024, postérieurement à l'enregistrement des requêtes, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté les recours dirigés par M. et Mme C... contre les décisions du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 mai 2024 rejetant leurs demandes d'asile. Il en résulte que les conclusions subsidiaires des requêtes tendant, sur le fondement des dispositions de l'article L. 752-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suspension de l'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire français, sont sans objet.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Les arrêtés du 20 juin 2024 comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement des décisions portant obligation de quitter le territoire français. Il en résulte que ces décisions sont régulièrement motivées.
4. Il résulte de l'instruction que, pour prendre les arrêtés attaqués, la préfète du Bas-Rhin a examiné les situations particulières des requérants, sans méconnaître l'étendue de la compétence d'appréciation dont elle était investie.
5. Il ressort des pièces des dossiers que les requérants se trouvent dans le cas prévu au 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut obliger un étranger à quitter le territoire français.
6. Les requérants se prévalent de la circonstance que, le 27 mars 2024, M. C... a déposé une demande de titre de séjour. Toutefois, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne confère pas le droit de se maintenir sur le territoire français et, dès lors, ne fait pas obstacle à ce que le préfet fasse obligation de quitter le territoire français à un étranger qui, ne bénéficiant plus du droit de se maintenir sur ce territoire en application des articles L. 542-1 et L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se trouve dans le cas prévu au 4° de l'article L.611-1 de ce code.
7. Lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français.
8. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ".
9. Les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prescrivent pas l'attribution de plein droit d'un titre de séjour.
10. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. ".
11. Le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyait, dans sa rédaction abrogée par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, que ne pouvait faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français l'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
12. Il en résulte qu'à la date des arrêtés contestés du 20 juin 2024, la circonstance qu'un étranger remplirait les conditions ouvrant droit à la délivrance du titre de séjour prévu par l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne fait pas en elle-même obstacle à ce qu'il puisse légalement lui être fait obligation de quitter le territoire français. Dès lors, doit être écarté le moyen tiré de ce que, M. C... présentant un état de santé nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et sa prise en charge médicale n'étant pas accessible en Géorgie, la préfète du Bas-Rhin ne pouvait légalement faire obligation aux requérants de quitter le territoire français.
13. Si les requérants font valoir que, selon eux, l'état de santé de M. C... nécessite une prise en charge médicale à défaut de laquelle il pourrait en résulter pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne ressort toutefois pas des dossiers que M. C... ne pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée à son état de santé en Géorgie, alors qu'il a vécu hors de France pendant plus de soixante-cinq ans. Dès lors, ils ne sont pas fondés à prétendre qu'en raison de cet état de santé, la préfète du Bas-Rhin, en leur faisant à tous deux obligation de quitter le territoire français, a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de telles décisions de retour sur leurs situations personnelles.
14. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
15. Il ressort des pièces du dossier que le séjour de M. et Mme C... en France, remontant au mois de janvier 2024, est très récent. Leurs demandes d'asile ont été rejetées et leur droit de se maintenir sur le territoire français en qualité de demandeurs d'asile a pris fin. Ils ne justifient pas de liens personnels, de nature privée et familiale, particuliers sur ce territoire. Leur vie privée et familiale peut se poursuivre dans le pays dont ils sont les ressortissants et où ils ont vécu pendant plusieurs dizaines d'années. En outre, il ne ressort pas des pièces des dossiers que l'état de santé de M. C... impliquerait nécessairement qu'avec son épouse ils demeurent en France. Dès lors, compte tenu de la durée et des conditions du séjour des requérants en France et eu égard aux effets de décisions portant obligation de quitter le territoire français, la préfète du Bas-Rhin, en leur prescrivant de quitter ce territoire dans un délai de trente jours, n'a pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts dans lesquels de telles obligations leur ont été faites. Par suite, les décisions portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
16. Aux termes de l'article L. 612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays, fixé en application de l'article L. 721-3, à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ". Aux termes de l'article L. 721-3 du même code : " L'autorité administrative fixe, par une décision distincte de la décision d'éloignement, le pays à destination duquel l'étranger peut être renvoyé en cas d'exécution d'office d'une décision portant obligation de quitter le territoire français (...) ". Aux termes de l'article L. 721-4 du même code : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : / 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
17. En premier lieu, ne ressortent pas des dossiers des raisons sérieuses de penser que les requérants, dont d'ailleurs les demandes d'asile ont été rejetées, seraient effectivement personnellement exposés à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants en Géorgie. Il n'est pas établi que leurs vies ou leurs libertés y seraient menacées.
18. Les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales font obstacle à l'éloignement vers son pays d'origine d'un ressortissant étranger gravement malade lorsqu'il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou du défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie. Ces cas très exceptionnels correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'article 3.
19. Il ressort des pièces du dossier qu'alors même que M. C... présente, quant à son état de santé, des antécédents défavorables anciens, il a pu vivre dans le pays dont il est originaire jusqu'à un âge de plus de soixante cinq ans. L'un des documents qu'il présente fait état, quant à ces antécédents, d'un pontage aorto-coronarien en 2020, époque à laquelle le patient n'était pas en France. Il a bénéficié en France le 8 janvier 2024 d'une recanalisation par crossover avec angioplastie de l'artère fémorale superficielle proximale intra-stent droite associée à une angioplastie de l'artère fémorale superficielle droite au tiers moyen au ballon simple associée à une recanalisation, d'une angioplastie et restenting intra-stent poplité droite et d'une angioplastie au ballon de l'artère tibiale antérieure droite. Il est également affecté d'une baisse d'acuité auditive devenant invalidante. Aucun élément au dossier ne permet de considérer qu'il ne pourrait, en suite de la prise en charge dont il a bénéficié en France, bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée à son cas en Géorgie. Dès lors, il n'y a pas de motifs sérieux de croire que M. C... ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats en Géorgie ou du défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposé à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie.
20. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 17 à 19 les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
21. Compte tenu de ce qui a été dit quant à la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que celles fixant le pays de destination et celles leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant un an sont illégales en raison de l'illégalité de ces obligations.
22. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".
23. Il résulte des termes mêmes des articles 4 des arrêtés contestés qu'ils prévoient que la durée d'un an des interdictions de retour ne commencera à courir qu'à compter de l'exécution des obligations de quitter le territoire français, conformément à ce qui résulte du deuxième alinéa de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si ces articles 4 énoncent également que ces interdictions de retour sont exécutoires dès la notification de ces arrêtés, de telles énonciations ne méconnaissent pas ce deuxième alinéa, qui fixe le point de départ de la durée d'une interdiction de retour mais ne régit pas les conditions selon lesquelles l'acte prononçant cette interdiction est exécutoire. Il en résulte que, depuis que ces arrêtés sont exécutoires, c'est-à-dire depuis leurs notifications aux intéressés le 26 juin 2024, ils font l'objet chacun d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an qui commencera à courir lorsque les obligations de quitter le territoire français auront été exécutées.
24. La durée du séjour des requérants en France est extrêmement brève. Ils ne justifient d'aucun lien personnel particulier dans ce pays. Ils sont arrivés sur le territoire français le 7 janvier 2024 et se seraient présentés à la préfecture du Bas-Rhin en vue de demander l'asile le 9 janvier 2024, des attestations de demande d'asile en procédure accélérée, les autorisant à se maintenir provisoirement en France, leur ayant, en tout cas, été délivrées le 12 janvier 2024. Les demandes d'asile ont été enregistrées auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 12 février 2024. Dès le 8 janvier 2024, M. C... a été opéré dans un service de chirurgie vasculaire des hôpitaux universitaires de Strasbourg. Il a ensuite bénéficié de consultations dans cet hôpital. S'il avait le 27 mars 2024 déposé une demande de titre de séjour en se prévalant de son état de santé, il ressort toutefois des pièces des dossiers qu'il n'a pas présenté les documents nécessaires à l'enregistrement et à l'instruction d'une demande de cette nature, de sorte que cette demande a été classée sans suite. Ces circonstances sont propres à établir que M. C..., qui est dispensé de visa de court séjour pour entrer sur le territoire français, ne s'y est rendu le 7 janvier 2024 que pour bénéficier d'une prise en charge médicale spécifique, les requérants ne justifiant pas de leurs ressources, alors qu'aucun élément aux dossiers ne permet d'estimer que ce requérant ne pourrait bénéficier en Géorgie d'une prise en charge appropriée à son état de santé. Compte tenu de l'ensemble des éléments caractérisant ainsi les conditions de la très brève durée du séjour des requérants en France, il ne ressort pas des pièces des dossiers que la préfète du Bas-Rhin aurait commis une erreur d'appréciation en estimant qu'il y avait lieu, sur le fondement de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de leur faire interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
25. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Sur les frais liés au litige :
26. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans les présentes instances la qualité de partie perdante, le versement de sommes à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de suspension de l'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire français.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme C... sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à Mme A... B... épouse C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Claude Berry.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 3 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Durup de Baleine, président,
- M. Barlerin, premier conseiller,
- Mme Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2025.
Le président-rapporteur,
Signé : A. Durup de BaleineL'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
Signé : A. Barlerin
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
2
N°s 24NC02641, 24NC02642